A 25 minutes de train du centre de Londres (Victoria Station), le quartier de Bedzed (Beddington Zero Energy Development) passe, depuis son achèvement en 2002, comme l’une des réussites les plus accomplies en matière de développement durable. Tous les paramètres semblent avoir été pris en compte, de la provenance locale d’une grande partie des matériaux de construction (plus de la moitié provient de sites distants de moins de 50 kilomètres de Bedzed), à l’autosuffisance en matière énergétique, en passant par la récupération des eaux pluviales et l’incitation aux « déplacements doux ». De même, dès sa conception, de bonnes fées se sont penchées sur son berceau : une maîtrise d’ouvrage militante, l’organisation écologique « Bioregional development group », associée pour l’occasion au bailleur social Peabody, principale association caritative londonienneen matière de logement, et à un maître d’œuvre spécialiste de l’architecture écologique, l’architecte Bill Dunster avec son agence ZedFactory.
L’opération, par sa taille relativement réduite (85 logements, 2 500 m2 de bureaux, quelques commerces et équipements), par sa superficie limitée (1,7 hectare sur l’emprise d’une friche industrielle) et par la proximité d’une gare ferroviaire (à cinq minutes de marche), se prêtait remarquablement à une opération de ce type. L’une des premières caractéristiques « durables » de ce quartier est d’ailleurs sa densité élevée (près de 100 logements à l’hectare, si l’on retire la superficie du terrain de sport), qui tranche avec les quartiers pavillonnaires habituels de la banlieue londonienne.
La deuxième caractéristique est l’imbrication des fonctions : appartements, maisons de ville (sur deux niveaux), « maisonnettes » (sur un niveau), bureaux et équipements prennent place dans sept bâtiments étirés en longueur, d’une hauteur de R 2, implantés parallèlement selon une direction est-ouest.
Le troisième constat vient de la forte présence végétale, aussi bien en toiture, dans les jardins suspendus des premiers et seconds étages, ou dans les jardins de rez-de-chaussée qui bordent les allées piétonnes.
Mais ce sont les objectifs en matière énergétique qui ont fait l’objet des plus grands soins : le cahier des charges prévoyait la seule utilisation d’énergies renouvelables, une économie très substantielle des consommations – notamment en matière de chauffage – et l’absence de rejet de gaz à effet de serre.
Pour la fourniture d’électricité et de chaleur, une centrale à cogénération utilisant des copeaux de bois (850 tonnes par an) a été construite et intégrée au quartier, alimentant les logements et les bureaux.
D’autre part, plusieurs dispositifs architecturaux contribuent fortement à diminuer la demande en énergie : des loggias vitrées installées en façade sud captent et retiennent le rayonnement solaire, des cheminées de ventilation installées en toiture font entrer de l’air frais tout en récupérant une partie des calories de l’air évacué. Les résultats en la matière semblent probants, les consommations ont été drastiquement réduites par rapport à un logement traditionnel : -60 % pour la consommation globale ; -90 % sur le seul poste du chauffage !
Cependant, l’objectif d’autosuffisance énergétique n’est plus atteint depuis 2005, la centrale – un prototype – ayant cessé de fonctionner et l’entreprise qui en avait assuré la conception et la maintenance ayant fait faillite. Il est fait appel au réseau national, en attendant la construction d’une nouvelle centrale, envisagée par la fondation Peabody dans l’année à venir.
L’autre paramètre important, qui a donné entière satisfaction, est la récupération des eaux pluviales et des eaux de douches et de lavabos qui sont stockées, dans des réservoirs en sous-sol, pour être réutilisées pour l’arrosage des jardins et pour les sanitaires. Une récupération qui allège de plus de 15 % la quantité totale de l’eau consommée, tout en contribuant à densifier la présence végétale.
Enfin, le chapitre des déplacements, probablement le plus difficile à maîtriser, est plus décevant, même si le quartier est bien raccordé aux transports en commun. Le système de location de voitures électriques mis à disposition des habitants n’a pas connu le succès escompté. Malgré la possibilité de recharger gratuitement les batteries, grâce à des bornes placées au pied de chaque logement et alimentées par les panneaux photovoltaïques de toiture, seuls trois véhicules fonctionnent à plein-temps.
Le quartier Bedzed, très ambitieux dans ses objectifs, a probablement patî de son caractère expérimental. Mais le bilan reste largement positif, notamment sur le plan énergétique, mais aussi pédagogique : ses habitants, a priori peu sensibilisés à l’environnement, se sont appropriés peu à peu un mode de vie plus écologique.




