Lancé dans la foulée des chantiers du Grand Paris Express, en mars 2018, à l'initiative de la Ville de Sevran (Seine-Saint-Denis) et de 12 autres partenaires, le projet Cycle Terre de production de blocs, mortiers et enduits en terre crue pour la construction entrera bientôt en phase opérationnelle. Les travaux de la Fabrique, le bâtiment de 2 200 m2 qui abritera cette activité, s'achèveront en juillet. La maîtrise d'ouvrage est assurée par Quartus avec l'agence Joly & Loiret comme maître d'œuvre, tous deux partenaires du projet Cycle Terre. Plusieurs entreprises ont participé à ce chantier parmi lesquelles Alric (gros œuvre), Houot (charpente), Cruard (bardage et couverture) et Apij Bat (terre crue). Une fois les machines et les lignes de production installées, la fabrication devrait démarrer début septembre et les premiers blocs de terre compressée sortir de l'atelier fin octobre-début novembre.
La société coopérative d'intérêt collectif (Scic) Cycle Terre, chargée d'exploiter le site, a été créée le 30 juillet 2020. Présidée par l'architecte Paul-Emmanuel Loiret (agence Joly & Loiret), elle rassemble huit sociétaires, le plus important porteur de parts étant le groupe ECT, spécialisé dans la valorisation de terres de chantiers urbains. La coopérative, qui a déjà recruté un directeur général, Teddy Dusausaye, expérimenté en gestion de production industrielle, embauchera 15 personnes dans un premier temps. Cycle Terre a par ailleurs commencé à initier des formations spécifiques pour la pose de ces matériaux.
Intérêt des collectivités. Le coût de ce projet s'élève à 6,5 M€, subventionné à hauteur de 5,35 M€. Original et audacieux, il semble avoir été compris des entreprises du bâtiment et des promoteurs. Silvia Devescovi, cheffe du projet Cycle Terre à la Ville de Sevran, pointe aussi l'intérêt des collectivités locales comme Rosny-sous-Bois et Montfermeil pour la construction d'écoles, ou l'EPT Paris Terres d'Envol pour celle du Colisée, future aréna dédiée à la culture et au sport, à Tremblay-en-France… Ces projets laissent augurer des débouchés.
Les quarante mois écoulés ont également été mis à profit pour élaborer le catalogue de produits, définir les formulations et la production des blocs, rassembler les équipements pour la préparation des terres et le pressage, établir le mode de sélection de la matière première. « Nous travaillerons avec des limons des plateaux [du lœss, NDLR], des terres naturelles issues de déblais, sans pollution anthropique », insiste Sylvia Devescovi. La recherche des 6 000 t de besoins annuels fait l'objet d'un marché unique. La matière première est additionnée de sables de récupération, de fibres végétales (de la paille hachée, de la ouate de cellulose ou du chanvre) et de ciment pour les blocs des parties les plus exposés de bâtiments (premier rang, angles). La Fabrique produira 9 000 t de matériaux chaque année.
Pour répondre aux exigences des marchés, Cycle Terre a engagé l'incontournable parcours assurantiel. Une première appréciation technique expérimentale (Atex) sur les cloisons intérieures et les séparatifs doit bientôt être rendue par le CSTB. Une autre, sur les remplissages de façades, est à l'étude pour une publication estimée en septembre prochain. Pour présenter ses arguments en termes de développement durable, Cycle Terre travaille aussi les fiches de déclaration environnementales et sanitaires de ses produits. Elles souligneront notamment le caractère local des matériaux qui ont vocation à être distribués dans une zone de moins de 40 km autour du site de production.
L'entreprise vise un chiffre d'affaires de 100 000 à 130 000 € à la fin de l'année 2021 et projette d'atteindre 1,8 M€ par an dès le troisième exercice. Pour Sylvia Devesconi, la réflexion porte désormais sur le caractère réplicable de ce premier atelier.
