« Depuis un siècle les réseaux de chaleur sont développés partout au Danemark ; 50 % de la demande en chaleur du pays et deux tiers des ménages sont desservis par 450 réseaux. Dans les grandes villes, presque 100 % de la chaleur est fournie par ce système qui offre des prix compétitifs et pour lequel nous visons le zéro carbone en 2035 », s'est félicité Morten Jordt Duedahl, responsable du développement business, chez DBDH, organisation commerciale dont l'objectif est de promouvoir les réseaux de chaleur.
Volonté politique stable
Selon lui, pour développer ces réseaux vertueux il faut une volonté politique stable sur le long terme : « Au Danemark, quels que soient les partis, le gouvernement a toujours soutenu les réseaux de chaleur, notamment via la mis en place de taxes. Aujourd'hui, les réseaux sont alimentés majoritairement par des énergies renouvelables ».
Epée de Damoclès
Pour Patrice Vergriete, maire de Dunkerque et président de la communauté urbaine de Dunkerque, les réseaux de chaleur sont une excellente arme vers la transition énergétique. Surtout comme à Dunkerque, quand ils sont alimentés à 64 % par l'énergie fatale des usines du territoire. « Une nouvelle extension du réseau est en cours pour 12 millions d'euros afin de se raccorder à deux industriels. Nous recherchons de nouveaux industriels, le potentiel de chaleur fatal a récupérer est très grand. Reste le problème de l'assurance que nous n'avons pas résolu », met en avant Patrice Vergriete.
Si un industriel met la clef sous la porte avant que le réseau ne soit amorti cela serait en effet catastrophique pour la collectivité qui cherche une solution pour éliminer cette épée de Damoclès.
Usine appartenant à la collectivité
Sur la Métropole lilloise, l'épée est beaucoup moins menaçante puisque la chaleur fatale qui sera bien tôt récupérée sera issue d'une usine appartenant à la collectivité : l'incinérateur d'Halluin, ou centre de valorisation énergétique (CVE), qui brûle chaque année 350 000 tonnes de déchets. Le tarissement du gisement, qui pourrait venir de la politique de réduction des déchets, ne devrait cependant pas menacer la chaleur produite avant la fin de l'amortissement du réseau.
Relocaliser la production d'énergie
Alain Bezirard, le vice-président en charge des déchets à la Mel, souligne l'opportunité que représente cette connexion au CVE pour relocaliser une partie de la production d'énergie : « La facture énergétique de notre territoire est de 2 milliards d'euros par an. Deux milliards qui sont investis ailleurs. La production d'énergie pour nos réseaux de chaleurs permet de relocaliser cette production. Nous développons en parallèle production d'énergie photovoltaïque, de gaz vert et les smartgrids pour utiliser la bonne énergie pour le bon usage au bon moment ».
Arsenal d'instruments réglementaires et financiers européens
Pour favoriser le développement de réseaux de chaleurs alimentés en énergie renouvelable, la commission européenne a fixé des objectifs ambitieux couplés à un arsenal d'instruments réglementaires et financiers. « Entre 2020 et 2030, les états membres devront augmenter le recours aux énergies renouvelables dans la production de chaud et de froid de 1,3 points par an », souligne Ana Egea Herrero, à la direction énergie de la commission européenne.
Elle explique que 50 % de la consommation d'énergie en Europe est destinée aujourd'hui à chauffer ou refroidir, avec 75 % de la production de cette énergie réalisé par des énergies fossiles. « Actuellement les réseaux de chaleur fournissent 10 % de la chaleur en Europe avec une alimentation réalisée pour environ 20 % par des énergie renouvelables », note Ana Egea Herrero qui ajoute que la situation en Europe est très différente selon les pays, certains étant très bien couverts et d'autres n'ayant pas du tout de réseaux de chaleur.
Celsius pour progresser ensemble
Pour aider les collectivités à échanger et à progresser sur la mise en place de réseaux et sur leur alimentation en énergies renouvelables, il existe le programme Celsius. « C'est un centre de collaboration qui compte déjà 72 collectivités membres en Europe et qui permet de progresser ensemble sans devoir réinventer la roue », résume Emilia Pisani, responsable communication de l'initiative.