On le sait, le bâtiment est responsable de plus du quart des émissions nationales de CO2. L’efficacité de la rénovation énergétique du parc immobilier vieillissant – qui représente plus d’un tiers du parc existant en France – est un enjeu majeur pour atteindre les objectifs de transition et lutter contre la précarité énergétique.
Un dispositif conçu pour le neuf
Or, la réglementation actuelle en matière de rénovation thermique - découlant de la loi Climat et résilience -, repose sur des critères d’évaluation et des modèles conçus pour le neuf. Des mesures qui « incitent les propriétaires à faire usage de techniques d'isolation et de matériaux contemporains dont la compatibilité n'est pas assurée avec un bâti ancien », voire qui peuvent s’avérer contreproductives en cas de non-respect des modes de fonctionnement du bâti ancien, explique l’exposé des motifs d’une proposition de loi d’origine sénatoriale qui sera discutée en séance le 20 mars, après avoir fait l'objet de retouches en commission.
Le texte (court, cinq articles) vise ainsi à contribuer à l’amélioration de la performance énergétique des bâtiments anciens tout en préservant leurs qualités intrinsèques et leur valeur patrimoniale.
Le bâtiment ancien fait son entrée dans le CCH
L’article 1er, profondément remanié en commission, introduit et définit la notion de « bâtiment ancien » dans le Code de la construction et de l’habitation (CCH). Et précise simplement qu’il s’agit d’« un bâtiment construit avant 1948 selon des techniques et matériaux traditionnels » (art. L. 111-1 du CCH).
Il prévoit la prise en compte du confort intérieur d’hiver et d’été dans le cadre de la définition de la rénovation énergétique performante et entend éviter le remplacement systématique des menuiseries extérieures des bâtis anciens, afin de permettre l’étude de solutions alternatives respectueuses de ce bâti. En effet, « le changement de fenêtres en bois non totalement étanches assurant la circulation de l'air et de l'humidité par des fenêtres en polychlorure de vinyle (PVC) n'est pas anodin », et peut « entraîner des effets de condensation et de moisissure », souligne l'exposé des motifs.
DPE et audit énergétique adaptés
Le texte complète l’article L. 126-26 du CCH pour préciser que le diagnostic de performance énergétique (DPE) doit tenir compte des qualités constructives du bâti ancien et que ses recommandations de travaux devront être « adaptées aux contraintes techniques, architecturales et patrimoniales pesant sur le bâtiment, notamment aux caractéristiques hygrothermiques des matériaux le composant » (art. 2).
De la même façon, l’audit énergétique devra également tenir compte des spécificités des bâtiments anciens. Ainsi, l’article 3 dispose que les propositions de travaux doivent être « adaptées aux contraintes techniques, architecturales et patrimoniales pesant sur le bâtiment, notamment aux caractéristiques hygrothermiques des matériaux le composant, et garantissent une rénovation respectueuse du bâti ancien ».
En outre, lorsque le bâtiment audité présente un intérêt patrimonial, l’auditeur devra en plus justifier de « compétences spécifiques » qui seront fixées par décret. Cette nouvelle certification n’entrera en vigueur qu’en janvier 2027 pour « laisser un délai suffisant à la profession pour s’organiser et ne pas créer un goulet d’étranglement préjudiciable au respect des obligations d’audit énergétique) », explique la rapporteure du texte en commission Sylviane Noël (Haute-Savoie, LR).
MaPrimeRénov’
Enfin, en commission, les sénateurs ont supprimé la disposition du texte initial qui prévoyait une majoration de MaPrimeRénov’ et du crédit d’impôt accordé pour les travaux d’isolation. Une suppression justifiée par le « contexte actuel de tensions budgétaires », explique Sylviane Noël. En outre, poursuit-elle, « les conditions actuelles d’octroi de la prime permettent déjà, dans certains cas, de réduire le reste à charge pour de lourdes rénovations du bâti ancien. »
Plutôt qu’une majoration systématique de MaPrimeRénov’, la commission privilégie la réflexion et demande au gouvernement de remettre au Parlement un rapport « concernant les possibilités de soutiens financiers spécifiques à la rénovation énergétique des logements anciens. » Une mesure qui « éviterait tout effet d’aubaine tout en contribuant à l’atteinte des objectifs nationaux de résorption des passoires énergétiques. »
Les débats en séance seront riches, 24 amendements ayant été déposés sur le texte de la Commission.