Après quelques années de mise au point sur des questions de méthode, Paris a désormais bien engagé la phase opérationnelle de son Grand Projet de renouvellement urbain (GPRU). Equivalent d’un grand projet de ville (GPV), même s’il est arrivé trop tard pour bénéficier du label, ce dispositif de la politique de la ville s’applique sur 11 sites répartis dans les quartiers du nord et de l’est. En gros, l’ancienne zone des « fortifs », entre boulevards des maréchaux et boulevard périphérique, urbanisée entre les années 20 et 70. Au total, une constructibilité estimée à 1,6 million de m2, entraînant un investissement public de 160 millions d’euros jusqu’en 2008. « Il fallait répondre à la nécessité d’améliorer la vie quotidienne des 200 000 habitants qui vivent dans ces quartiers délaissés depuis trop longtemps et soumis aux nuisances du boulevard périphérique », explique Jean-Pierre Caffet, maire-adjoint chargé de l’urbanisme et de l’architecture.
Remettre à niveau ces quartiers. Dans ses objectifs, le GPRU parisien ne diffère donc pas de ses cousins de province. Il s’agit de « remettre à niveau » des quartiers défavorisés, sur le plan social comme sur le plan urbain : réhabiliter le parc de logements – au besoin par des opérations de démolition-reconstruction – construire des bâtiments abritant des activités et des bureaux, implanter de nouveaux équipements, requalifier les espaces publics et les espaces verts. Une volonté d’agir transversalement, sur toutes les composantes urbaines. L’intervention en matière sociale se traduit par une conduite de chaque projet en binôme : un chef de projet « urbanisme » et un chef de projet « social ». « Il s’agit d’associer à l’action d’aménagement qui relève forcément du long terme, une action sur le court terme à l’égard des populations : aide à l’insertion, à l’emploi, contacts avec le milieu scolaire », relève Catherine Barbé, directrice de l’urbanisme.
Les sites du GPRU parisiens se caractérisent par des spécificités particulières. Au chapitre des nuisances, la présence toute proche du boulevard périphérique est une donnée constante, qu’il faut traiter, par sa couverture lorsque c’est possible (Porte des Lilas), par la construction d’immeubles écrans (activités ou bureaux) dans les autres cas (Bédier, Binet).
Au chapitre des atouts, les terrains disponibles ne manquent pas, du fait de la faible densité des parcelles construites ou du fait du surdimensionnement des voiries qui permettent, en les réduisant et en les réaffectant, de produire des terrains constructibles (Porte Pouchet). Enfin, particularité que la Ville met volontiers en avant : la collaboration avec les communes de banlieue, mitoyennes des sites GPRU, associées dans les jurys qui décident des choix d’aménagement à travers les procédures d’études de définition. Car, et c’est la nouveauté, chaque site a fait l’objet d’études urbaines confiées à des architectes et urbanistes extérieurs à la Ville. Une rupture dans les habitudes parisiennes où l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur), officine municipale, exerçait jusque-là un monopole de fait, en produisant un urbanisme quelque peu standardisé. On en attend des idées nouvelles. Le site où la réflexion est le plus avancée, Porte Pouchet, semble aller dans ce sens : implantation d’équipements sous le viaduc du périphérique, construction sur l’emprise d’une voirie surdimensionnée, transformation radicale d’une tour d’habitation… Ainsi, le renouvellement urbain pourrait passer aussi par le renouvellement des habitudes et des esprits.
