Avec 36 départements placés au-delà du seuil de vigilance pour la sécheresse et 117 arrêtés préfectoraux de restriction des usages de l’eau recensés au 14 juin, la France connaît une situation alarmante. « Au vu des prévisions météo, le déficit devrait continuer à s’aggraver dans les trois mois qui viennent », alerte Violaine Bault, hydrogéologue au bureau de recherche géologique et minière (BRGM), chargée du bulletin mensuel sur le remplissage des nappes aquifères. Les situations les plus critiques se concentrent sur la Provence et le Centre-Ouest, en particulier la Charente, la Brenne, le Poitou et la Touraine.
Projets de territoires
Ce contexte conduit le centre scientifique et technique de l’organisme public, basé à Orléans, à s’adresser aux gestionnaires de l’eau : « La recharge maîtrisée des nappes aquifères fait partie des réponses au défi climatique », souligne Marie Pettenati, également hydrogéologue au BRGM et spécialiste de ces techniques. Après le Varenne conclu au début 2022 dans la foulée des assises de l’eau de 2018 et 2019, le contexte se prête au montage d’opérations intégrées aux projets de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) encouragés par l’Etat.
Avec une capacité de stockage de 76,6 millions de m3 et une production annuelle de 109,5 millions de m3 d’eau potable destinée à la métropole lyonnaise, le site de Crépieux Charmy (Rhône) fait figure de référence, mais aussi d’exception. Le BRGM participe à un nombre croissant d’expérimentations soutenues par les agences de l’eau, en privilégiant les nappes dites inertielles, c’est-à-dire celles qui se vidangent le plus lentement.
Ruissellement dans les agences de l’eau
A Rennes Métropole, l’organisme participe au programme Phoebus, qui vise à intégrer le potentiel d’infiltration pluvial dans le plan local d’urbanisme. Dans le cadre d’une étude financée par l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse, le BRGM étudie le potentiel de recharge dans le secteur Bièvre – Liers – Valloire. L’agence de l’eau Adour Garonne et Bordeaux Métropole financent une cartographie multicritères visant à créer des bassins d’infiltration en vue d’une utilisation des nappes dans les zones d’activités.
« Il n’y a pas de solution unique. Dans tous les cas, la recharge des nappes complète des stratégies de sobriété », insiste Marie Pettenati. Avec une cinquantaine de projets recensés par le BRGM, la France présente un bilan faible, comparé à celui des Pays-Bas et de l’Allemagne, malgré une panoplie de techniques maîtrisées : bassins d’infiltration, filtrats de berges, retenues perméables, réutilisation des eaux usées traitées ou des eaux pluviales…
Rattrapage tricolore
La forte exposition aux inondations et aux submersions marines explique la longueur d’avance prise par les Pays-Bas. Selon le BRGM, le changement climatique incitera un nombre croissant de collectivités françaises à se saisir de ces techniques de régulation d’une ressource de plus en plus aléatoire.