« Ce nouveau grand quartier parisien doit être exemplaire en matière de sobriété énergétique et d’énergies renouvelables, mettre en œuvre une gestion efficace de l’eau et un système novateur de collecte des déchets par pneumatique. La totalité des constructions atteindront les standards du bâtiment basse consommation (BBC) ou les dépasseront largement. D’autres objectifs traitent de la biodiversité, des matériaux utilisés, de la qualité de l’air, de la qualité environnementale et de confort d’usage des bâtiments et des espaces publics, de la mixité sociale et de l’accessibilité aux personnes handicapées. »
Cet extrait d’un document édité par la mairie de Paris en août 2009 pour décrire le futur quartier Clichy-Batignolles liste consciencieusement les thématiques classiquement retenues pour définir ce que doit être un « écoquartier ». Selon le niveau où les curseurs sont situés pour chacune de ces thématiques, il pourrait placer le quartier à l’avant-poste des projets urbains que la ville compte mener dans les prochaines années et devenir une sorte de quartier-témoin du Paris durable en ce début de XXe siècle. Les 3 000 logements et 100 000 m2 de bureaux, les équipements publics, le nouveau palais de justice et le parc de 10 ha devant être réalisés pour l’essentiel entre 2011 et 2017. Rien ne prédisposait particulièrement ce site longeant le faisceau ferroviaire de la gare Saint-Lazare aux confins du 17e arrondissement à devenir la vitrine de Paris en matière de développement durable. Ancienne « arrière-cour » de maintenance de la gare Saint-Lazare (entrepôts et plates-formes de réparation des trains), ces 50 ha qui constituent l’une des dernières grandes opportunités foncières située à l’intérieur du boulevard périphérique, étaient convoités par la Ville de Paris depuis le début des années 2000 pour en faire une ZAC classique de 3500 logements autour d’un parc central de 10 ha. Mais en 2003 les préoccupations écologiques sont revues à la hausse avec la candidature de Paris à l’organisation des jeux olympiques de 2012 : le secteur Clichy-Batignolles est choisi pour recevoir le village accueillant les athlètes et leurs accompagnateurs et le dossier parisien se veut exemplaire en matière de « haute ambition environnementale ».
Plan Climat
Après la déconvenue de juillet 2005 – le comité international olympique choisit finalement Londres – le projet est relancé par le Plan Climat parisien approuvé en octobre 2007, à travers lequel la Ville s’engage à réduire de 25 % ses émissions de gaz à effet de serre et ses consommations énergétiques et de porter à 25 % également la part des énergies renouvelables à l’horizon 2 020.
Malgré ces vicissitudes, le projet n’a pas connu de changements fondamentaux dans son plan d’ensemble et dans son équipe de conception, retenue en 2004 à la suite de marchés de définition, constituée de François Grether, urbaniste, Jacqueline Osty, paysagiste, et OGI, bureau d’études.
Le parc, dont la première phase a été réalisée dès 2008, occupe l’espace central tandis que les immeubles de logements – 50 % de logements sociaux – sont répartis en périphérie selon des configurations spatiales assez libres qui laissent la végétation pénétrer profondément entre les bâtiments. Les hauteurs peuvent monter jusqu’à R 12 avec un socle haut (RdC et R 1) de 8 m permettant d’accueillir toutes les fonctions urbaines, commerces, activités, services, équipements ou des logements « atypiques ». Les immeubles de bureaux sont concentrés sur une bande qui surplombe en partie le faisceau ferroviaire de la gare Saint-Lazare, préservant les logements et le parc des nuisances sonores dues au trafic des trains. La partie nord, le long du boulevard périphérique, a été retenue par l’Etat et la Ville en 2008 pour accueillir le nouveau palais de justice avec la possibilité de monter jusqu’à 200 m de hauteur. Le parc, aujourd’hui partiellement réalisé, est conçu comme un équipement qui associe activités et loisirs – terrains de sport, aires de jeux d’enfants, skate-park, prairie – et agrément paysager. Sur le plan environnemental, il joue un rôle important de régulation des eaux pluviales, l’objectif étant de limiter au maximum les rejets à l’égout. Les eaux de pluie y sont conduites par gravitation à un fossé rectiligne de 5 m de largeur qui traverse tout le parc. Il s’y développe une végétation de milieu humide originale qui accentue la biodiversité du quartier. En matière de consommation énergétique, les maîtres d’ouvrages publics et privés sont tenus par un CPEDD* d’atteindre des niveaux de consommation inférieurs aux 50 kWh/m2 par an prescrit par le Plan Climat, anticipant sur la future réglementation RT 2 012 et s’approchant du label allemand Passivhaus. En plus des différents systèmes d’isolation, la morphologie urbaine générale et les orientations des bâtiments cherchent à optimiser les apports solaires, notamment l’hiver et l’éclairage naturel. Un réseau de chaleur utilisant la géothermie sera mis en place et une production électrique par panneaux photovoltaïques sur certaines toitures ou façades pourrait fournir sur l’ensemble du quartier 4 millions de KWh par an, l’objectif déclaré étant d’approcher le « zéro émission de CO2 » sans renoncer à la diversité et à la créativité architecturale des bâtiments ni à la qualité et au confort des ambiances intérieures.
