PPP : la soutenabilité budgétaire va entraîner une plus grande sélectivité

La démonstration de la faisabilité juridique et économique d’un projet en PPP ne suffit plus, il faut désormais établir la soutenabilité budgétaire de l’opération. C’est ce qu’impose aux services de l’Etat et de certains établissements publics un décret publié le 29 septembre 2012. Pour François Bergère, directeur de la Mappp, il est temps en effet d’être plus sélectif sur les projets…

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François Bergère, directeur de la Mission d’appui aux partenariats public-privé (Mappp)

Le décret du 27 septembre 2012 impose aux services de l’Etat et aux établissements publics nationaux et de santé une étude dite de « soutenabilité budgétaire » de leurs projets de partenariats public-privé (PPP). Faut-il y voir une traduction réglementaire du faible enthousiasme de la nouvelle équipe gouvernementale pour ces montages ? « Nous travaillons sur ce texte depuis longtemps, assure un représentant de la Direction du budget au ministère de l’Economie et des Finances. La montée en puissance de ces types de contrats a permis de constater que le cadre prévu par l’ordonnance de 2004, notamment en son article 9, se révélait à l’usage trop général pour permettre une réelle contre-expertise budgétaire. Il s’agit donc de mieux prendre en compte cet aspect crucial dans la décision de recourir au PPP. »

« Eviter de lancer des projets pour s’apercevoir, en bout de course, qu’on ne peut les porter budgétairement »

Que prévoit concrètement le décret ? Ses dispositions s'appliquent aux contrats de partenariat de l'Etat  et de ses établissements publics ou de santé, aux autorisations d'occupation temporaire (AOT) de l’Etat et aux baux emphytéotiques hospitaliers. Désormais, l'évaluation préalable exigée dans ces montages devra s'accompagner d'une étude portant sur l'ensemble des conséquences de ces opérations sur les finances publiques et sur la disponibilité des crédits, ainsi que sur leur compatibilité avec les orientations de la politique immobilière. « L’objectif est simple, explique François Bergère, directeur de la Mission d’appui aux partenariats public-privé (Mappp). En imposant une étude de la soutenabilité budgétaire en amont de la procédure de passation, il s’agit d’éviter de lancer des projets – avec les investissements que cela suppose – pour s’apercevoir en bout de course que la personne publique n’a pas les moyens de porter les loyers sur toute la durée du contrat. Nous avons rencontré quelques situations difficiles de ce point de vue ces deux dernières années, c’est pourquoi la Mappp a appelé de ses vœux ce décret et participé à son élaboration.»

L’évaluation préalable, obligatoire notamment en matière de contrat de partenariat, vise en effet surtout à démontrer qu’un projet répond bien à l’une des conditions de recours au PPP, en faisant apparaître les motifs économiques, financiers, juridiques et administratifs qui conduisent à ce choix. La notion d’impact budgétaire ne figurait pas en tant que telle dans les textes (voir Focus ci-dessous). « L’étude visant à évaluer les conséquences sur les finances publiques et la disponibilité des crédits va permettre de s’assurer que les projets sont compatibles avec la programmation pluriannuelle, de vérifier la capacité à honorer sur le long terme le paiement des loyers, d'estimer « la rigidification » des budgets d’imputation, se félicite le représentant de la Direction du budget. Et de fournir des éléments permettant d’apprécier le traitement du PPP en comptabilité nationale, c'est-à-dire sur le solde des administrations publiques ».

Un coup de frein aux montages en PPP ?

In fine, cette étude de soutenabilité budgétaire sera l’un des éléments mis à la disposition des ministres dont l’accord sur le contrat est requis. Le décret du 27 septembre prévoit en effet que l'accord des ministres chargés de l'Economie et du Budget continuera à conditionner la signature des contrats de partenariat de l'Etat ou de ses établissements publics. Il introduit par ailleurs de nouveaux contrôles pour les contrats de partenariat des établissements publics de santé et les baux emphytéotiques hospitaliers. Selon la notice introductive du décret en effet, « l'accord des ministres chargés de la Santé, de la Sécurité sociale, du Budget et de l'Economie est désormais nécessaire avant le lancement de la consultation et au moment de la signature du contrat, le directeur de l'agence régionale de santé leur transmettant un avis préalable. »

Ce dispositif nouveau risque-t-il de porter un sérieux coup de frein aux montages en PPP ? « Il ne faut pas se faire d’illusion, commente le directeur de la Mappp. De façon générale, nous entrons dans une période où il faudra être beaucoup plus sélectif sur les projets éligibles, et notamment du point de vue de la capacité budgétaire à les réaliser. Car même si, en PPP, le coût est lissé sur une longue durée, il demeure un coût important à porter. »

Pour Philippe Malléa, avocat associé responsable du département droit public et financement de projet chez Jeantet Associés, « ce texte aura probablement pour impact d’augmenter la difficulté à utiliser ce type de montage, en multipliant les études à réaliser en amont. On a du mal à percevoir la plus-value de cette étude spécifique par rapport à l’évaluation préalable… Quel est son véritable objet si ce n’est de constituer un obstacle de plus ? ».

Application aux projets engagés à compter du 1er novembre

Les personnes publiques concernées devront intégrer au plus vite ces nouvelles dispositions, qui s'appliquent aux projets en vue desquels une consultation est engagée ou un avis de publicité envoyé à la publication à compter du 1er novembre. D’ici là, une circulaire devrait paraître pour expliciter les modalités d’application du décret, annonce-t-on à la Direction du budget.

Pour consulter le décret n° 2012-1093 du 27 septembre 2012 complétant les dispositions relatives à la passation de certains contrats publics, cliquez ici

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