C'est une première qui ne passe pas inaperçue dans le monde du bâtiment durable. Accompagné par Odéys, cluster construction et aménagements durables, le Crous de Poitiers (Vienne) isole actuellement par l'extérieur son restaurant universitaire de 1 300 places. Pour cela, 20 t de paille hachée ont été insufflées dans 600 m2 de murs à ossature bois. « La paille nécessite moins de maintenance que d'autres matériaux, sa durée de vie est longue et elle présente de bonnes performances thermiques, été comme hiver », explique Julien Michaud, directeur du patrimoine au Crous de Poitiers.
Pour l'entreprise Merlot, chargée du lot ossature bois, la mise en œuvre est plus aisée qu'avec des bottes de paille : les charges sont moins lourdes et les murs moins épais. Des enveloppes coupe-feu à l'extérieur et à l'intérieur ont été réalisées, ainsi que des recoupements de lames d'air en façade afin de gérer l'humidité, « ce qui fait partie de l'ADN d'une matière végétale, précise l'architecte Brice Kester de l'agence Duclos Riboulot Kester. Les fibres synthétiques, elles, se cassent et sont inutilisables au bout de quinze à vingt ans. »
Process industriel. Autre avantage de la paille hachée : elle répond facilement à un process industriel. Ce chantier marque d'ailleurs la constitution d'une filière locale, via l'installation à quelques kilomètres de la société coopérative d'intérêt collectif (Scic) Ielo qui a fourni le matériau et formé les entreprises pour l'insuffler. D'ici quelques mois, son outil industriel sera en service : le premier site de production français, porté par 300 agriculteurs locaux ainsi que par des entreprises et des collectivités.
Réemploi et low-tech sont aussi de la partie. En tout, 170 t de matériaux ont été réemployées sur site (dalles de faux plafond et radiateurs), intégrés dans une filière en lien avec des associations locales (cloisons de chantier OSB) ou utilisés sur d'autres chantiers (gravillons d'étanchéité). Une démarche qui, selon le maître d'ouvrage, doit se concentrer sur ce qui est simple. L'architecte a également cherché à accroître les performances du bâtiment en misant sur la low-tech avec l'installation dans le hall d'une verrière équipée d'ouvrants qui apportera à la fois lumière et ventilation naturelles. La présence de grilles sur les fenêtres, d'exutoires en toiture, de dalles perforées à la périphérie du plafond ainsi que l'inertie apportée par la structure originelle en béton assureront également une ventilation naturelle.
Cette opération qui bénéficie d'une Atex sera livrée en février prochain. D'un coût total de 5,5 M€, elle a été financée par le plan de relance (4,88 M€), l'agglomération du Grand Poitiers et le Crous.