Photovoltaïque : pour les professionnels, la nouvelle régulation ne rimera pas avec ambition

Alors que des professionnels de la filière photovoltaïque ont déposé mardi 21 décembre devant le Conseil d'Etat un recours en annulation du décret du 9 décembre dernier instituant un moratoire de trois mois sur les aides publiques à l'énergie solaire, le gouvernement a annoncé vouloir présenter un nouveau cadre de régulation vers la mi-février.

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Mise en place d'une toiture photovoltaïque

Recours en annulation, référés de suspension, motions et notes de cadrage... Les professionnels du photovoltaïque sont décidés à ne rien lâcher. Pour eux, le "moratoire" (décret du 9 décembre suspendant l'obligation de rachat de l'électricité photovoltaïque) menace toute la filière et s'il répond à une bonne question (comment juguler l'effet d'aubaine ?) il y répond mal. "Ce décret va bien au-delà de la suspension. Il comprend des dispositions rétroactives - dont une particulière qui impacte des projets en cours de construction - qui auront pour conséquence, non pas la régulation du secteur photovoltaïque, mais un coup d'arrêt violent plongeant la filière photovoltaïque française dans un véritable coma artificiel", affirment dans une motion commune présentée le 20 décembre les professionels du solaire.

"On a plusieurs cas de figure selon le domaine", explique Richard Loyen, délégué général d'Enerplan. "Le marché des particuliers qui ne va déjà pas fort est affecté : il y a un manque de confiance qui se développe. Les entreprises "pur solaire" vont se voir amputées d'une partie de leur clientèle. Pour les développeurs, c'est sans doute l'arrêt de l'activité. Les installateurs eux, qui sont souvent des entreprises diversifiées pourront peut-être se reporter sur leurs autres activités. Mais les industriels? Que vont-ils faire de leurs commandes? Tenesol par exemple vient de se voir annuler 200 millions d'euros de commande. Ils tiendront le choc parce qu'ils ne travaillent pas qu'en France. Mais il faut avoir le dos solide. En tout cas, tout arrêter comme ça, ce n'est pas le meilleur moyen de développer une filière industrielle française compétitive. On a besoin de visibilité"

Revoir la PPI

Devant un tel constat, la réaction se devait d'être forte, elle l'a donc été. Mais elle pourrait bien n'avoir que des conséquences symboliques. En effet, le recours en annulation peut prendre plusieurs mois voire plus d'une année "et pour les référés en suspension, ça peut être une victoire à la Pyrrhus car rien n'empêche le gouvernement d'adopter un nouveau décret dans la foulée", explique Arnaud Gossement, l'avocat qui a déposé le recours d'Enerplan.

Tout se jouera donc dans les négociations pour la mise en place d'un nouveau cadre de régulation de la filière. Les acteurs industriels, syndicats professionnels, organismes publics, financiers, élus, collectivités locales, associations ont déjà participé lundi 20 décembre à une première réunion organisée par Jean-Michel Charpin, inspecteur général des Finances, et Claude Trink, ingénieur général des Mines, (auteurs du rapport qui a mis le feu aux poudres) et chargés par le gouvernement de mener ces travaux de concertation.

Une concertation qui doit "déboucher mi-février sur des conclusions permettant au gouvernement de présenter les textes définissant le nouveau cadre de régulation et les mesures de développement de la filière".

Richard Loyen se fait peu d'illusions : "Le coeur du problème, c'est la PPI (programmation pluriannuelle des investissements). Il faut revoir la PPI 2020 et ce seuil de 5,4 MW qui est dépassé ! Or le gouvernement qui ne regarde que les coûts et pas les gains, refuse d'avance de bouger sur cette question. Et préfère freiner pour rester dans l'allure fixée en 2007. Mais ralentir comme ça, ça fait perdre des usines et des emplois. Et la concurrence ne nous attendra pas... Alors on va faire des propositions (voir document ci-dessous), mais j'ai peu d'espoirs pour l'issue de cette concertation."

Prochains rendez-vous  en tout cas : le 12 janvier sur les centrales au sol et les particuliers, le 17 sur les grandes toitures, le 24 sur le développement de la filière française et les objectifs environnementaux, puis, avant le 11 février, une discussion du projet de rapport aux ministres. Un rapport dont Richard Loyen anticipe la teneur : "j'ai bien peur qu'on revienne à l'état "pré-Grenelle", et que ces trois dernières années de développement n'aient été q'une parenthèse, une oasis dans le désert. C'est dommage."

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