Dans le XIIIe arrondissement, la résidence HBM Henry-Becque compte 92 petits logements construits entre 1913 et 1922 par Georges Albenque et Eugène Gonnot pour les habitants des bidonvilles alentour. L'immeuble est composé de volumes fragmentés mais affiche un socle continu et une écriture homogène et rationnelle (linteaux métalliques, arcs de décharge, balcons sur voûtains). Les façades et les parties communes sont traitées avec soin : décors en briques, grands porches fédérateurs, cages d'escalier revêtues de céramique, serrureries de qualité. A l'origine, les appartements n'avaient pas d'eau courante, installée seulement dans les toilettes sur les paliers extérieurs.
Dotés de nombreuses fenêtres, ils possèdent pour la plupart une triple orientation mais souffrent du froid avec des façades uniquement formées d'une épaisseur de briques et d'un centimètre de plâtre. Avec un budget de 115 000 euros TDC par logement, Paris Habitat a chargé Eric Lapierre (agence
Experience) de les isoler et de les reconfigurer pour que les typologies soient en adéquation avec les surfaces. Actuellement en fin de diagnostic, les architectes associés à l'équipe de sociologues-urbanistes de Récipro-Cité ont rencontré tous les habitants. Les travaux commenceront à la rentrée 2026 pour une livraison fin 2028. Pendant cette opération-tiroir, un local du rez-de-chaussée sera mis à la disposition des architectes en guise de maison du projet.
Perspirance et ventilation passive. L'architecte a trouvé des solutions aux questions techniques grâce à son regard d'historien. « Ces immeubles aux murs perspirants constituent une base plus performante que des bâtiments en béton pour atteindre une sensation de confort, en hiver comme en été », explique-t-il. Sa proposition consiste donc à isoler les murs par l'intérieur, après dépose du plâtre, en projetant un mélange de chaux et de liège couvert par un enduit de finition. Un système de ventilation passive sera installé dans les anciens conduits de cheminées et toutes les VMC supprimées. Pour un maximum de souplesse et d'économie, seules les gaines existantes seront réutilisées pour les nouveaux passages de fluides. Des fenêtres en bois remplaceront celles en PVC et des occultations seront posées partout car, actuellement, seuls le rez-de-chaussée et le premier étage sont pourvus de persiennes.
Afin de créer un îlot de fraîcheur, la valorisation des cours en pleine terre consistera à les débarrasser de l'asphalte, à répandre au sol une composition pour retenir l'eau et à les végétaliser abondamment. L'air frais des caves sera également utilisé pour ventiler ces enclos. « Sur des petites opérations telles que celle-ci, nous pouvons nous permettre de mettre en œuvre des innovations. Il faut que l'ensemble de nos collaborateurs comprenne la valeur patrimoniale de ces bâtiments », insiste Hélène Schwoerer, directrice générale adjointe de la maîtrise d'ouvrage et du développement de Paris Habitat. Cette manière de procéder pourrait devenir un modèle de référence pour le bailleur social, même à plus grande échelle.