Marchés publics : la suppression du seuil de 90.000 euros n’est plus à l’ordre du jour

A l'occasion d'un petit-déjeuner de presse organisé par la Direction des Journaux officiels pour la sortie de l'ouvrage "Code des marchés publics" (Editions JO et DAJ), Catherine Bergeal, directrice des affaires juridiques de Bercy, a évoqué les réformes intervenues et attendues dans l'univers de la commande publique.

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Catherine Bergeal, directrice des affaires juridiques de Bercy © DR

Revenant rapidement sur les décrets de décembre 2008 venus modifier le Code des marchés publics, la patronne de la DAJ a souligné que ces mesures n'étaient qu'un élément du plan d'ensemble de relance de l'économie, destinées à fluidifier les procédures et à accélérer l'injection de fonds publics dans l'économie via les marchés. "Ces mesures ont été prises rapidement, mais sans précipitation a-t-elle affirmé. Nous y réfléchissions depuis longtemps et certaines idées avaient déjà été proposées en 2003 lors d'une précédente réforme du Code."

Textes d'application à venir

Le travail est loin d'être fini pour la DAJ, car il reste encore un certain nombre de textes à prendre. Les textes d'application prévus par les décrets de décembre 2008, tout d'abord. "Nous n'avons pas commencé à les rédiger, précise Catherine Bergeal, car nous attendons le vote prochain de la loi pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés (LAPCIPP) : laquelle devrait entraîner l'élaboration de nouveaux textes d'application relatifs aux marchés publics." A la fin du mois, la DAJ s'attèlera donc à l'écriture du décret sur la Commission des marchés publics de l'Etat, pour définir les conditions de sa saisine par des collectivités et "afin d'éviter qu'elle ne soit submergée par les demandes des 36 000 communes de France". Au programme également, la rédaction d'un guide de bonnes pratiques et le texte sur les profils d'acheteurs.

Un guide de bonnes pratiques... indicatif

Ce guide devrait sortir dans le courant du premier semestre. Il sera élaboré sur la base du manuel d'application du Code 2006, mis à jour et enrichi de développements notamment concernant les mesures de publicité. "Notre objectif est d'aider les acheteurs publics, sans recréer une sous-réglementation, a insisté Madame Bergeal. Nous veillerons à ce que le guide reste purement indicatif, quitte à frustrer un certain nombre de praticiens." Interrogée sur ce point, la directrice des affaires juridiques s'est montrée assez favorable à l'idée de mettre au point un formulaire standard de publicité pour les MAPA (marchés passés selon la procédure adaptée). Mais il ne pourrait s'agir selon elle que d'un modèle facultatif, indiquant très précisément quelles mentions sont imposées par la réglementation.

Le seuil de 90 000 euros préservé

Sur le thème de la publicité toujours, Catherine Bergeal s'est montrée claire : "nous n'avons pas l'intention de toucher au seuil de 90 000 euros, ni aujourd'hui ni à moyen terme." La suppression de ce seuil de publicité avait en effet été envisagée par le Président de la République en décembre dernier, puis abandonnée. Cette mesure avait suscité l'inquiétude des acheteurs publics eux-mêmes, qui souhaitent conserver certaines obligations jugées sécurisantes ; et celle de la presse régionale, pour laquelle l'enjeu financier est important. Par ailleurs, souligne Catherine Bergeal, "le coût de la publicité prescrite à partir de 90 000 euros est négligeable par rapport au montant des marchés, ce n'est donc pas un problème financier du point de vue de l'acheteur."

Les contrats publics à nouveau en chantier

D'autres pans de la commande publique devraient en revanche évoluer rapidement, à la faveur de la loi pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés (voir notre article sur la LAPCIPP). Adoptée par l'Assemblée nationale, elle sera soumise au vote des sénateurs à partir du mercredi 21 janvier. Difficile de prévoir aujourd'hui quel sera le contenu exact du texte final. Dans sa rédaction actuelle, il donne habilitation au gouvernement pour adopter un Code de la commande publique. "Nous n'avions pas utilisé l'habilitation précédente qui nous avait été donnée, car elle se limitait à une codification à droit constant, ce qui était sans intérêt, indique Catherine Bergeal. La présente autorisation devrait nous permettre de modifier le droit pour harmoniser les multiples formes de contrats publics qui se sont empilées ces dernières années. Le délai prévu de 18 mois est un peu court mais nous tâcherons de le tenir."

La DAJ salue par ailleurs l'amendement adopté pour réformer le délit de favoritisme, qui rejoint ses propres conclusions : "il faut recentrer ce délit sur ce qui est commis intentionnellement ; et cesser de sanctionner les acheteurs qui s'égarent dans les procédures ou les concepts complexes de la commande publique." Il n'y a certes eu qu'une cinquantaine de condamnations pour favoritisme en quinze ans, mais force est de constater que l'existence de ce délit tétanise les acheteurs, qui alourdissent en conséquence leurs procédures selon Madame Bergeal. Par ailleurs, la création du référé précontractuel a permis d'assurer un contrôle beaucoup plus efficace des marchés, et ce dispositif sera parachevé avec la transposition prochaine de la directive recours. "Le texte est prêt et va partir à Matignon, indique la directrice. Il instaurera un référé contractuel, et donnera au juge une palette d'outils pour sanctionner les manquements : il pourra annuler le contrat, en abréger la durée, ou encore infliger des sanctions financières."

Sans oublier les CCAG

Quid de la sortie des fameux CCAG (cahiers des clauses administratives applicables aux marchés publics qui s'y réfèrent) ? "Celui consacré aux fournitures et services (CCAG FCS) est enfin prêt, il est en cours de publication se réjouit la directrice des affaires juridiques. Quant aux autres, je vise désormais le premier semestre de cette année pour leur publication. L'ampleur prise par la concertation, notamment sur le CCAG prestations intellectuelles, n'a pas permis de tenir les délais initiaux. De plus des fédérations professionnelles ont demandé à me rencontrer à nouveau sur le sujet, j'ai une dizaine de rendez-vous ce mois-ci."

Retrouvez notre dossier sur la réforme des marchés publics : cliquez ici

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