Les villes et territoires cyclables et marchables s’impatientent

L’impatience monte au sein du club des villes et territoires cyclables et marchables. Les 230 collectivités adhérentes attendent le déblocage des 250 millions d’euros annoncés en septembre dernier pour 2023 par la Première ministre Elisabeth Borne.

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Françoise Rossignol et Jacques Fernique
Françoise Rossignol, présidente des villes et territoires cyclables et marchables, a présenté son agenda 2023 le 18 janvier au Sénat en compagnie du sénateur Jacques Fernique, co-président des élus nationaux pour le vélo.

La crainte des annulations ou reports d’investissements locaux dans les infrastructures cyclables jette une ombre sur le début de l’année 2023, au sein du club des villes et territoires cyclable et marchables.

Les investissements, c’est maintenant

« Après la pandémie puis la hausse du coût des matières premières et de l’énergie, les projets prêts doivent se lancer maintenant, car la seconde moitié des mandats municipaux commence. Face aux énormes contraintes financières, les collectivités du bloc communal ont besoin d’un accompagnement de l’Etat, si ce dernier considère toujours le vélo comme prioritaire », plaide Françoise Rossignol, présidente du club des villes et territoires cyclables et marchables.

Dans la foulée de l’annonce d’un plan national de 250 millions d’euros sur ce sujet en septembre dernier pour 2023, la Première ministre Elisabeth Borne avait annoncé la réunion d’un comité interministériel, sous sa présidence. Depuis les collectivités cherchent en vain à en connaître la date.

Retard à l’allumage

Leur impatience monte d’autant plus que l’effort qu’elles demandent paraît modeste, au regard des crédits promis au rail et à la route. Pour doubler les infrastructures cyclables durant l’actuel mandat présidentiel, le club chiffre l’effort de l’Etat à 500 millions d’euros par an.

Les premiers échos du rapport du comité d’orientation des infrastructures alimentent l’inquiétude : « L’Etat semble vouloir se concentrer sur des appels à projets qui cibleraient les villes moyennes et les territoires en difficulté », craint le sénateur écologiste alsacien Jacques Fernique, co-président, aux côtés du député Renaissance Guillaume Gouffier-Valente (Val-de-Marne), du club des élus nationaux pour le vélo.

Queue de peloton européen

Le retard à l’allumage des aides promises par l’Etat préoccupe d’autant plus les défenseurs des mobilités actives que la France figure parmi les lanternes rouges de l’Europe : elle occupe le 21ème rang, parmi les 27, au regard des dépenses par habitant pour le vélo. « Encore ce chiffre est-il probablement sous-évalué, compte tenu de la propension des co-financeurs à additionner subventions et investissements, ce qui peut conduire à comptabiliser plusieurs fois les mêmes projets », avertit Françoise Rossignol.

« La part modale du vélo n’atteindra pas les 9 % en 2024, annoncés par la France dans son plan de 2018, mais il est encore temps de viser les 12 % espérés pour 2030 », embraye Jacques Fernique.

Engouement intact

Le Zéro artificialisation nette apporte un nouveau frein inattendu auquel le club propose des parades : soit intégrer les pistes cyclables dans un compte régional de l’artificialisation, pour ne pas pénaliser les territoires qui investissent, soit sortir complètement les projets du dispositif issu de la loi Climat & Résilience. Ce sujet concerne surtout les secteurs ruraux, indispensables à la continuité des itinéraires et le plus souvent incompatibles avec des aménagements sur les voiries existantes.

Face au silence de l’Etat, l’engouement des collectivités reste intact, selon le club. Pour preuve, Françoise Rossignol évoque le succès inédit de l’enquête en cours de dépouillement, mené par l’ensemble de la filière réunie depuis la dernière campagne présidentielle au sein de l’Alliance pour le vélo : 1296 collectivités ont répondu aux 150 questions qui visent à dresser un état des lieux et des projets locaux. L'échantillon comprend 12 régions et 80 % des départements. « Dépassés par notre succès, nous avons reporté à mars prochain la publication de la synthèse », annonce la présidente.

Une enquête très attendue

Autre indicateur : le boom des adhésions au club, dont les troupes ont progressé de 30 % depuis 2019, pour atteindre 230 collectivités. De même, les 100 parlementaires des « élus nationaux pour le vélo » constituent un record.

L’enquête promise pour mars permettra d’y voir plus clair sur l’impact territorial de la loi d’orientation des mobilités de décembre 2019, qui a donné naissance à une France coupée en deux : les régions de la moitié nord sont restées autorités organisatrices, tandis que les intercommunalités de la moitié sud se sont saisies de la nouvelle compétence. Elue du Pas-de-Calais, Françoise Rossignol en mesure les effets dans son territoire : les intercommunalités de l’Artois et le département étudient l’affectation de routes secondaires à la circulation agricole et cyclable.

Mutation culturelle

Au-delà des infrastructures, le club milite pour une mutation culturelle, notamment à travers le programme Savoir rouler à vélo, dédié aux écoliers de 6 à 11 ans, encore embryonnaire : « Seuls 1 % des enfants ont suivi les trois blocs de cette formation », regrette Jacques Fernique. Françoise Rossignol situe la place des jeunes, des personnes âgées et des femmes, dans ses nouvelles cibles : « Il faut casser le modèle d’un mode réservé aux mâles de 30 à 50 ans ». L’assistance électrique contribue à l’élargissement en cours.

L’officialisation de l’adjectif « marchable », dans le nom du club, participe au même mouvement : « Les mobilités actives doivent progresser de manière parallèle et en complémentarité avec les transports en commun », proclame la présidente. La formalisation d’un plan Marche figure parmi ses priorités des mois à venir.

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