La France est championne du Solar Decathlon Europe 2019. Le 28 juillet 2019, en Hongrie, le projet Habiter2030 s’est vu récompenser pour laréhabilitation énergétique d’une maison 1930 en brique, typique de la région des Hauts-de-France.
Habiter2030 est une association qui regroupe 14 écoles des Hauts-de-France, des acteurs de l’enseignement supérieur et des acteurs industriels. Le projet éponyme a été piloté par l’école nationale supérieure d’architecture et de paysage de Lille. Tous les corps de métier ont mutualisé leurs efforts et leurs savoir-faire pour réaliser cette prouesse.
Si certains déplacent des montagnes, d’autres déplacent des maisons ! Il aura fallu pas moins de neuf camions pour transporter le prototype de plus de 60 tonnes jusqu’à Szentendre, près de Budapest. « Les modules rentraient tout juste dans les plateaux, à peine trois centimètres de chaque côté. Nous avions moins de trois semaines pour monter le bâtiment. Nous travaillions de 7h à 23h, chaque jour, parfois sous des températures de 38°C », se rappelle Vincent Ducatez, Faculty advisor, en charge de chapeauter l’équipe.
Enjeu énergétique des Hauts-de-France
« Avec près de 700 000 maisons de ville », précise François Andrieux, généralement en brique et de vraies passoires énergétiques, qui datent de la période industrielle (1850 – 1950), la réhabilitation massive et l’amélioration thermique de l’habitatsont un enjeu majeur dans la région des Hauts-de-France. « L’idée était de proposer un démonstrateur pour notre région », explique François Andrieux, directeur de l’école d’architecture et de paysage de Lille. Il précise que ce prototype « est bardé de capteurs ». En effet, équipé de panneaux solaires, d’isolants écologiques pour les sols et le toit, de rideaux pour moduler les espaces intérieurs, cet habitat, d’environ 100 m² sur deux étages, produit plus d’énergie qu’il n’en consomme. Ce qui lui a valu la première place à l’épreuve « bilan énergétique ».
Au-delà de la mise en œuvre de ce projet d’envergure, les principales difficultés ont été de réunir les fonds nécessaires et de faire collaborer un grand nombre de personnes d’horizons divers. « C’est l’enfer ! » s’amuse François Andrieux qui explique que les rythmes de formation entre les ingénieurs et les architectes sont très différents et complexifient la coordination. En revanche, il se réjouit que cette aventure leur ait permis « d’apprendre à travailler ensemble ». Les concurrents avaient des équipes formées de « deux ou trois écoles, là c’était 14 écoles en interdisciplinarité », insiste Béatrice Auxent, architecte et présidente de l’association Habiter2030, fondée afin de venir en appui « pour la compétition et la mise en œuvre ».
Pour Vincent Ducatez, le plus difficile était « le manque de moyen ». Béatrice Auxent confirme les difficultés à « rassembler les partenaires financiers ». Le montant de l’opération s’est élevé à plus de 600 000 euros, participations financières et de dons de matériaux compris. Il manque encore un peu d’argent pour boucler le budget selon la présidente de l’association qui poursuit les recherches de fonds pour la finalisation du projet dans les prochains mois.
Déploiement en situation réelle
Désormais, Habiter2030 devra réfléchir aux possibilités de déploiement en situation réelle. Le prototype va rester en Hongrie, durant un an. Des relevés seront effectués depuis la France afin de déterminer comment cet habitat évolue au fil des saisons et poursuivre ainsi l’expérimentation. « Ce qui est important c’est de savoir ce qu’on va en faire dans la vie réelle » selon François Andrieux qui précise que « c’est un projet de solutions qu’il faudra adapter à chaque cas ».
« Le système doit être optimisé » pour que les travaux de réhabilitation se développent « dans les cinq ans », objective Vincent Ducatez. Par ailleurs, François Andrieux souligne l’importance de mettre en place la communication et la formation nécessaires, auprès des habitants, pour que le projet se concrétise à grande échelle et qu'ils s'accaparent les technologies.
Béatrice Auxent, prévoit le lancement, à l’automne, d’un appel à manifestation d’intérêt dans le territoire, dans le cadre de la Rev3 (Troisième révolution industrielle des Hauts-de-France) afin de de mettre en place des partenariats financiers avec la puissance publique. Par ailleurs, le projet sera présenté à la Capitale Mondiale du design en 2020.
Lors du concours, les Français ne sont pas passés inaperçus et ont suscité l'intérêt de leurs homologues étrangers. Ils ont notamment été sollicités par les Allemands pour participer au prochain Solar Décathlon Europe 2021 qu’ils organisent à Wuppertal, près de Düsseldorf, avec « un volet urbain fort », souligne Béatrice Auxent. Les membres de l’association n’ont pas encore décidé s’ils candidateront. Elle précise que cela fera l’objet du prochain conseil d’administration de l'association Habiter2030, courant septembre, où il sera notamment question « de trouver un moyen d’être présents ».