« Le dégrèvement de la taxe foncière ne doit pas être remis en cause par Bercy ». Le 27 juin en ouverture de la journée annuelle de la Fédération des élus des entreprises publiques locales (FedEPL) qu’il préside, Philippe Laurent a lancé cet appel solennel.
Touche pas à mon dégrèvement !
Si l’Etat cédait à la tentation de mettre fin au dispositif fiscal qu’il a consenti aux bailleurs sociaux, en particulier aux EPL, il mettrait en péril la transition énergétique, à en croire le maire de Sceaux (Hauts-de-Seine). « La massification des rénovations avance, notamment grâce aux efforts considérables de notre mouvement. Le dégrèvement apporte 500 M€ par an, qui financent de 20 à 25 % du coût des opérations. Plus que les constructions neuves compensées par les loyers, ces chantiers exigent des fonds propres », calcule Philippe Laurent.
Ultime argument : « La transition énergétique passe par la massification, plus facile à mettre en œuvre chez les bailleurs sociaux que dans le privé individuel ou collectif ». Pourquoi, dès lors, l’Etat se priverait-il d’un pilier majeur de sa politique ? Le président de la FedEPL risque cette réponse : « La méfiance vis-à-vis des élus locaux et de leurs initiatives, une des maladies dont souffre la société française ».
Un modèle mal connu
Ce symptôme résulterait lui-même d'une incompréhension. Philippe Laurent cite cet exemple issu de ses relations avec les services du Premier ministre : « Je me suis récemment rendu compte que des conseillers de Matignon pensaient que les emprunts des EPL alimentent la dette publique ».
Très intéressé par l’économie mixte à l’allemande, le président de la FedEPL émet cette hypothèse : « Si les budgets des Stadtwerke, autrement dit les EPL de l’Allemagne, rentraient dans les comptes publics, ce pays accuserait une dette beaucoup plus forte ». Au passage, le maire de Sceaux propose un tuyau à Bercy : donner à la Société des Grands Projets le statut d’une société anonyme, pour soulager les comptes de la nation.
« Arrêtez d’emmerder les élus locaux! »
Hôte du prochain congrès de la fédération, les 9 et 10 octobre, l’adjoint au maire de Nantes Pascal Bolo paraphrase l’ancien président Georges Pompidou, qui enjoignait son administration « d’arrêter d’emmerder les Français ». En remplaçant ces derniers par "élus locaux", le président de la société d'économie mixte des transports en commun de l'agglomération nantaise (Semitan) dénonce lui aussi la défiance étatique qui se traduit par l’impossibilité opposée aux dirigeants d’EPL de participer aux délibérations démocratiques, sur des sujets relevant de leurs compétences.
Ces contrariétés heurtent l’ambition d’un mouvement qui repose aujourd’hui sur trois piliers : le logement, l’aménagement et la construction. La FedEPL ne cache pas ses ambitions de mieux couvrir d’autres champs de l’entreprenariat, en particulier l’énergie et l’économie numérique.
Vive la concurrence
L’attachement au monde concurrentiel conduit Pascal Bolo à remettre en cause le choix de la facilité qui consiste souvent à privilégier la formule des Société publiques locales, détenues à 100 % par des actionnaires publics, au détriment des sociétés d’économie mixte. Cet état d’esprit trouve sa traduction protocolaire : la FedEPL invitera le Mouvement des entreprises de France à son congrès de Nantes.