Selon Yves Carl, directeur marketing de Viessmann France, « les énergies renouvelables ne se suffisent pas à elles-mêmes. » Il est fort à parier que l’ensemble des chaudiéristes souscrivent à ce verdict ! Non sans raison, car pour l’heure, faire le pari des EnR implique de faire celui de la mixité énergétique (même si des solutions mono-énergie 100 % EnR sont en développement). Les fabricants de chaudières se sont ainsi diversifiés dans le chauffage au bois, le solaire thermique et la pompe à chaleur, en assignant aux énergies fossiles le rôle, tantôt de base, tantôt de complément, dans chacune de ces catégories. En élargissant ainsi leur palette, ces derniers ont pu fidéliser la clientèle du parc de chaudières existantes.
Polyvalence « historique » des chaudières
La faible solvabilité des ménages ainsi que la volatilité des prix de l’énergie plaident aussi pour des solutions polyvalentes faisant une petite place aux énergies traditionnelles. En cela, ils ont peut-être une légère longueur d’avance dans le champ de la « multi-énergie » par rapport à leurs concurrents de la filière PAC. En effet, ces mêmes chaudiéristes ont été les premiers à proposer les fameux générateurs « hybrides » associant, dans un seul et même appareil, une PAC à une chaudière gaz. En partant du principe que les PAC aérothermiques, en récupérant la chaleur de l’air extérieur, mobilisent effectivement une énergie « renouvelable » (voir ci-contre). Cet alliage propose une coordination plus fine que dans le cas d’une simple relève de chaudière, puisque, dans tous les modèles récemment mis sur le marché par Elm, Saunier-Duval et Chaffoteaux, la régulation de l’appareil choisit de solliciter l’énergie la moins chère en comparant en temps réel le prix de chacune d’elles (électricité et gaz) et affranchit la PAC des modes « dégivrage ».
De même, tous les chaudiéristes ont des systèmes solaires combinés (SSC) à leur catalogue. Moyennant un appoint de chaleur prodigué, là encore, par une chaudière à énergie fossile (gaz ou fioul), qui peut être la chaudière existante dans le cas d’une rénovation, les besoins de chauffage et d’ECS sont en partie fournis par l’énergie solaire. Toutefois, le ratio de couverture des besoins par le solaire atteint péniblement la barre des 40 % sur l’année dans la plupart des cas. Le taux d’ensoleillement est ici l’une des explications. Mais d’aucuns mettent également en cause la qualité des régulations proposées par les fabricants : « C’est catastrophique, ose même un installateur, dans le sens où, pour tous les SSC proposés par les fabricants de chaudières, c’est le solaire qui vient en appoint de l’énergie fossile, alors que ce devrait être l’inverse ! » Un jugement sévère qui a le mérite de soulever le point critique inhérent à tout système bi-énergie : la régulation. S’ajoute le problème chronique des systèmes solaires : leur coût élevé à l’installation. Christian Cardonnel, président d’Enerplan, reconnaît que les prix au m de capteur pourraient être moins élevés si les installateurs consentaient une réduction de leurs marges… « Nous y travaillons au sein d’Enerplan », prend-il soin d’ajouter. À la décharge des installateurs, ce surcoût pourrait également s’expliquer par un manque d’offre standardisée à échelle industrielle.
À l’instar des chaudières à combustibles fossiles, leurs homologues alimentées en biomasse, à condition d’être automatiques, peuvent aussi être associées à l’énergie solaire. Notamment ÖkoFEN qui propose une offre Packagée associant les capteurs solaires Pellesol à un ballon de stockage bi-énergie Pellaqua, intégrant kit hydraulique et organe de régulation précâblé.
Premières PAC « solaires »
Du côté des fabricants de PAC, on recense quelques tentatives éparses d’association à l’énergie solaire. En 2007 déjà, Ciat et Clipsol joignaient leurs efforts pour donner naissance au Cesi hybride Pacsol, qui consiste en l’association du Blocsol Cesi à l’une des PAC air/eau de Ciat, la régulation du Blocsol se chargeant de l’interface. Lorsqu’elle est sollicitée, généralement en heures creuses, la PAC transfère les calories qu’elle a prélevées au réservoir à accumulation via un échangeur à plaque haute efficacité. Le fabricant allemand Alpha Innotec a également présenté l’an dernier une gamme de PAC air/eau associée à un système solaire : la LW 90 A Solar. L’énergie solaire est mise à contribution en priorité pour la production d’ECS et l’alimentation des émetteurs de chaleur. La PAC prend le relais en cas d’ensoleillement insuffisant, mais l’énergie solaire résiduelle est utilisée pour optimiser le COP de la PAC en aiguillant le circuit primaire vers l’unité extérieure à l’aide d’une vanne de dérivation. Un concept que Nicolas Jaubert, responsable produits, qualifie de « vitrine technologie » car cette solution s’avère très onéreuse. Et en ces temps de disette, l’arbitrage économique constitue plus que jamais le premier critère de choix.
