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Comment introduire d'autres critères de choix dans un appel d'offres ?

L'article 299 bis alinéa 2 du Code des marchés publics (CMP) prévoit la possibilité pour le maître d'ouvrage d'introduire d'autres critères de choix dans le dossier de consultation des entreprises. Ces critères spécifiques doivent impérativement être énumérés dans le règlement de consultation (article 38 bis-10 du CMP). Ils peuvent également l'être dans les appels à candidature. Sont prohibés les critères qui ne sont pas justifiés par l'objet du marché ou son exécution. Les critères habituels de choix pour les candidatures, sont la qualité et la capacité à répondre au mieux à la demande (article 297-I alinéa 2 du CMP) et pour les offres, évidemment le prix, mais aussi le coût d'utilisation, la valeur technique de la proposition et les délais d'exécution (article 297-II alinéa 2 du CMP).

Pourquoi introduire des critères additionnels ?

L'introduction de critères additionnels permet de pondérer les critères légaux précisés par le Code des marchés publics pour répondre au mieux à l'objectif d'une commande publique. Ces critères nouveaux relèvent du choix du maître d'ouvrage et doivent être intrinsèques à l'objet du marché et/ou à ses conditions d'exécution. Le maître d'ouvrage doit veiller toutefois à ce que ces clauses additives n'outrepassent pas le besoin du marché concerné pour se transformer en clauses d'exclusivité favorisant un fournisseur déterminé.

Qu'entend-on par « mieux disant social » ?

La circulaire interministérielle du 29/12/93 proposait d'introduire dans le cadre d'une procédure d'appel d'offres des clauses relatives à l'emploi (action locale de lutte contre le chômage et pour l'insertion professionnelle). Le critère du mieux disant social était né. Déjà en 1994, la question de sa conformité au droit des marchés publics était posée (Voir «Pour en savoir plus...»). Non seulement il n'entre pas parmi les critères expressément énoncés par le CMP, mais il ne semble pas d'avantage constituer un critère additionnel justifié par l'objet précis du marché ou ses conditions d'exécution. Dans la plupart des cas, l'objet du marché concerne la réalisation d'un ouvrage ou la remise de prestations, et le critère de lutte contre le chômage ou d'insertion professionnelle n'est pas directement lié à cet objectif. La circulaire interministérielle du 14/12/95 a confirmé cette tendance et est conforme à l'interprétation légale du Code des marchés publics.

Les limites du critère du mieux disant social

La portée de la circulaire interministérielle du 29/12/93 reste très limitée : en effet, ce document n'était qu'un acte préparatoire dénué de toute valeur réglementaire. Cette circulaire est ainsi considérée par le Conseil d'Etat comme étant une simple déclaration d'intention (C.E. du 10/05/96, Fédération nationale des travaux publics et Fédération nationale du bâtiment). Un maître d'ouvrage ne doit donc pas utiliser le critère du mieux disant social comme un critère additionnel stricto sensu, mais comme une intention spécifique qui ne doit pas créer d'effets discriminatoires entre les candidats.

Enfin, le Conseil Constitutionnel en censurant l'article 17 de la loi du 29/07/98 relative à la lutte contre les exclusions, dont l'objectif était de permettre aux maîtres d'ouvrage de demander à des entreprises, à l'occasion d'un marché public de travaux, d'employer des personnes en insertion, confirme cette interprétation (Cahier « Textes officiels » du Moniteur du 16/10/98, no 4951, p. 363, Réponse ministérielle).

L'implantation locale : critère d'attribution d'un marché public ?

Dans un arrêt récent le Conseil d'Etat a pris position sur la délicate question du critère d'implantation locale (C.E. 14/01/98 « Sté Martin-Fourquin »). En effet, le Conseil d'Etat a rappelé qu'un maître d'ouvrage ne pouvait faire de l'implantation locale préalable des candidats dans le département une condition d'obtention d'un marché, autrement dit utiliser cet élément comme un critère de sélection des offres.

L'exigence d'une localisation géographique des candidats est donc illégale, sauf si cette implantation est, de toute évidence, une condition de bonne exécution du marché (Tribunal administratif de Bordeaux 03/07/86 « Saur »). Et à supposer qu'il soit envisagé d'inclure dans le Code des marchés publics la notion d'entreprise locale comme élément du mieux disant, elle serait en tout état de cause, considérée comme discriminatoire au regard des règles communautaires («JO» du 16/02/98, débats de l'Assemblée nationale).

A RETENIR

Quoi et pourquoi ?

Les critères additionnels sont des critères différents de ceux énoncés par l'article 297 du Code des marchés publics, et qui sont choisis par le maître d'ouvrage pour pondérer les critères légaux et mieux répondre aux besoins de la commande publique.

Comment ?

Les critères additionnels doivent être précisés dès l'avis public à la concurrence dans un appel d'offres ouvert et dans le règlement de consultation dans un appel d'offres restreint.

Quelles limites ?

L'utilisation de critères additionnels ne doit pas induire une situation discriminatoire ou anticoncurrentielle.

POUR EN SAVOIR PLUS...

Textes de référence

-« Droit des marchés publics » - sous la direction de C. Brèchon-Moulènes, éditions Le Moniteur, 2 classeurs avec 4 mises à jour par an, 1600 pages, 950 F.

-« Code des marchés publics » (annoté et commenté) - Michel Guibal et Nicolas Charrel, éditions Le Moniteur, 1 classeur avec 4 mises à jour par an, 900 pages, 640 F.

-NOUVEAU : « Pratique des marchés de travaux » (le CCAG par mots-clés), Pierre Boudrand et Bernard-Michel Bloch, 275 pages, 295 F.1995, p. 39.

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