Le Palais de la Femme à Paris

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Couvent, puis lieu d’accueil d’hommes célibataires, hôpital, foyer de femmes seules…, le Palais de la Femme qui occupe le coin des rues Faidherbe et Charonne, dans le 11e arrondissement à Paris, a eu dès l’origine une vocation sociale. Le sous-sol garde ses secrets, ceux du cimetière de l’ancien couvent des Filles-de-la-Croix, une communauté dominicaine établie en 1641 sur un vaste domaine de plus de quarante hectares. Cyrano de Bergerac y aurait été inhumé en 1655, grâce au privilège accordé par sa tante religieuse. Il reposerait « sous le meuble du fond de la bibliothèque du Palais de la Femme ». Expulsées en 1792, les religieuses ne réintégreront les lieux qu’en 1825, comme simples locataires. En 1888, le percement de la rue Faidherbe ampute la propriété. Le couvent est fermé en 1904 et démoli deux ans plus tard.

Une grande campagnede souscription. Le terrain reste en friche jusqu’à ce qu’en 1910 les architectes Labussière et Longerey édifient pour la Fondation « Groupe des Maisons Ouvrières », un « hôtel populaire pour hommes célibataires », le premier du genre en France. Le bâtiment comprend alors 743 chambres sur une surface de près de 12 000 m2 sur cinq niveaux. En 1914, la Première Guerre mondiale vide la population du foyer. Le bâtiment devient provisoirement un hôpital militaire, puis accueille les bureaux du ministère des Pensions jusqu’en 1924. L’Armée du Salut va prendre la suite, confirmant la destinée de ce lieu voué à accueillir les esseulés mis au ban de la société, les malades, les blessés de la guerre ou de la vie… Albin Peyron, chef de l’Armée du Salut en France, lance, en janvier 1926, une grande campagne de souscription pour réunir les trois millions cinq cent mille francs-or, nécessaires à l’achat du bâtiment. Il constitue un comité d’honneur auquel le Président de la République, Gaston Doumergue, accorde son haut patronage. L’institution veut y recueillir cette fois des femmes, seules ou accompagnées de leurs enfants. De Paris et de province, les dons affluent. Mille francs permettent l’aménagement d’une chambrette d’environ 9 m2. Inauguré en juin 1926, ce foyer deviendra le plus grand d’Europe. Son architecture massive et fermée sur elle-même protège ses pensionnaires de la vie extérieure. En même temps, l’aspect cossu des entrées et le soin apporté aux façades comme à l’ameublement intérieur offrent à ses occupantes la dignité que l’institution veut leur rendre.

L’Armée du Salut, qui ne reçoit pas de financement public, a toujours souhaité préserver une mixité sociale parmi les femmes résidentes. Aujourd’hui, certaines travaillent, d’autres sont étudiantes. Elles bénéficient d’un revenu moyen de 6 200 euros par an et paient des loyers mensuels compris entre 254 et 315 euros pour des chambres de moins de 15 m2.

Soixante ans après son inauguration, le bâtiment a entamé une cure de jouvence. Le chantier s’étalera sur trente-trois mois en trois phases. Les nouvelles chambres (350 au lieu de 630 actuellement) seront agrandies et modernisées, passant de moins de 9 m2 à 12 m2 (jusqu’à 18 m2 pour celles accessibles aux personnes handicapées), équipées d’une salle de bain.

La structure béton est conservée en l’état, percée par endroits pour faire passer des escaliers de secours. La composition du bâtiment autour de ses grandes cours est laissée intacte, mais les verrières seront toutes refaites. La façade en brique et meulière sera nettoyée, les huisseries de fenêtres en PVC remplacées par les mêmes en bois blanc. L’entrée sera redessinée selon les plans d’origine. Au rez-de-chaussée, les salles communes, restaurants, salons et bibliothèques, en partie inscrites à l’Inventaire supplémentaire des monuments historiques, seront également rénovées. On y retrouve le style des brasseries parisiennes, grandes salles carrelées et émaillées de citations de William Booth, le fondateur de l’Armée du Salut, fenêtres à mi-hauteur équipées de vitraux…

Bail emphytéotique. Ces espaces, désormais ouverts à la location privée, doivent répondre aux normes des établissements recevant du public. Depuis le 12 juillet dernier, l’Immobilière 3F est titulaire d’un bail emphytéotique de 55 ans. Maître d’ouvrage du chantier pour le compte de l’Armée du Salut propriétaire et gestionnaire du lieu, I3F apporte les financements ainsi que les subventions accordées au logement social par la ville, la région et l’Etat. L’Armée du Salut lui versera ensuite un loyer égal aux dépenses et aux frais financiers engagés pour cette opération. Le montage est bénéfique pour tout le monde, y compris pour la Ville de Paris qui peut comptabiliser 350 logements sociaux de plus. Pour les futures locataires aussi, bien mieux logées qu’auparavant, mais au prix d’une diminution de moitié de la capacité d’accueil du foyer.

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