Qu'est-ce que le logement intermédiaire ?
La notion de logement intermédiaire ne date pas de 2014. Dès les années 2000, de nombreux acteurs du marché immobilier et collectivités locales ont engagé des réflexions afin de développer une offre à prix maîtrisé, distincte mais complémentaire du parc social, grâce notamment à des clauses d'encadrement de loyer ou à des financements spécifiques comme le prêt locatif intermédiaire (PLI).
Ce n'est toutefois qu'avec l' que le logement intermédiaire s'est vu doté d'une définition et d'un régime juridiques. Codifiée à l' (CCH), la notion de logement intermédiaire repose, d'une part, sur l'existence d'une aide directe ou indirecte accordée par l'Etat, une collectivité locale ou l'un de ses groupements et, d'autre part, sur le respect d'un plafond de ressources des occupants et d'un plafond de prix à l'achat ou à la location.
Quelles aides incitent à sa production ?
Même si le PLI, ouvert à toute personne physique ou morale, est antérieur, ce n'est véritablement qu'à partir de 2014 que l'écosystème des aides directes ou indirectes se met solidement en place.
Et ce, principalement avec l'introduction d'un taux de TVA réduit à 10 % pour la production neuve en zone tendue, réservé aux investisseurs institutionnels, et auquel est attachée une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB). Plus récemment, une extension de ce taux réduit est également envisagée pour les opérations de rénovation. Du côté des particuliers, le dispositif d'investissement locatif intermé-diaire, dit Pinel, qui prévoit une réduction d'impôt sur le revenu, relève également de ces aides.
Qui peut en produire ?
En principe, toute personne physique ou morale peut participer à la production de logements intermédiaires, en ayant recours à l'une de ces aides directes ou indirectes.
Les pouvoirs publics, constatant notamment les limites du dispositif Pinel pour soutenir le marché du logement locatif intermédiaire en zone tendue, misent sur la réorientation des financements du logement intermédiaire vers les investisseurs institutionnels, supposés plus efficaces pour répondre aux enjeux de production. A cet égard, la loi de finances pour 2021 (art. 168) a défini une trajectoire de décroissance progressive du Pinel jusqu'en 2024 - à l'exception du Pinel + qui bénéficie aux logements répondant à des critères de qualité environnementale et d'usage.
Quel est le régime juridique applicable ?
Il n'existe que très peu de mesures portant sur la planification de l'offre et la plus grande partie des règles encadrant le logement intermédiaire sont en réalité issues du régime fiscal du dispositif. Aucune contrainte relative aux modalités de mise en location ou d'attribution des logements intermédiaires, similaires à celles du logement social, ne ressort du CCH.
Par ailleurs, le dispositif, relativement jeune, est aujourd'hui exclusivement tourné vers le logement locatif, alors même que la définition du logement intermédiaire vise également les logements en accession.
Quelle est sa place dans la politique du logement abordable ?
Selon la mission interministérielle sur le logement intermédiaire, le besoin de construction est important : entre 180 000 et 420 000 logements sur la prochaine décennie (1). Pour répondre à cet enjeu, les acteurs, notamment les grands institutionnels, se mobilisent et affichent un objectif de production de 55 000 unités sur la période 2021-2023 (2).
Au niveau de la politique locale, les documents d'urbanisme peuvent intégrer des règles en faveur du logement intermédiaire, au travers de servitudes imposant la réalisation d'un quota, d'emplacements réservés, de majorations de constructibilité, ou encore d'exonération de réalisation d'aires de stationnement.
Par ailleurs, certaines communes situées en zone tendue - et dont la liste est fixée par décret - sont tenues de programmer une offre de logements intermédiaires dans le programme local de l'habitat (PLH) les concernant. En revanche, il n'existe aucune obligation de production assimilable à celle, issue de la , qui touche les logements sociaux.
Des réformes sont-elles intervenues récemment ?
Il est vite apparu que la production de logements intermédiaires pouvait être freinée par son régime fiscal. En effet, le logement locatif intermédiaire neuf des institutionnels bénéficie d'une exonération de TFPB pendant vingt ans, laquelle constitue corrélativement une perte de ressources pour certaines collectivités. Contrairement aux logements sociaux, les logements intermédiaires ne sont pas comptabilisés dans les quotas SRU et ne présentent, à cet égard, aucun avantage pour les collectivités.
Dans la lignée du rapport Rebsamen (3), le gouvernement a clairement pris l'engagement de substituer à l'exonération de TFPB un crédit d'impôt sur les sociétés pour les opérateurs du logement intermédiaire. Cette mesure a été adoptée dans la loi de finances pour 2022 (art. 81). Parallèlement, les lois de finances pour 2021 et 2022 ont assoupli les conditions pour bénéficier de la TVA à 10 %.
Doit-on nécessairement réaliser du logement social pour proposer du logement intermédiaire ?
Le logement social et le logement intermédiaire sont clairement distingués par le CCH. Il n'est donc pas nécessaire de réaliser du logement social pour réaliser du logement intermédiaire. Toutefois, s'agissant de la production de logements locatifs intermédiaires neufs, pour pouvoir bénéficier de la TVA réduite à 10 %, il est nécessaire que ces logements soient intégrés au sein d'un ensemble immobilier comprenant au moins 25 % de logements locatifs sociaux. Depuis la loi de finances pour 2021, cette proportion est évaluée en nombre de logements, et non plus en surface.
Nul besoin de respecter cette condition de mixité sociale si le programme est situé sur le territoire d'une commune comptant déjà plus de 25 % de logements sociaux (loi de finances pour 2022, art. 32). Auparavant, ce taux était de 35 %.
L'activité logement intermédiaire des organismes HLM est-elle encadrée ?
Les organismes HLM peuvent exercer une activité relative au logement intermédiaire dès lors que celle-ci ne représente pas plus de 10 % des logements locatifs sociaux qu'ils détiennent. Jusqu'au 1er janvier 2020, cette activité faisait même partie de leur service d'intérêt général justifiant l'octroi, au regard du droit européen, d'exonérations fiscales et d'aides spécifiques de l'Etat.
Ils peuvent également créer des filiales dont le seul objet est de construire, d'acquérir et de gérer des logements locatifs intermédiaires définis au sens de l', sous réserve de non-opposition du ministre chargé du logement et du respect d'un certain nombre de conditions quant à la structuration de la société. Un allègement de ces contraintes est toutefois prôné par la mission interministérielle sur le logement intermédiaire, afin de faciliter les conditions d'intervention des bailleurs sociaux dans ce domaine.
A l'instar du logement social, des démembrements de propriété sont-ils possibles ?
La loi Elan du 23 novembre 2018 est venue conforter cette pratique en précisant que le régime de l'usufruit locatif () est d'ordre public pour les logements intermédiaires. Ce régime permet de développer temporairement, à un coût plus réduit en raison du démembrement, du logement intermédiaire tout en permettant aux particuliers et aux institutionnels d'investir.
D'un point de vue fiscal, il aura fallu attendre la loi de finances pour 2021 pour que les textes prévoient expressément le cas du démembrement de propriété et ouvre le bénéfice d'une TVA à 10 % tant pour l'usufruitier institutionnel que pour le nu-propriétaire, personne physique, dès lors que l'usufruitier répond aux conditions posées par les textes.
Comment faire de l'accession intermédiaire à la propriété ?
Rappelons que le bail réel immobilier (Brilo) a été spécialement conçu pour développer une offre en accession intermédiaire. Malheureusement, ce dispositif ne trouve pas son marché, notamment en raison des plafonds de prix ou de ressources qui l'encadrent. Ce constat est accentué depuis l'instauration du bail réel solidaire (BRS) qui bénéficie des avantages liés au logement social avec des plafonds de prix et de ressources proches du Brilo, ce qui englobe 95 % des ménages concernés par ce dispositif. Un rehaussement des plafonds serait donc nécessaire afin de donner une chance à ce dispositif.
Parallèlement, certains opérateurs réfléchissent à promouvoir l'accession intermédiaire au moyen d'outils juridiques de droit commun, à droit constant, et sans aucun dispositif d'aide. Ces initiatives louables ne peuvent toutefois émaner que d'opérateurs parapublics dont la mission est de promouvoir le logement intermédiaire, sous toutes ses formes, de sorte que cette initiative se trouve relativement isolée et insuffisante pour couvrir le besoin.
En revanche, depuis la loi Elan, l'accession à la propriété de logements intermédiaires appartenant à des organismes HLM est simplifiée et n'est plus soumise aux conditions de la vente des logements sociaux.