Le budget triennal de l’Etat pour la période 2009 – 2011 prévoyait de consacrer 4,3 milliards d'euros au Grenelle de l'Environnement. La dépense exécutée ne s’élève finalement qu’à 3,5 milliards (1). C'est le principal enseignement du bilan effectué par la Cour des comptes dans son référé adressé au Premier ministre en novembre 2011 et rendu public le 18 janvier.
La Cour explique que le gouvernement a su limiter l’impact du Grenelle sur le budget de l’Etat "en le finançant majoritairement par des redéploiements ou en exploitant les marges de manoeuvre offertes par la mise en oeuvre de la révision générale des politiques publiques en ce qui concerne les créations de postes".
Une fiscalité non maîtrisée
En revanche, la Cour note que le volet fiscal "a été nettement moins maîtrisé" : au total, le volet fiscal du Grenelle a représenté un coût de 2,5 milliards d'euros pour l’Etat, alors qu’il devait initialement être équilibré. Les dépenses fiscales, que la Cour juge efficaces mais très coûteuses, ont toutes été mises en oeuvre, "sans que le gouvernement estime pour autant opportun de diminuer, a fortiori de supprimer, celles dont l’impact environnemental apparaît négatif notamment par rapport aux objectifs définis par le Grenelle". Quant aux recettes prévues (contribution carbone et écotaxe poids-lourds), leur mise en oeuvre a été retardée. Ainsi, les recettes des taxes issues du Grenelle n’ont atteint que 1,37 milliard, alors que les dépenses fiscales ont eu un coût de 1,9 milliard et le bonus automobile de 1,95 milliard d'euros.
Résultats contrastés
Quatre ans après le début du Grenelle, les résultats apparaissent donc "contrastés" pour la Cour des comptes. Si de bons résultats ont été obtenus dans les secteurs du bâtiment, des énergies renouvelables et de la politique de l’eau - un tiers des bâtiments neufs construits en 2011 respectent les normes « basse consommation » ; les émissions de gaz à effet de serre du secteur résidentiel ont été réduites de 7,5 % en deux ans et les stations d’épuration les plus importantes ont été mises aux normes européennes - les transports ou l'agriculture sont en retard. La Cour des compte estime même que les objectifs fixés par le Grenelle pour 2012 ne pourront être atteints, "soit que les moyens consacrés à ces politiques n’aient pas été mis en adéquation avec les résultats attendus, soit en raison du maintien d’une politique fiscale ou de dispositions règlementaires qui entrent en contradiction avec les objectifs fixés". Pour appuyer son argument, la Cour évoque la part du fret non routier "en constante diminution depuis 2007" et l’objectif de 6 % de la surface agricole utile exploitée en agriculture biologique qui ne sera pas atteint en 2012. Enfin, l’objectif intermédiaire fixé pour 2012 pour la production d’énergie renouvelable (14% d’énergie renouvelable) devrait être atteint sans difficulté.
Le bonus-malus automobile a coûté 1,5 Md€ entre 2008 – 2011 et ses résultats sont également contrastés : s'il a permis une diminution des émissions moyennes de gaz carbonique des véhicules neufs, des études ont montré qu’il aurait entraîné une augmentation des émissions totales de CO2.
Recommandations
À l’issue de cet examen, la Cour a formulé plusieurs recommandations visant à :
- améliorer le suivi du Grenelle, afin que le Parlement puisse procéder aux arbitrages nécessaires ;
- adapter certains engagements initiaux (notamment dans le domaine des transports) à la nouvelle situation des finances publiques ;
- mettre en oeuvre rapidement les taxes prévues par le Grenelle ;
- procéder à la mise en cohérence de la fiscalité des carburants avec les objectifs du Grenelle pour modifier les comportements environnementaux.
Le référé est publié par la Cour avec la réponse que le Premier ministre a adressée à la Cour le 30 décembre 2011. Il est disponible sur le site Internet de la Cour des comptes.
