Pour financer leur projet d'acquisition en BRS, les candidats vont devoir solliciter des prêts bancaires, et ils pourront dans ce cadre solliciter un prêt aidé par l'Etat s'ils en remplissent les critères d'éligibilité, ce qui sera majoritairement - voire toujours - le cas. Il leur faudra également consentir des sûretés à la garantie du remboursement du prêt : plusieurs pistes sont alors exploitables.
La majorité des prêts aidés par l'État consentis dans le cadre du financement des BRS sont des prêts à taux zéro ou des prêts à l'accession sociale. Depuis un , modifiant l', un prêt à taux zéro (PTZ) peut être accordé aux primo-accédants qui concluent un BRS en vue d'accéder à la propriété d'un logement à titre de résidence principale pour la première fois 1.
Le prêt à taux zéro, un mode de financement avantageux
Ce prêt est très avantageux pour les emprunteurs car, comme son nom l'indique, ils ne sont tenus de rembourser que le capital de la somme prêtée, sans intérêts. Il présente également un autre avantage non négligeable pour les emprunteurs : les éventuelles garanties hypothécaires qui l'assortiraient bénéficient de l'exonération de la taxe de publicité foncière prévue à l'article 845 3° du Code général des impôts.
Pour pouvoir prétendre au PTZ, l'emprunteur doit répondre à certains critères qui tiennent à la situation du bien financé, aux revenus de l'emprunteur et à la volonté du législateur d'aider les primo-accédants.
Condition géographique - Le futur logement doit être situé en zone B2 ou en zone C. Ces zones sont définies par arrêté des ministres chargés du Budget et du Logement conformément aux dispositions de l' et peuvent être amenées à évoluer. Pour connaître le moment venu la situation du logement devant être financé, les intéressés peuvent se connecter sur le simulateur disponible sur service-public.fr 2.
Condition de ressources - Le PTZ est accordé exclusivement aux personnes physiques résidant fiscalement en France, quelle que soit leur situation familiale et sous condition de ressources : le montant total des ressources de l'emprunteur ne doit pas dépasser à la date de l'émission de l'offre de prêt un plafond fixé selon les zones géographiques d'implantation du logement et le nombre des personnes à loger 3. Ce plafond ne peut être supérieur à 37 000 euros ni inférieur à 16 500 euros en vertu de l'. Le montant des revenus à prendre en compte correspond au total des revenus fiscaux de référence à l'année N-2 de l'emprunteur et des autres personnes qui vont habiter le logement (lorsqu'elles ne sont pas rattachées fiscalement à l'emprunteur). Néanmoins lorsque le montant total e du coût total de l'opération, c'est ce dernier montant qui est retenu. Cependant, ces dispositions ont été abrogées par la de finances pour 2021 et ne seront plus applicables aux offres de prêts émises à compter du 1er janvier 2022.
À compter de cette date, le montant total des ressources sera, notamment, apprécié à la date d'émission de l'offre de prêt et non plus à N-2, comme le prévoit l'article 164 de la loi de finances pour 2021.
Condition de primo-accession - Le bénéficiaire du prêt ne doit, par ailleurs, pas avoir été propriétaire de sa résidence principale ou ne pas avoir acquis les droits réels de sa résidence principale dans le cadre d'un bail réel solidaire au cours des deux dernières années précédant l'émission de l'offre de prêt (). Cette règle connaît, toutefois, des exceptions, entre autres, lorsque l'un des occupants est en situation de handicap ou si la résidence principale a été rendue inhabitable par une catastrophe naturelle ou technologique. L'alinéa 2 de l'article L. 31-10-3 liste de façon exhaustive ces hypothèses.
Le logement doit devenir la résidence principale de l'emprunteur au plus tard 1 an après la fin des travaux ou l'achat 4 et doit le rester au cours des six années suivant la date du premier versement du prêt.
Il est ici précisé qu'il faut entendre par résidence principale le logement occupé au moins 8 mois par an par l'accédant. Ce dernier ne peut le proposer à la location sauf exceptions limitativement définies par les textes, notamment si l'emprunteur a une mobilité personnelle ou s'il est au chômage depuis plus d'un an ().
Un PTZ au montant encadré
Enfin, il est important de noter que le montant du prêt est encadré. Il ne peut servir à financer qu'un pourcentage du coût total TTC de l'opération envisagée. Le coût total (TTC) de l'opération totalise le coût de l'achat, des travaux du logement et des honoraires de négociation. Les frais d'acte notarié, les droits d'enregistrement et l'achat des meubles pour meubler le logement ne sont pas pris en compte.
Ce pourcentage de prise en charge varie selon le type de logement et la zone géographique dans laquelle il est situé. Pour les logements neufs, le barème est établi par l'. Il convient de noter que le coût total de l'opération pris en compte est plafonné selon la zone géographique d'implantation du logement et le nombre de personnes destinées à l'occuper. Les plafonds figurent à l'.
Si le PTZ ne peut financer l'intégralité de l'opération, il peut en revanche être cumulé avec d'autres prêts, par exemple avec un prêt à l'accession sociale (PAS). Une limite a cependant été prévue, dans la mesure où le montant du PTZ ne peut excéder le montant total des autres prêts consentis pour financer l'opération et qui ont une durée supérieure à 2 ans. À noter enfin que l'organisme de cautionnement Crédit Logement accepte de garantir les prêts à taux zéro, sous réserve, si ce PTZ est associé à un PAS de plus de 15 000 euros, qu'il soit assorti d'une garantie hypothécaire 5.
Autre source de financement, la souscription d'un PAS
L' de finances pour 2020, a ouvert aux personnes ayant des revenus modestes la possibilité de financer l'acquisition en primo accession des droits réels immobiliers de leur résidence principale dans le cadre d'un BRS à l'aide d'un prêt à l'accession sociale (PAS) (). Ce prêt offre à l'emprunteur l'avantage par rapport aux prêts conventionnés ordinaires, d'avoir des taux d'intérêt plafonnés 6.
Conditions - Les PAS ne peuvent être consentis qu'à des personnes physiques dont les revenus sont inférieurs à des plafonds de ressources annuels, déterminés selon la composition du ménage et le lieu d'implantation du logement. Ces plafonds sont alignés sur ceux du PTZ. Les conditions d'affectation du logement sont également identiques à celles prévues en matière de PTZ (voir supra).
À la différence du PTZ, le PAS présente l'avantage de pouvoir être utilisé pour financer l'intégralité de l'opération immobilière, excepté les frais de notaire, les frais d'instruction du dossier et les éventuels frais d'achats de meubles pour meubler le logement.
Le PAS est exclusif de tout autre prêt sauf ceux mentionnés par l', qui vise notamment le PTZ.
En ce qui concerne les garanties, à l'instar du PTZ, le Crédit Logement accepte de garantir les PAS pour un montant du prêt garanti limité à 15 000 euros. Au-delà de cette somme, la réglementation impose à l'emprunteur de prendre une sûreté réelle (voir supra). Comme lors de la souscription d'un PTZ, l'hypothèque bénéficie de l'exonération de la taxe de publicité foncière prévue à l'article 845 3° du Code général des impôts.
Les ménages éligibles à l'accession en BRS devraient pour la plupart correspondre aux différentes conditions du PTZ et du PAS. Ils auront dès lors tout intérêt à solliciter auprès de leur banque ce type de prêts pour financer l'acquisition des droits réels issus du BRS. Ils bénéficieront ainsi d'une exonération de la taxe de publicité foncière au titre des éventuelles sûretés réelles qui assortiraient le prêt, et ne seront débiteurs que d'intérêts dont le taux sera limité dans le cadre du PAS, voire d'aucun en cas de PTZ.
Constitution de garanties au profit de l'organisme prêteur
Les ménages peuvent constituer au profit de la banque finançant leur projet d'acquisition en BRS des garanties personnelles ou réelles. Il peut également leur être demandé la conclusion d'une délégation imparfaite.
La sûreté personnelle sécurise le créancier prêteur car elle lui offre un nouveau débiteur auprès duquel il pourra réclamer le paiement de sa créance. Le garant peut s'engager à régler au créancier toute ou partie de la somme que doit le débiteur principal dans le cadre d'un cautionnement.
Compatibilité du cautionnement avec le financement du BRS
Dans le cadre d'un BRS Opérateur, deux flux financiers devront être garantis. D'un côté, le paiement à l'opérateur de la cession des droits réels et de l'autre, le paiement de la redevance dans le cadre du BRS Preneur conclu avec l'OFS.
L'objet du cautionnement étant de garantir le paiement d'une dette, nous n'identifions ici aucune difficulté de compatibilité d'objet, puisque les deux flux financiers engendrés par le BRS constituent bien des dettes. Le cautionnement est d'ailleurs traditionnellement utilisé dans le domaine du logement, notamment les baux d'habitation.
Il n'en demeure pas moins que le BRS étant un montage innovant d'accession à la propriété, qui n'entre pas dans les schémas classiques, il ne serait pas surprenant qu'il suscite au moins pendant le temps nécessaire d'acculturation, la réticence de certains organismes de cautionnement. Toutefois, la société Crédit Logement a indiqué par un communiqué de presse en date du 15 juin 2020 qu'il soutenait l'accession à la propriété en garantissant par son cautionnement les financements réalisés via un BRS.
En tout état de cause, le cautionnement n'est pas la seule garantie qui peut être offerte aux banques : les sûretés réelles ont également leur place - avec notamment la faveur fiscale conduisant à l'exonération de la taxe de publicité foncière applicable en principe aux hypothèques.
Sûreté réelle, autre garantie du financement d'un BRS
Les sûretés réelles immobilières consistent à octroyer un droit réel au créancier sur un ou plusieurs immeubles au débiteur ou à des tiers. Concrètement, deux types de sûreté réelle sont susceptibles de bénéficier au prêteur finançant un BRS : l'hypothèque conventionnelle et le privilège du prêteur de deniers (PPD). Ces sûretés s'accommodent-elles efficacement du droit réel conféré à l'accédant ? C'est ce que nous allons maintenant vérifier.
Compatibilité de l'hypothèque avec le financement du BRS
Si l'hypothèque porte le plus souvent sur le droit de propriété de l'immeuble, elle peut également grever d'autres droits réels. Ainsi, sont susceptibles d'être hypothéqués la nue-propriété, l'usufruit pour le temps de sa durée, les droits résultant d'un bail emphytéotique ou encore d'un bail à construction.
Il est donc raisonnable de penser que le preneur en BRS peut grever ses droits réels d'une hypothèque conventionnelle, d'autant plus que l' précise que les droits réels issus du BRS peuvent faire l'objet d'une saisie immobilière.
Néanmoins, l'agrément par l'OFS en cas de cession pose question. En effet, si le preneur ne paye pas et que l'hypothèque vient à se réaliser, le créancier hypothécaire deviendrait titulaire du BRS. Or en cas de défaut d'agrément l'hypothèque serait vide. Dans le silence des textes et à ce jour, en l'absence de toute jurisprudence sur le sujet, il semble plus prudent pour la banque créancière de l'obtenir.
En revanche, le législateur a prévu un traitement fiscal de faveur lorsque l'hypothèse garantit un PTZ ou un PAS. Cette dernière est exonérée de la taxe de publicité foncière. Seule la contribution de sécurité immobilière (CSI) est alors due au taux de 0,05 % du montant inscrit, à l'instar du privilège de prêteur de deniers.
Le privilège du prêteur de deniers (PPD) compatible avec un BRS ?
La compatibilité de ce privilège peut interroger à la lecture de l'article 2374 2° du Code civil qui fait naître le privilège du prêteur de deniers (PPD) en garantie d'un prêt pour « l'acquisition d'un immeuble », ce qui semble viser de prime abord l'achat d'un immeuble par le biais d'un contrat de vente.
Néanmoins, un raisonnement par analogie avec les solutions connues pour le privilège de vendeur qui a la même assiette que le PPD peut conduire à considérer que le terme « d'acquisition » viserait plus largement des opérations à titre onéreux et pas seulement la vente 12. Par ailleurs, comme l'hypothèque conventionnelle, le PPD peut, si l'on raisonne à nouveau par analogie avec le privilège du vendeur, porter sur des droits réels susceptibles d'hypothèques 13.
Nous n'identifions donc pas d'obstacle à ce stade pour une banque à bénéficier du PPD dans le cadre du BRS, si ce n'est la question de l'agrément du prêteur par l'OFS dans les mêmes termes que ceux évoqués ci-dessus pour l'hypothèque.
Quel intérêt une banque peut-elle avoir à bénéficier d'un PPD plutôt que d'une hypothèque ? Jusqu'à présent, l' prévoit que si cette sûreté est inscrite dans les deux mois qui suivent l'acquisition, elle prend rang au jour de la vente et non au jour de son inscription, ce qui est sécurisant pour le prêteur.
Toutefois, le projet de réforme du droit des sûretés établi par la Chancellerie, qui doit paraître sous forme d'ordonnance à l'été 2021, abrogera le caractère rétroactif de l'inscription du PPD. En conséquence, celui-ci n'aura plus d'intérêt spécifique par rapport à l'hypothèque conventionnelle lorsque l'acquisition en BRS sera financée par un PTZ ou un PAS dans le cadre desquels les hypothèques sont exonérées de la taxe de publicité foncière.
Au-delà des sûretés personnelles et réelles, afin de rassurer au mieux les prêteurs, les accédants peuvent songer - ou être directement incités à le faire par les prêteurs - à consentir une protection supplémentaire à la banque pour accroître les chances des ménages d'obtention d'un prêt.
Outils de protection des prêteurs : la délégation imparfaite
Le ménage emprunteur peut augmenter ses chances d'obtenir un crédit en prévoyant que le montant de l'indemnité due par l'OFS à l'emprunteur en cas de résiliation dudit bail sera, à compter de l'acceptation de l'OFS et à première demande du prêteur, payé directement au prêteur. La somme s'imputera à due concurrence sur le montant de la somme empruntée que doit rembourser l'accédant à la banque.
Un tel schéma sera juridiquement qualifié de délégation imparfaite.
Délégation car l'accédant-emprunteur (le délégant) déléguera l'OFS (le délégué), auprès du prêteur (le délégataire) pour le paiement de l'indemnité de résiliation.
Imparfaite car l'accédant-emprunteur ne sera pas, lors de la conclusion de cette délégation, libéré de la charge du remboursement de son emprunt. C'est ici que la délégation joue son rôle de sûreté (à la différence de la délégation parfaite ou novatoire qui entraîne l'extinction du rapport d'obligation initial entre le délégant et le délégataire).
La banque aura donc par l'effet de cette délégation un nouveau débiteur, l'OFS, qui sera tenu de lui verser le montant de l'indemnité de résiliation.
Cette adjonction d'un nouveau débiteur, rassurante pour le prêteur, est de nature à augmenter les chances des ménages d'obtenir un crédit en vue d'acheter en BRS si la banque ne se satisfait pas des garanties évoquées ci-dessus.
On le voit, tout est mis en place pour qu'un ménage souhaitant acquérir un logement au moyen d'un BRS puisse y parvenir. Les prêts aidés, que sont le PTZ et le PAS, lui apporteront le financement nécessaire sans alourdir la charge financière, pour autant qu'il remplisse les critères d'éligibilité. Quant aux sûretés qui pourront être exigées par les banques, elles sont bien connues de la pratique. Qu'il s'agisse du cautionnement par l'intermédiaire de l'un des organismes de caution agissant dans le secteur bancaire, de l'hypothèque, du PPD, ou encore de la délégation imparfaite, les prêteurs auront le choix et pourront ainsi accompagner ce mouvement d'accession souhaité par le législateur.
1 L'objet du dossier étant le financement de l'acquisition en BRS, les développements suivants ne porteront que sur le PTZ accordé en vue du financement d'un logement neuf.
2 www.service-public.fr/simulateur/calcul/zonage-abc.
3 Les plafonds sont fixés par l'.
4 Sauf dans les cas prévus à l'.
5 Site internet du Crédit Logement : https://www.creditlogement.fr/page/quels-sont-les-projets-immobiliers-eligibles-a-notre-garantie.
6 Sur les prêts conventionnés ordinaires : .
7 Cette garantie « consiste dans l'adjonction à l'obligation principale d'un engagement pris par un garant permettant au bénéficiaire d'agir contre celui-ci » L. Aynès, P. Crocq, Droit des sûretés, 13e éd., coll. Droit civil, LGDJ, n° 100.
8 .
9 .
10 .
11 .
12 M. Bourassin, V. Brémond, Les sûretés, coll. Université, 2018, Sirey, n° 1243 ; Ph. Simler, Ph. Delebecque, Les sûretés - La publicité foncière, 7e éd., coll. Précis Dalloz, 2016, n° 432 ; Pène, Fasc. 480 : Vente d'immeuble. - Garanties du vendeur et du prêteur, JCl Notarial Formulaire - V° Vente d'immeuble, n° 15.
13 Ph. Simler, Ph. Delebecque, Les sûretés - La publicité foncière, 7e éd., coll. Précis Dalloz, 2016, n° 434; M. Bourassin, V. Brémond, Les sûretés, coll. Université, 2018, Sirey, n° 1238.