Le droit pénal immobilier : peut mieux faire !

Réservé aux abonnés

Quelle est l'efficience de notre arsenal répressif dans le secteur de la construction et de l'immobilier ? Par le double regard du juriste et du praticien, le dossier tente de répondre à cette question. L'efficacité d'un dispositif pénal est mesurée à son aptitude à répondre aux deux questions suivantes : favorise-t-il la prévention de l'infraction ? Et en cas de commission, la réprime-t-il utilement ?

Toute prévention suppose que l'infraction à éviter soit connue et comprise des professionnels concernés, le droit pénal qui encadre l'économie immobilière est largement perfectible. La multiplicité des infractions possibles dans la conduite d'une opération immobilière, spécialement dans sa phase chantier, accrue par la tendance du législateur moderne à créer constamment des infractions spéciales qui parsèment les lois civiles, sans toujours se demander si une infraction générale préexistante n'est pas suffisante pour assurer l'ordre public, rend quasi illusoire l'idée que les infractions existantes puissent être toutes connues des opérateurs professionnels, et par voie de conséquence exclut que ces délits et contraventions sans cesse renouvelés soient compris des intéressés. Et bien plus encore lorsqu'on observe que l'élément moral de l'infraction devient bien souvent inutile, alors qu'il était hier encore nécessaire à la constitution de l'infraction, en sus de la constatation de l'existence de l'élément matériel. En somme, les professionnels de la construction et de l'immobilier se trouvent exposés à un risque pénal toujours croissant mais qu'ils peinent à connaître, comprendre et maîtriser. Ce qui n'est satisfaisant ni pour les personnes à protéger, ni pour le respect de l'ordre public, ni pour les opérations immobilières elles-mêmes qui se trouvent affectés d'un aléa difficilement maîtrisable.

La répression mérite elle aussi réflexion : le plus souvent les peines principales édictées sont l'emprisonnement et l'amende, dont on sait que le prononcé en la matière est soit rarissime pour les peines de prison, soit peu efficace en cas d'amende : elle ne bénéficie pas à la personne lésée par l'infraction et son montant est parfois symbolique. En pratique, ce sont donc les peines accessoires qui sont déterminantes et dont l'importance est tout sauf accessoire : suspension du chantier, démolition de l'ouvrage, interdiction d'exercice professionnel, etc. Il serait ainsi plus judicieux que d'accessoires ces peines deviennent principales, permettant qu'elles soient mieux connues des intéressés et que l'office du juge se concentre sur la juste adéquation de la peine à l'infraction.

Le droit pénal de l'immobilier mériterait une profonde remise en ordre conduisant à supprimer des infractions inutiles ou redondantes et à concentrer l'arsenal juridique autour de quelques infractions-clés. Les règles pénales seraient alors mieux connues, comprises et respectées, parce qu'une véritable prévention pourrait être menée. Le choix d'une politique répressive adaptée, qui déploie des peines justes et adéquates, renforcerait la légitime protection des personnes touchées par la commission de l'infraction.

Abonnés
Baromètre de la construction
Retrouvez au même endroit tous les chiffres pour appréhender le marché de la construction d’aujourd'hui
Je découvreOpens in new window
Newsletter Week-End
Nos journalistes sélectionnent pour vous les articles essentiels de votre secteur.
Les services Le Moniteur
La solution en ligne pour bien construire !
L'expertise juridique des Éditions du Moniteur
Trouvez des fournisseurs du BTP !