Le bâtiment, priorité de la loi sur la transition énergétique

Enfin ! Plus de deux ans après son annonce par le chef de l’Etat, la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte a été définitivement votée à l’Assemblée nationale. Historique, ce texte fixe les grands objectifs du nouveau modèle énergétique français. Mais au-delà de ces objectifs, c’est le volet « bâtiment » qui comporte le plus grand nombre de mesures intéressantes. Revue de détails.

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Ségolène Royal, ministre de l'Ecologie

A l’issue d’un travail intense des deux Chambres, plus de 150 heures de débat en séances publiques, autant en commission et plus de 5 000 amendements déposés dont quelque 1 000 adoptés, la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte a été adoptée définitivement à l’Assemblée nationale le 22 juillet. Elle pourrait être qualifiée d’historique. C’est, en effet, la première fois que le Parlement se prononce sur l’orientation énergétique que doit prendre la France, mais surtout qu’il estime que la croissance économique n’est pas corrélée à la croissance de la consommation énergétique. Un changement culturel ! Porté par Ségolène Royal, la ministre de l’Ecologie, le texte vise à renforcer l’indépendance énergétique de la France et donc alléger sa lourde facture énergétique de 70 milliards d’euros, réduire ses émissions de gaz à effets de serre (GES) ou encore développer des activités pourvoyeuses d’emplois (100 000 prévus sur 3 ans). Outre l’enjeu écologique pour peser sur la dérégulation du climat et celui économique, on peut également y voir un enjeu social pour lutter contre la précarité énergétique.

L’adoption de ce texte est incontestablement un signal fort envoyé par la France en vue des négociations de la COP 21, qui se dérouleront à partir du 30 novembre, à Paris.

Le bâtiment est une priorité dans la loi ;  un volet spécifique lui est consacré et contient des avancées intéressantes qui ont souvent d’ailleurs fait consensus entre députés et sénateurs. Carnet numérique de suivi et d’entretien du bâtiment qui va permettre de suivre son évolution, de la construction de l’ouvrage à sa mutation, en passant par  l’entretien-réparation, principe d’embarquement de l’efficacité énergétique à chaque fois que des travaux importants sont réalisés, exemplarité énergétique des nouvelles constructions sous maîtrise d’ouvrage de l’État, de ses établissements publics ou des collectivités territoriales  ou encore intégration d’un critère de performance énergétique dans la définition de la décence d’un logement sont quelques-uns de ses dispositifs.

Pour rendre toutes ces mesures opérationnelles rapidement, les premiers décrets d’application seront publiés dès la rentrée 2015, a promis la ministre de l’Ecologie, selon laquelle 18 décrets et 27 ordonnances sont en préparation. Lors du vote solennel du texte, mercredi 22 juillet, elle a évoqué « plus de cent décrets d’application » et « près de 45 ordonnances ».

La ministre n'est toutefois pas au bout de ses peines, avec la perspective de recours devant le Conseil constitutionnel promis par le groupe Les Républicains. Ce sera la dernière étape avant la promulgation de la loi sur la transition énergétique pour la croissance verte.

Retrouvez ci-dessous, toutes les dispositions de cette loi qui concernent le secteur du bâtiment :

Politique énergétique nationale (Titre I article 1er)

L’article 1er du texte fixe comme grands objectifs une réduction de 50% de la consommation énergétique finale en 2050 par rapport à la référence 2012, en visant un objectif intermédiaire de 20 % en 2030, une baisse de 40% des émissions de gaz à effet de serre sur la période 1990-2030 ou une part d’énergies renouvelables dans la consommation de 23% en 2020 et de 32% dans 15 ans. Il vise également une réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 % à l’horizon 2025 et indique de nouvelles valeurs à atteindre pour la taxe carbone à 56 euros la tonne de CO2 en 2020 et 100 euros en 2030.

Par ailleurs, la lutte contre la précarité énergétique est très clairement exprimée.

Il indique aussi qu’il faudra disposer d’un parc immobilier dont l’ensemble des bâtiments seront rénovés en fonction des normes “bâtiment basse consommation” ou assimilées, à l’horizon 2050, en menant une politique de rénovation thermique des logements concernant majoritairement les ménages aux revenus modestes.

Le développement des territoires à énergie positive est vivement souhaité ; la loi apportant d’ailleurs une définition à ces territoires : « pour concourir à la réalisation de ces objectifs, l’État, les collectivités territoriales et leurs groupements, les entreprises, les associations et les citoyens associent leurs efforts pour développer des territoires à énergie positive. Est dénommé “territoire à énergie positive” un territoire qui s’engage dans une démarche permettant d’atteindre l’équilibre entre la consommation et la production d’énergie à l’échelle locale en réduisant autant que possible les besoins énergétiques et dans le respect des équilibres des systèmes énergétiques nationaux. Un territoire à énergie positive doit favoriser l’efficacité énergétique, la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la diminution de la consommation des énergies fossiles et viser le déploiement d’énergies renouvelables dans son approvisionnement ».

Mieux rénover les bâtiments pour économiser l’énergie, faire baisser les factures et créer des emplois (Titre II)

Objectif

Article 3 : la France se fixe comme objectif de rénover énergétiquement 500 000 logements par an à compter de 2017, dont au moins la moitié est occupée par des ménages aux revenus modestes, visant ainsi une baisse de 15 % de la précarité énergétique d’ici 2020.

Article 4 : tous les 5 ans, le Gouvernement remet au Parlement un rapport qui détaille la stratégie nationale à l’échéance 2050 pour mobiliser les investissements en faveur de la maîtrise de l’énergie dans le parc de bâtiments publics ou privés, résidentiels ou tertiaires. Rapport qui mentionne : une analyse détaillée du parc national de bâtiments, une présentation des stratégies de rénovation économiquement ; un bilan des politiques conduites et un programme d’action visant à stimuler les rénovations lourdes de bâtiment économiquement rentables ; un programme d’action visant à orienter les particuliers, l’industrie de la construction et les établissements financiers dans leurs décisions d’investissement et une estimation des économies d’énergie attendues.

Obligation de rénovation

Article 5 : avant 2025, tous les bâtiments privés résidentiels dont la consommation en énergie primaire est supérieure à 330 kilowattheures d’énergie primaire par mètre carré et par an doivent avoir fait l’objet d’une rénovation énergétique.

Article 6 : à partir de 2030, au moment des mutations, les bâtiments privés résidentiels doivent faire l’objet d’une rénovation énergétique, selon leur niveau de performance énergétique, sous réserve de la mise à disposition des outils financiers adéquats. Un décret précisera le calendrier progressif d’application de cette obligation en fonction de la performance énergétique, étalé jusqu’en 2050.

Article 14 : Il s’agit ici de l’obligation d’embarquer la performance énergétique à chaque fois que des travaux importants sont réalisés : travaux de ravalement importants, de travaux d’isolation, ou de réfection de toiture. L’objectif est de se rapprocher le plus possible des exigences applicables aux bâtiments neufs. Un garde-fou est toutefois introduit en cas d’impossibilité technique ou juridique ou de disproportion manifeste entre les avantages et les inconvénients de nature technique, économique ou architecturale. Un décret, pris dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi, déterminera les caractéristiques énergétiques et environnementales et les catégories de bâtiments.

Cet article indique aussi que l’utilisation des matériaux biosourcés est encouragée par les pouvoirs publics lors de la construction ou de la rénovation des bâtiments.

Par ailleurs, le gouvernement remet au Parlement, au plus tard six mois après la publication du décret, un rapport sur les moyens de substituer à l’ensemble des aides fiscales attachées à l’installation de certains produits de la construction une aide globale dont l’octroi serait subordonné, pour chaque bâtiment, à la présentation d’un projet complet de rénovation, le cas échéant organisé par étapes, réalisé par un conseiller à la rénovation dûment certifié sur la base de l’étude de faisabilité et un rapport sur la nécessité d’effectuer une évaluation de la performance énergétique des travaux réalisés.

Pour inciter les propriétaires bailleurs à procéder à des travaux de performance énergétique, le gouvernement remettra, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi, un rapport d’évaluation concernant la mise en place d’un mécanisme financier visant à inciter, via un bonus, les propriétaires dont le bien atteint des objectifs de performance énergétique supérieurs à un référentiel d’économie d’énergie minimale à déterminer, et à pénaliser, via un malus, ceux dont le bien présente des performances énergétiques inférieures à ce référentiel.

Article 17 :Obligation de rénovation pour le parc tertiaire. Cette obligation de rénovation est prolongée par périodes de dix ans à partir de 2020 jusqu’en 2050 avec un niveau de performance à atteindre renforcé chaque décennie, de telle sorte que le parc global concerné vise à réduire ses consommations d’énergie finale d’au moins 60 % en 2050 par rapport à 2010, mesurées en valeur absolue de consommation pour l’ensemble du secteur. Le décret en Conseil d’État applicable pour la décennie à venir est publié au moins 5 ans avant son entrée en vigueur.

Dérogation aux règles d’urbanisme au bénéfice des travaux d’isolation

Article 7 : Pour délivrer le permis de construire ou d’aménager, il est possible pour l’autorité compétente de déroger (par décision motivée) aux règles des PLU pour l’isolation extérieure des façades, l’isolation extérieure des toitures et la mise en œuvre de dispositifs de protection contre le rayonnement solaire en saillie des façades. Les décisions doivent être motivées et limitées par un décret, et peuvent comporter des prescriptions destinées à assurer la bonne intégration architecturale du projet dans le bâti existant et dans le milieu environnant.

Bâtiments à énergie positive

Article 8 : toutes les nouvelles constructions sous maîtrise d’ouvrage de l’État, de ses établissements publics ou des collectivités territoriales font preuve d’exemplarité énergétique et environnementale et sont, chaque fois que possible, à énergie positive et à haute performance environnementale. Elles doivent contenir un minimum de matériaux issus de ressources renouvelables ou recyclées, définis par décret en Conseil d’État. Chaque projet de construction doit mentionner l’empreinte carbone des bâtiments. Des actions de sensibilisation à la maîtrise de la consommation d’énergie sont mises en place auprès des utilisateurs de ces nouvelles constructions.  Les collectivités territoriales peuvent bonifier leurs aides financières ou octroyer prioritairement ces aides aux bâtiments à énergie positive ou qui font preuve d’exemplarité énergétique et environnementale. Un décret en Conseil d’État définit les exigences auxquelles doit satisfaire un bâtiment à énergie positive, d’une part, et un bâtiment à haute performance environnementale, d’autre part.

Contrôle du Parlement sur le CSTB

Article 9 : Le CSTB devient un organisme soumis à un contrôle direct du Parlement : audition des candidats pour la présidence du conseil d’administration (nomination en conseil des ministres pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois). Le conseil d’administration comprend des membres du Parlement, des représentants de l’État, des représentants élus des salariés, des représentants des collectivités territoriales et des personnalités qualifiées qui peuvent être choisies au sein des universités, des écoles et des centres de recherche nationaux. Il doit établir un rapport annuel d’activité, qu’il remet au gouvernement et dépose sur les bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat, qui en saisissent l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Article 16 : Le code du logiciel établissant l’ensemble des caractéristiques thermiques des constructions nouvelles est accessible à toutes les personnes morales ou physiques qui en font une demande, dûment justifiée. La mise à disposition du code s’effectue à titre gracieux ou onéreux, selon l’utilisation du code prévue par le demandeur.

Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique

Article 10 : Le conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique a pour mission de conseiller les pouvoirs publics dans la définition, la mise en oeuvre et l’évaluation des politiques publiques relatives à la construction et sur l’adaptation des règles relatives à la construction aux objectifs de développement durable ; il suit également l’évolution des prix des matériels et matériaux de construction et d’isolation. Il  formule un avis consultatif sur l’ensemble des projets de textes législatifs ou réglementaires qui concernent le domaine de la construction. Cet avis est rendu public. Cette instance sera, par ailleurs, obligatoirement consultée sur les projets législatifs et réglementaires déposés à compter du 1er juillet 2015. Créé par décret du 23 mars 2015, le Conseil supérieur de la construction et de l’efficacité énergétique est entré dans sa phase active avec son installation par la ministre du Logement le 15 juin. Un arrêté du 19 juin en détaille ses membres.

Carnet numérique de suivi et d’entretien du logement

Article 11 : le carnet numérique de suivi et d’entretien du logement est créé et mentionne l’ensemble des informations utiles à la bonne utilisation, à l’entretien et à l’amélioration progressive de la performance énergétique du logement et des parties communes lorsque le logement est soumis au statut de la copropriété. Il doit comporter le diagnostic technique lorsque le logement est en copropriété, ou en location. Il est obligatoire pour toute construction neuve dont le permis de construire est déposé à compter du 1er janvier 2017 et pour tous les logements faisant l’objet d’une mutation à compter du 1er janvier 2025. Un décret en précise les modalités d’application. Les logements HLM ne sont pas concernés, les députés ayant estimé que, « dans la mesure où ces appartements font rarement l'objet d'une vente, il serait trop coûteux de créer systématiquement un carnet numérique de suivi ».

Extension du critère de décence des logements loués à la performance énergétique

Article 12: il s’agit de faire évoluer les critères de décence des logements pour y intégrer la performance énergétique. Le seuil de performance exigée sera relevé au fil des années. Un décret en Conseil d’État définira le critère minimal à respecter et un calendrier de mise en œuvre échelonnée.

Article 13 : Ces logements sociaux pouvant être aliénés doivent répondre à des normes de performance énergétique minimale fixées par décret.

Sécurisation juridique de la cotraitance

Article 18 :  les marchés privés de bâtiment portant sur des travaux et prestations de service réalisés en cotraitance dont le montant n’excède pas 100 000 € hors taxes comportent, à peine de nullité, les mentions suivantes : identité du maître d’ouvrage et des cotraitants, nature et prix des travaux et prestations confiés à chaque cotraitant, mention de l’existence ou non de la solidarité juridique des membres du groupement envers le maître d’ouvrage, et enfin nom et mission du mandataire commun.

Il s’agit de sécuriser la situation des PME et artisans qui souhaitent s’unir en groupement momentané d’entreprises pour proposer une offre globale de travaux à leurs clients, notamment en matière d’accessibilité et de rénovation énergétique. Le texte impose seulement de mentionner expressément l’existence ou non d’une solidarité juridique.

Rapport sur aides fiscales à la mise en place de filtres à particules sur l’installation de chauffage au bois

Article 21 : dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité d’aides fiscales à l’installation de filtres à particules sur l’installation de chauffage au bois pour particuliers.

Financement

Article 20 : création d’un fonds dénommé « Enveloppe spéciale transition énergétique », dont les ressources sont définies en loi de finances. La gestion financière et administrative du fonds est assurée par la Caisse des dépôts et consignations qui est habilitée à assurer le préfinancement de l’enveloppe spéciale, compte tenu du grand intérêt déjà manifesté par les bénéficiaires des actions du fonds, et notamment les territoires lauréats des appels à projets lancés par la ministre de l’Ecologie.

Une convention entre l’État et la Caisse des dépôts et consignations fixe les modalités de gestion de ce fonds pour les exercices 2015 à 2017. Les engagements des dépenses du fonds sont décidés par le ministre chargé de l’écologie et les ordres de payer sont délivrés par le ministre chargé de l’écologie et par les préfets de région. Ce fonds peut garantir les prêts accordés à titre individuel sous condition de ressources, les prêts à la copropriété. La gestion financière et administrative du fonds est assurée par la Caisse des dépôts et consignations.

Article 19 : dans un délai de 6 mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport du Gouvernement est remis au Parlement faisant état : de l’ensemble des financements permettant l’attribution de subventions pour la rénovation énergétique des logements occupés par des ménages aux revenus modestes ; de l’opportunité de leur regroupement au sein d’un fonds spécial concourant à la lutte contre la précarité énergétique ; des modalités d’instauration d’un tel fonds.

Article 23 : tiers financement : le texte prévoit, dans le Code Monétaire et Financier, la création d’une dérogation au monopole bancaire pour les sociétés de tiers financement portées par des collectivités territoriales. Celles-ci devront néanmoins respecter un régime prudentiel - simplifié et allégé compte tenu de leur objet limité - qui sera précisé par décret, et seront soumises à la supervision de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR).

Article 25 : nouvelle forme de prêt inspirée du prêt viager. Un établissement de crédit, un établissement financier ou une société de tiers-financement peuvent procéder au financement de travaux de rénovation au moyen d’un prêt avance mutation garanti par une hypothèque.

Article 24 : introduction d’une variante de prêt viager hypothécaire avec remboursement régulier des intérêts ; l’hypothèque à financer ne portant plus que sur la capital.

Service public de la performance énergétique de l’habitat

Article 22 : le service public de la performance énergétique de l’habitat s’appuie sur un réseau de plateformes territoriales de la rénovation énergétique. Portées par un  ou plusieurs établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, ces plateformes fournissent aux particuliers des informations techniques, financières, fiscales et réglementaires. Elles peuvent également assurer leur mission d’information de manière itinérante, notamment en menant des actions d’information à domicile. Ce service est assuré sur l’ensemble du territoire. Les plateformes territoriales de la rénovation énergétique pourront favoriser la mobilisation des professionnels et du secteur bancaire, animer un réseau d’acteurs locaux, élargi au-delà des seuls professionnels et mettre en place des actions facilitant leur montée en puissance. Elles pourront ainsi associer à leurs actions les acteurs impliqués dans la lutte contre la précarité énergétique.

Compteurs intelligents

Article 26 : Obligation d’installer des systèmes de mesure de consommation individuelle de chaleur et d’eau chaude dans les immeubles chauffés collectivement. Le syndic inscrit à l’ordre du jour de l’assemblée générale la question des travaux permettant de munir l’installation de chauffage d’un tel dispositif d’individualisation, ainsi que la présentation des devis élaborés à cet effet. Entrée en vigueur 6 mois après la promulgation de la loi.

Article 27 : le texte donne au gouvernement les outils pour imposer le déploiement des compteurs dits intelligents (Linky pour l’électricité et Gazpar pour le gaz). Il prévoit la mise en place de sanctions pour les gestionnaires de réseaux publics d’électricité et de gaz qui n’installeraient pas de compteurs intelligents : possibilité d’une amende décidée par l’autorité administrative (agents publics missionnés par un des ministères compétents ou maire) de 1 500 euros pour le propriétaire de l’immeuble ; sanction pour les exploitants de réseaux de chaleur ou de froid, jusqu’à 4% du CA HT.

Article 28 : cet article prévoit que, pour les consommateurs bénéficiant du tarif social d’électricité ou de gaz, la mise à disposition des données de comptage s’effectue au moyen d’un boîtier situé dans l’habitation. Une telle installation permettra aux consommateurs en situation de précarité énergétique de suivre l’évolution de leur consommation en temps réel ainsi de pouvoir adapter leur comportement et de réduire le montant de leur facture.

Article 29 : disposition facilitant l’accès aux compteurs de gaz pour les gestionnaires de gaz et d’électricité.

Article 31: ce texte a pour but d’encadrer le jeu de la responsabilité décennale en matière de performance énergétique – un sujet à fort enjeu, la garantie décennale des constructeurs étant assortie d’une obligation d’assurance. Le texte définit dans quels cas l’immeuble sera, en cas de défaut de performance énergétique, jugé impropre à sa destination, critère qui entraîne l’application de la garantie décennale. Ainsi l’impropriété à destination ne pourra être retenue «qu’en cas de dommages résultant d’un défaut lié aux produits, à la conception ou à la mise en œuvre de l’ouvrage, de l’un de ses éléments constitutifs ou de l’un de ses éléments d’équipement conduisant, toute condition d’usage et d’entretien prise en compte et jugée appropriée, à une surconsommation énergétique ne permettant l’utilisation de l’ouvrage qu’à un coût exorbitant. » Les notions subjectives : « surconsommation », « coût exorbitant »… que le texte comprend prêteront sans doute à interprétation.

Rapport au Parlement sur les colonnes montantes dans les immeubles d’habitation

Article 33 : dans un délai de 12 mois après promulgation de la loi, le gouvernement devra remettre au Parlement un rapport sur le statut des colonnes montantes dans les immeubles d’habitation. Objectif : la mise aux normes des 300 000 colonnes montantes, hors concession, qui ne seraient pas aux normes, une clarification juridique (depuis 1946, les colonnes montantes sont incorporées aux réseaux de distribution publics, gérés et entretenus par le concessionnaire, mais celles qui existaient avant peuvent encore appartenir aux copropriétaires) et une proposition de co-financement des investissements à mettre en œuvre, dans un délai de six ans.

Certificats d’économie d’énergie

Article 30: le dispositif des CEE évolue à travers :

– l’éligibilité étendue aux sociétés publiques locales et aux sociétés d’économie mixte à opération unique dont l’objet social inclut l’efficacité énergétique ou permet de fournir un service de tiers-financement ainsi qu’aux associations de collectivités (uniquement pour le dépôt de programmes) ;

– la valorisation de la contribution au fonds de garantie pour la rénovation énergétique ;

– l’élargissement des programmes au domaine des transports;

– l’adaptation du régime de sanctions, notamment pour le passage au système déclaratif.

Le texte fixe la 4ème période d’obligations d’économie d’énergie entre le 1 er janvier 2018 au 31 décembre 2020. Mais surtout il réoriente plus massivement les CEE vers la lutte contre la précarité énergétique à travers deux nouvelles mesures : une obligation d’au moins un tiers des économies d’énergies réalisée au bénéfice des ménages en situation de précarité énergétique (et non plus « une part » comme l’indiquait le code de l’énergie) et la création d’un dispositif CEE spécifique pour la précarité énergétique. Le texte instaure donc un double comptage, l’un portant sur l’obligation générale, à réaliser avec des CEE classiques, l’autre sur la lutte contre la précarité énergétique, qui sollicitera des CEE explicitement libellés.

Les opérations d’économies d’énergie réalisées au bénéfice des ménages en situation de précarité énergétique ne concerneront pas uniquement des opérations d’économies d’énergie réalisées à leur domicile mais toutes les opérations d’économies d’énergie réalisées à leur bénéfice, comme des opérations de covoiturage.

Réseaux électriques intelligents

Article 200 :  dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnances les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour mener à bien un déploiement expérimental de réseaux électriques intelligents ou de dispositifs de gestion optimisée de stockage et de transformation des énergies. Ces mesures sont adoptées pour une durée de quatre ans à compter de la publication de l’ordonnance et peuvent être renouvelées une fois pour la même durée. Ce déploiement est organisé conjointement par le gestionnaire de réseau, les autorités organisatrices des réseaux publics de distribution et les autres collectivités publiques compétentes en matière d’énergie concernés. Cette expérimentation est menée dans un nombre limité de régions ou d’ensembles de départements déterminé par le ministre chargé de l’énergie, sur proposition des gestionnaires de réseaux ou des collectivités publiques.

Article 139 : concernant la filière des énergies renouvelables, la distance minimale à respecter entre une éolienne et des habitations a été ramenée à 500 mètres. Cette distance qui sépare les habitations des installations (et qui est au minimum de 500 mètres) est appréciée dans le cadre de l'autorisation ICPE, sur la base de l'étude d'impact figurant dans le dossier.

Economie circulaire (Titre IV)

Valorisation et réduction des déchets du BTP

Article 70 : le texte prévoit que 70% des déchets du BTP devront être valorisés sous forme matière en 2020. Par ailleurs, les quantités de déchets non dangereux non inertes admis en installation de stockage devront être réduites de 30% en 2020 par rapport à 2010, et de 50% en 2025.

La route exemplaire

Article 79 : l’Etat et les collectivités territoriales devront d’ici 2020 s’assurer qu’au moins 70% des matières et déchets produits sur les chantiers de construction ou d’entretien routiers dont ils sont maîtres d’ouvrage sont réemployés ou orientés vers le recyclage ou les autres formes de valorisation matière (y compris les opérations de remblayage qui utilisent des déchets au lieu d’autres matériaux), au sens de la directive 2008/98/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relatives aux déchets. Tout appel d’offres que l’État ou les collectivités territoriales publient pour la construction ou l’entretien routier intègre une exigence de priorité à l’utilisation des matériaux issus du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage de déchets.

La loi fixe d’autres objectifs quantifiés à différentes échéances aux maîtres d’ouvrages routiers. Ainsi, à partir de 2017, au moins 50 % en masse de l’ensemble des matériaux utilisés pendant l’année dans leurs chantiers de construction routiers devront être issus du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage de déchets (dont au moins 10 % des matériaux utilisés dans les couches de surface et au moins 20 % des matériaux utilisés dans les couches d’assise). A partir de 2020, ces objectifs passeront respectivement à 60 %, 20 % et 30 %.

Récupération des déchets par les négoces

Article 93 : création d’un réseau de déchetteries professionnelles du BTP via les négoces qui devront s’organiser d’ici le 1er janvier 2017 pour reprendre à proximité de leurs sites de distribution les déchets issus des mêmes types de matériaux, produits et équipements de construction qu’ils vendent. Un décret précisera les modalités d’application de cet article, et notamment la surface de l’unité de distribution à partir de laquelle les distributeurs sont concernés par cette disposition.

Article 96 : les clauses contractuelles créant une discrimination en raison de la présence de matériaux ou éléments issus de déchets valorisés, ou de produits issus du réemploi et de la réutilisation dans les produits qui satisfont aux règlements et normes en vigueur, pour un même niveau de performance compte tenu de l’usage envisagé, sont prohibées.

Lutte contre les sites illégaux

Article 70 : la lutte contre les sites illégaux de tri et de traitement des déchets ainsi que celle contre les trafics associés, notamment les exportations illégales, sont intensifiées afin que l’ensemble des objectifs fixés par la loi de prévention, de réutilisation, de recyclage ou  de valorisation des déchets soient atteints.

Article 100 : dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la loi, après concertation avec les parties prenantes, le Gouvernement remettra au Parlement un rapport sur le principe de réversibilité du stockage, en vue d’assurer le réemploi, le recyclage ou la valorisation des déchets enfouis dans les installations de stockage de déchets. La loi précise que le rapport fera le point sur les techniques disponibles ainsi que sur les risques sanitaires et écologiques d’une application du principe de réversibilité, à un coût économique raisonnable. Le rapport examinera également l’intérêt de ce principe pour la promotion d’une économie circulaire et, le cas échéant, les conditions de réalisation d’expérimentations.

Et aussi…

Le chèque énergie

Article 201 : mise en place du chèque énergie, un titre spécial de paiement permettant aux ménages dont le revenu fiscal est inférieur à un plafond d’acquitter tout ou partie du montant des dépenses d’énergie relatives à leur logement ou des dépenses qu’ils assument pour l’amélioration de la qualité environnementale ou la capacité de maîtrise de la consommation d’énergie de ce logement. Les décrets pour la mise en œuvre du chèque énergie feront l’objet d’une saisine du Conseil d’État dès promulgation de la loi. L’installation du dispositif se fera en 2016 après une phase expérimentale.

Transition énergétique sur les territoires

Article 188: la loi prévoit que les régions constituent l’échelon pertinent pour coordonner les études, diffuser l’information et promouvoir les actions en matière d’efficacité énergétique. Elles doivent notamment favoriser l’implantation de plateformes intercommunales de la rénovation énergétique. Ces dernières appuient la mise en œuvre des programmes régionaux pour l’efficacité énergétiques, qui prévoient notamment un volet dédié au financement des opérations de rénovation énergétique.  Les régions sont aussi garantes de la bonne adéquation entre l’offre de formation initiale et les besoins des entreprises pour répondre aux défis techniques de construction en matière de transition énergétique.

L’État, les régions ainsi que les métropoles et les établissements publics s'associent pour que deux cents expérimentations de territoires à énergie positive, soient des territoires qui s’engagent dans une démarche permettant d’atteindre l’équilibre entre la consommation et la production d’énergie à l’échelle locale,  soient engagées en 2017. Jusqu’ici, et dès avant la proclamation de la loi, la plupart des conventions financières ont été signées avec les collectivités.

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