La ville accessible, plus qu'un rêve d'étudiants

A l'occasion de la tenue du salon Urbaccess à Paris les 22 et 23 mars, deux étudiantes en urbanisme livrent leur vision de la ville accessible de demain : une ville rassurante, fluide, décloisonnée, conçue pour et par ses habitants.

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L'édition 2016 du salon Urbaccess se tient les 22 et 23 mars à Paris

Elles s'appellent Julie et Camille, sont étudiantes, l'une à l'Institut d'urbanisme et d'aménagement de Lille, l'autre, diplômée d'architecture, à Sciences Po Paris. Ces derniers mois, la question de l'accessibilité de la cité a occupé une place centrale dans leur cursus. Dans le cadre du salon Urbaccess (22 et 23 mars porte de Versaille à Paris), elles ont en effet participé, avec 13 autres étudiants sélectionnés, au concours grandes écoles « Ville accessible » (voir focus) qui avait pour thème la mobilité à l’échelle du quartier. Au sein de groupes de travail, elles ont réfléchi à la question des déplacements dont l'accessibilité est l'une des notions primordiales.

Julie Desmares : "L'accessibilité c'est un concept global. Et personnellement, j'essaye de le regarder sous un angle social : comment éviter la discrimination ? Rendre l'espace accessible, ça doit permettre à l'ensemble de la population de vivre mieux. On a déjà pensé aux handicapés moteurs avec la loi de 2005, les normes de construction pour les logements et les ERP. Mais ça ne va pas assez loin. Il faut élargir à toutes les personnes qui ont du mal à se déplacer : les jeunes enfants, les personnes âgées..."

Camille Bourguignon : "L'accessibilité c'est une question dans le sujet de l'urbanité. C'est la question de l'inclusion des habitants. Donner à tous le droit de se rendre quelque part et d'accéder à des lieux. Dans cette optique, la notion de déplacement est essentielle."

Un déplacement qui n'est pas toujours évident ne serait-ce qu'à concevoir.

Camille Bourguignon : "Evidemment les transports en commun changent beaucoup de choses. On ne se déplace pas pareil selon leur disponibilité. Mais même s'ils sont présents, il y a une fragmentation des modes de transport (bus, métro, marche), un manque de cohésion qui peut représenter un frein".

Julie Desmares : "Que l'on vive près ou loin des commerces par exemple, la distance reste un enjeu. Lorsqu'on est une personne âgée, il faut prévoir non seulement l'aller - comment je me déplace - mais aussi le retour : comment je rentre charge ? Et ne serait-ce que pour sortir de chez soi on se heurte immédiatement à son logement, à son immeuble ou à sa maison qui n'ont pas été pensés pour faciliter le déplacement. Une fois dehors les problèmes continuent."

"Trop de murs et pas assez de ponts"

Et ils sont nombreux, car l'espace urbain n'a pas été pensé pour permettre une circulation facile de tous. Rendre accessible la ville de demain passe donc peut-être d'abord par là.

Julie Desmares : "Il faut bannir les escaliers, privilégier les passages inclinés plutôt que des escalators qui peuvent tomber en panne. Aujourd'hui, on sait qu'on ne va pas pouvoir totalement exclure la voiture des centre-ville. Alors il faut élargir les trottoirs, ce qui se fait d'ailleurs dans de grandes villes européennes."

Camille Bourguignon : "Il faut pouvoir se mouvoir, se repérer et s'orienter plus facilement dans l'espace public. Cela passe par de l'information, et les nouvelles possibilités offertes par le numérique sont immenses, et par des aménagements urbains : ça pourrait passer par des matériaux clairs, des couleurs contrastées pour donner des repères visuels et des hauteurs raisonnables pour dégager les perspectives. C'est Isaac Newton qui disait "les hommes construisent trop de murs et pas assez de ponts", la ville accessible c'est une ville qui n'est pas cloisonnée."

Julie Desmares : "Tous ces aménagements permettraient de donner en plus un sentiment de sécurité à des personnes, je pense particulièrement aux personnes âgées, qui craignent la chute, la foule et l'exiguité. La ville accessible est une ville rassurante."

Mais l'urbanisme et l'architecture n'apporteront pas toutes les réponses.

Camille Bourguignon : "Les solutions architecturales, les normes de construction, qui devront évidemment être intégrées dès la conception, ne suffiront pas. Il faut que les personnes concernées soient entendues, que l'usage soit au centre de la réflexion."

Julie Desmares : "La communication est très importante. Pour certaines personnes, demander son chemin peut-être compliqué. En plus des solutions techniques d'information, il faut recréer un lien social ! Ca passe par des petits gestes comme aider une maman avec sa poussette. Pour que ces gestes se multiplient, il faut faire accepter la diversité des personnes. Et puis, pourquoi ne pas imaginer des agents dans la ville spécialisés dans l'aide à l'accès ?"

La ville accessible sera donc d'abord une ville conçue pour et par ses habitants.

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