La canopée, alliée exigeante face au défi climatique

Urbanisme -

Verdir la ville, oui, mais pas n'importe comment. La pérennité des plantations passe par la diversification des essences, la fidélité à l'esprit du lieu et le respect dû au vivant.

 

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Le plan Canopée de la métropole de Lyon suppose 300 000 plantations dans les dix ans à venir, pour atténuer le réchauffement et remédier aux carences des communes situées à l’Est.

Allégorie de l'arbre urbain face au défi climatique, le palmier central jaillit d'une toiture de yourte mongole - à moins qu'il ne s'agisse d'une case africaine. Cette année, pour la 17e édition de son jardin éphémère automnal sur la place Stanislas autour du thème « Terre ou désert ? », Nancy (Meurthe-et-Moselle) réinvente son patrimoine. « Le palmier, c'est notre histoire, depuis les collections de Stanislas, orientaliste et botaniste », décrypte Stéphane Harter, chef du service développement à la direction des parcs et jardins. Après une campagne des municipales rythmée dans toutes les villes par une surenchère de promesses d'arbres, les garants territoriaux du patrimoine végétal ramènent les élus à la réalité : aucune recette ne remplacera la réflexion culturelle et scientifique propre à chaque lieu.

« Par sa forme, le palmier ne conviendrait pas au renouvellement du parc de la Pépinière, créé par Stanislas. En revanche, depuis une dizaine d'années, nous plantons volontiers le carya ovata, d'origine américaine. Il s'adapte à une grande amplitude climatique, et sa silhouette s'apparente à celle de nos noyers », observe Yannick Andres, chef du service patrimoine arboré, avant d'adresser ce conseil à ses collègues des petites villes : « Visitez les jardins botaniques ! Vous y découvrirez des variétés issues de pays chauds qui ont prouvé depuis longtemps leur adaptation à nos climats. »

Projet d'une Ecole de l'arbre. Nancy approfondira sa démonstration les 18 et 19 juin prochains : rendez-vous quadriennal national consacré à l'arbre urbain, la troisième édition d'Embranchement se consacrera au défi climatique. Elle se tiendra au jardin botanique de Nancy, un des six espaces arborés remarquables de France, selon le classement de l'association Arbres (Arbres remarquables : bilan, recherche, études et sauvegarde). L'exceptionnelle densité de variétés d'exception y justifie le projet d'une Ecole de l'arbre, porté par le service des parcs et jardins.

La clé de la résilience de l'arbre urbain, c'est la diversité. Dans la métropole de Lyon, Frédéric Ségur, responsable du service arbres et paysages, travaille depuis trente ans sur le sujet : « Dès les années 1990, quand la maladie du chancre coloré est apparue, la métropole a commencé à remettre en cause la culture unique du platane, présent dans 75 % des voiries et jusqu'à 90 % dans certains arrondissements de Lyon », rappelle-t-il. Aujourd'hui, la palette métropolitaine comprend plus de 30 essences. Forte de 122 signataires en octobre 2020, une charte de l'arbre engage chaque maillon de la chaîne professionnelle à tenir les objectifs de qualité, à l'aube d'une décennie décisive : le plan Canopée métropolitain suppose 300 000 plantations d'ici à 2030 pour atténuer le réchauffement et remédier aux carences de l'Est lyonnais.

La Seine-Saint-Denis s'illustre. Les progrès des connaissances suffiront-ils à des collectivités moins bien outillées ? Pépiniériste et animateur du pôle paysage à la Fédération nationale des producteurs de l'horticulture et des pépinières, Michel Le Borgne redoute une « catastrophe » liée à l'inculture des acheteurs publics et à l'inadéquation du fascicule 35 du cahier des clauses techniques générales des marchés publics, en voie de réécriture. A côté des villes et intercommunalités, l'émergence de nouveaux donneurs d'ordres ouvre néanmoins un espoir illustré par l'un des départements les plus jeunes et les plus urbanisés de France : dans son plan Canopée adopté en mai pour dix ans, la Seine-Saint-Denis coche toutes les cases, à commencer par la diversité comme antidote à la vulnérabilité. Outre ses propres voiries, collèges et parcs, le département n'oublie ni les particuliers à travers des parrainages confiés aux enfants ni les entreprises incitées à planter pour le bien-être des salariés. Le lien établi entre arbre et désimperméabilisation des sols laisse espérer de bonnes conditions de développement.

Enfin, la collectivité met les moyens : 6 M€ d'investissements par an, soit dix fois plus que le budget consacré jusqu'alors aux arbres par le département. « Il faut produire un maximum d'effets tout de suite et préparer l'héritage de nos enfants », argumente Belaïde Bedreddine, vice-président chargé de la transition écologique.

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