Vous mettez en avant la qualité d’usage des bâtiments comme premier critère de jugement pour la 13e édition du prix AMO 2012 « Lieux de travail, architecture, environnement ». Pourquoi ?
Les maîtres d’ouvrage jugent trop souvent la qualité architecturale d’après les images des projets qui leur sont proposés. Or, ces images qui évoquent rarement leur contexte ne sont souvent que des perspectives flatteuses. Le regard est focalisé sur l’esthétique extérieure de l’objet qui ne peut suffire à apprécier sa qualité architecturale. Les lieux de travail, comme c’est le cas pour le logement, doivent aussi être appréciésdu point de vue de l’habitant. La maîtrise acoustique, la diffusion de la lumière naturelle, le travail sur l’ambiance intérieure, les vues depuis le poste de travail… sont aussi la raison d’être de l’architecture. L’environnement de l’homme au travail est au cœur du travail de l’architecte.
Les architectes ignorent-ils la qualité d’usage ?
Les architectes ne l’ignorent pas, mais bien souvent ils sacrifient l’architecture au diktat de l’esthétique extérieure et de la rentabilité des bâtiments. Le prix AMO veut montrer qu’il n’en est pas toujours ainsi et encourager les bonnes pratiques : ascenseurs vitrés, escaliers éclairés naturellement au moins sur les premiers niveaux, halls traversants, circulations ménageant des espaces de dialogue et d’attentes où il fait bon s’arrêter, parcours paysagers entre les espaces public et privé… figurent parmi les générosités que peut offrir un lieu de travail, qu’il soit bureau, hôpital, collège ou autre. Car travailler ne signifie pas cesser de vivre sa relation avec les autres.
Est-ce que cette qualité n’est pas le fait des grands programmes de bâtiments qui peuvent se les offrir ?
Bien au contraire. Les petits bâtiments aux programmes ordinaires ou non, mais qui connaissent leurs futurs utilisateurs, font souvent l’objet d’une attention poussée sur la qualité des espaces. En particulier parce que ce futur utilisateur est associé à la conception architecturale. A l’opposé, les immeubles de bureaux « en blanc », conçus pour un individu standard et absent lors de l’élaboration du projet, sont souvent le résultat de ratios économiques à courtes vues et sans concession à la qualité d’usage.
J’appelle les architectes et maîtres d’ouvrage des petits lieux de travail, comme des grands, à concourir au prix AMO sans limitation de surface, et sans complexe.