« Ce qu’il faut au BTP, c’est du courage », affirme d’entrée Rodolphe Deborre, directeur des innovations durables chez Rabot-Dutilleul, rejoignant ainsi les conclusions du premier jour d’échanges du Grand Paris Circulaire, début octobre : un changement d’échelle et de paradigme s’impose pour entrer dans l’économie circulaire.
Suivre les « bonnes pratiques » ne suffit plus. Il regrette que certaines solutions de recyclage de matériaux pourtant sans surcoût, comme les granulats recyclés, ne soient pas utilisées.
L’exemple : l’écoquartier de La Vallée à Châtenay-Malabry
Lors de la table ronde sur « Les enjeux de l’économie circulaire pour le BTP sur le territoire métropolitain », l’exemple de l’écoquartier de la Vallée à Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine) a été présenté. Sous l’impulsion de la Ville, une société d’économie mixte à opération unique (Semop) dont Eiffage est actionnaire à 66 %, a été créée pour le projet. Sur les 20,6 hectares de l’ancien site de l’Ecole centrale, 2 200 logements dont 16 % de logements sociaux, ainsi que 40 000 m2 de bureaux et 15 000 m2 de commerce vont voir le jour.
Franck Faucheux, directeur des innovations chez Eiffage Aménagement, pointe l’économie réalisée par le concassage du béton sur place : 50 000 m3 de granulats ont été obtenus à partir de 90 000 m3 de gravats. Si le procédé est coûteux à mettre en place, le bilan global s’avère positif car bien moins de camions ont circulé pour l’évacuation des déblais. Franck Faucheux a d’ailleurs déploré, au passage, qu’aucun livret biodiversité n’existe sur les chantiers.
Utilisation de matériaux bas carbone
Le projet innove aussi par l’utilisation, dans les constructions futures, de matériaux bas carbone : béton en terre crue ou matériaux biosourcés comme pour l’école Notre-Dame de Bon Secours en Belgique, où la structure en bois est remplie de terre et de paille (De Graeve, filiale d’Eiffage, entreprise).
Enfin, la filière de la déconstruction a particulièrement retenu l’attention. Des normes existent. A La Vallée, l’association Reavie a créé trois CDI et ainsi une nouvelle compétence en réutilisation de matériaux. Mais comment disposer à plus grande échelle d’une banque des matériaux disponibles ?
Une solution numérique pour la déconstruction sélective
Suez et Resolving ont développé BatiRIM, une solution digitale de déconstruction des bâtiments. Elle localise, qualifie et quantifie les matières présentes dans les édifices à rénover ou déconstruire.
Ces données sont dirigées vers une plate-forme collaborative, en partage avec les acteurs du recyclage. La solution implique même une modélisation en 2D et 3D.
Besoin d’un référentiel commun
En conclusion, pour Christophe Gobin, ce nouveau paradigme nécessite un étalonnage : le secteur a besoin d’un référentiel commun pour instaurer de la confiance. Ici, il faut un outil « d’analyse de cycle de vie » dont les parties prenantes doivent pouvoir mesurer l’efficacité réelle.
Mais une simplification s’impose : l’économie circulaire ne doit pas être un label de plus. Au contraire, elle doit être l’occasion de refondre et simplifier l’ensemble des labels de construction et les donneurs d’ordre doivent en profiter pour afficher un résultat à atteindre.