Balise lumineuse dans la capitale islandaise, à la frange entre la terre et la mer, entre le calme du paysage et l’intensité de la vie urbaine, le centre Harpa est emblématique de l’essor de la ville et de la reconquête du port. En 2005, l’agence danoise Henning Larsen Architects (HLA) remporte le concours international lancé sous forme de PPP pour la conception de cet équipement culturel dédié à la musique, et centre de conférences d’envergure, ainsi que du plan de développement urbain de la zone est du port de Reykjavik. Participaient également Jean Nouvel, Norman Foster, et les Danois Schmidt Hammer Lassen. En 2008, la crise économique oblige l’État et la Ville de Reykjavik à soutenir financièrement le projet afin qu’il puisse voir le jour. L’objectif du projet urbain qui comporte également une nouvelle place publique, une artère commerçante, un hôtel, des logements, des équipements éducatifs et des activités mixtes, est de régénérer ce vaste quartier portuaire en déshérence et à instaurer une nouvelle relation entre le port et la ville. La conception du centre Harpa s’inscrit dans ce plan d’urbanisme. C’est un catalyseur décisif de la revitalisation de la zone portuaire à l’instar du Musée Aan de Stroom de Neutelings et Riedjik à Anvers. Son implantation solitaire dans un site exposé avec vue sur la mer et la montagne constitue un geste d’invitation vers la ville. De jour, son espace extérieur public accueille l’animation urbaine. Dès la tombée de la nuit, le bâtiment révèle en lumière les manifestations qu’il abrite et contribue à l’animation nocturne.
Conçu pour offrir une grande flexibilité
Pour accueillir l’orchestre symphonique d’Islande et l’opéra national, il fallait une salle de concert de grande qualité. Le pianiste Vladimir Ashkenazi a accepté de jouer le rôle de conseiller musical auprès de la maîtrise d’ouvrage. Mais le nouvel équipement est néanmoins conçu pour offrir une grande flexibilité, sans porter préjudice à ses qualités acoustiques, afin de pouvoir accueillir toutes sortes de manifestations officielles, événements publics, etc. La construction est en béton, excepté le système de façade et toiture entièrement en acier et verre. L’organisation du programme, qui prévoyait quatre grandes salles et de nombreuses annexes, est aisément lisible. Dès l’entrée depuis la vaste place publique, le visiteur perçoit le grand hall avec son escalier menant au premier niveau avec les trois salles majeures. Le plan se développe selon un axe est/ouest qui partage l’équipement en une zone technique au nord et une zone publique au sud, assurant à ce bâtiment complexe un fonctionnement logistique finalement assez simple. Les salles ont leur propre identité mais appartiennent à la conception d’ensemble. Elles disposent toutes d’équipements acoustiques modulables afin de répondre aux exigences variées des activités.
Les trois principales sont implantées côte à côte au premier niveau. La grande salle de concert, qui peut accueillir 1 800 spectateurs, est un volume rectangulaire habillé de panneaux de hêtre laqué rouge dont les capacités de réverbération peuvent être augmentées jusqu’à 30 % grâce à des chambres modulables. Elle dispose d’un vaste foyer sur deux niveaux où peuvent se dérouler expositions et réceptions diverses. La salle de conférences de 750 places est multifonctionnelle et peut se subdiviser en deux volumes. Elle est autonome ou peut être combinée avec la salle de banquet et celle de répétition. Avec sa vaste surface, ses tribunes rétractables et son gril technique modulable, ce volume est configuré pour accueillir toutes sortes de manifestations, concerts, conférences, expositions et spectacles. Orientée vers l’ouest, une vaste mezzanine qui surplombe le foyer permet au public de profiter en été des couchers de soleil pendant les entractes. La salle de répétition de 450 places, qui est logée entre ces deux volumes majeurs, est également polyvalente. Elle peut accueillir un public debout ou assis pour des concerts, des représentations, des expositions, des banquets… Au rez-de-chaussée, une quatrième salle, de taille plus réduite (200 places), est prévue pour les petits ensembles, la musique de chambre, le chant et le jazz. Ses parois sont revêtues d’éléments acoustiques et de panneaux identiques à ceux de la salle de répétition. Au rez-de-chaussée toujours, outre deux petites salles de conférences, des programmes complémentaires sont destinés à l’accueil du public tels boutique, bar, restaurant avec mezzanine et vue sur le port, cafétéria, cantine, ainsi qu’un parc de stationnement souterrain. À l’arrière des salles sont implantés les bureaux, l’administration, les loges et les vestiaires.
Système modulaire autoporteur
En contraste total avec le bloc intérieur massif qui recèle les volumes fermés des salles, les façades et la toiture enveloppent le bâtiment d’une membrane transparente et dynamique. La structure inédite des façades résulte de la coopération étroite entre les architectes et l’artiste islando-danois Olafur Eliasson. Le principe structurel de cette enveloppe est basé sur un élément appelé « Quasi Brick » par ses concepteurs, mis en oeuvre en façade sud. Ce système modulaire autoporteur est composé d’éléments de verre et acier à douze faces, empilés selon des angles d’inclinaison variés. Le bâtiment apparaît ainsi comme un kaléidoscope lumineux. Pour les autres façades comme pour la toiture, une variante de cet élément a été développée en deux dimensions cette fois, afin d’assurer l’unité visuelle du bâtiment. De cette figure géométrique sont issus des éléments structurels à cinq ou six côtés. L’objectif de ce sytème de toiture et façade était de dématérialiser le bâtiment afin de tirer parti des couleurs environnantes : les lumières changeantes du ciel, de l’océan, et de la ville. La perception de la façade varie selon l’angle de vision. Le bâtiment apparaît avec ses multiples effets colorés et ses reflets intenses ou subtils, surprenants et caractéristiques d’un projet édifié dans une ville nordique à une latitude proche du cercle polaire arctique.
LIEU : Reykjavik, Islande.
MAÎTRISE D’OUVRAGE : Harpa / Portus Group, opérateur et investisseur dans le cadre du PPP.
MAÎTRISE D’OEUVRE : Henning Larsen Architects– Peer Teglgaard Jeppesen, associé en charge du projet, Osbjorn Jacobsen, associé, directeur de projet, Klavs Holm Madsen, chef de projet ; Batteriid Architects, architectes associés / Landslag efh, architectes paysagistes / Olafur Eliasson, artiste / ArtEngineering, Mannvit, Hnit, Rambøll, Efla, ingénieurs / Artec Consultants, BET acoustique / Vladimir Ashkenazy, pianiste, conseil artistique.
PROGRAMME : centre de concert et de conférences.
SURFACE : 28 000 m2.
CALENDRIER : concours 2005, chantier 2007-2011, inauguration août 2011.
ENTREPRISE : IAV, entreprise générale.