Jurisprudence

Interdiction d’imposer l’attribution de marchés publics distincts à la même entreprise

Dès lors que l’acheteur public a décidé de passer des marchés séparés, il ne peut pas soutenir devant le juge du référé précontractuel que le recours à un contrat global était possible. Le Conseil d’Etat l’a affirmé dans un récent arrêt.

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Allotissement des marchés publics
Marchés publics
Conseil d'Etat (CE)Décision du 2015/09/18N°389740

En principe, un acheteur public doit allotir ses marchés publics (art. 10 du Code des marchés publics). Par exception, il peut décider de passer un marché global « s'il estime que la dévolution en lots séparés est de nature, dans le cas particulier, à restreindre la concurrence, ou qu'elle risque de rendre techniquement difficile ou financièrement coûteuse l'exécution des prestations ou encore qu'il n'est pas en mesure d'assurer par lui-même les missions d'organisation, de pilotage ou de coordination » (art. 10 al. 2). Le principe de l’allotissement ainsi que les conditions de recours à un marché global s’appliquent aux groupements de commandes au même titre qu’un acheteur public ordinaire explique le Conseil d’Etat dans un arrêt de principe du 18 septembre 2015.

En l’espèce, un syndicat intercommunal des eaux avait lancé une procédure de passation d'un marché à procédure adaptée en tant que coordonnateur d'un groupement de commandes en vue de la réalisation de travaux d'aménagement d'une rue communale. Les documents de la consultation faisaient état de trois marchés distincts - le premier serait conclu avec le syndicat intercommunal et les deux autres avec la commune membre. Le règlement de la consultation imposait leur passation avec le même entrepreneur ou groupement d'entrepreneurs. Le juge du référé précontractuel a annulé la procédure. Le syndicat intercommunal porte l’affaire devant le Conseil d’Etat.

L’allotissement applicable au groupement de commandes

La haute juridiction rappelle tout d’abord que le principe de l’allotissement et les conditions de recours au marché global sont applicables aux groupements de commandes légalement constitués. Pour rappel, un groupement de commandes peut être formé entre des collectivités et des établissements publics locaux (art. 8 du CMP) - tel est le cas en l’espèce. Néanmoins, le syndicat coordonnateur du groupement « ne pouvait légalement prévoir que les trois marchés distincts qui devaient être conclus devaient l'être avec le même attributaire ». Le Conseil d’Etat rejoint la position du juge du référé précontractuel. Il ajoute par ailleurs que l’acheteur ne pouvait pas demander au juge de l’urgence de rechercher si le recours à un marché global était possible « dès lors, […] qu'il avait lui-même décidé de passer trois marchés distincts ». Le juge n’avait donc pas à répondre à son « argumentation tirée des difficultés techniques que soulèverait l'allotissement des prestations ». Le Conseil d’Etat rejette les demandes du syndicat.

Cet arrêt de principe est une piqûre de rappel pour les acheteurs publics. Ils ne peuvent pas contourner le principe de l’allotissement, ni les conditions de recours à un marché global en faisant des marchés publics distincts. Les groupements de commandes n’échappent pas à ces règles. La vigilance doit être de mise dans le choix du marché à lancer.

CE, 18 septembre 2015, n° 389740

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