Inondations : les vallées se reconstruisent autrement

Deux ans après le passage de la tempête Alex, les vallées sinistrées des Alpes-Maritimes cherchent des voies nouvelles d'aménagement dans le respect de leurs rivières.

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A Breil-sur-Roya, des travaux visent à laisser à la rivière de la place pour s’épandre.

Plus de deux ans après les crues torrentielles de la Roya, de la Tinée et de la Vésubie provoquées par la tempête Alex, dans la nuit du 2 au 3 octobre 2020, les traces de la catastrophe sont encore visibles, modifiant à jamais les paysages, la morphologie des cours d'eau et la composition de villages dont des parties entières ont été emportées.

Mais un avenir s'offre à ces vallées, situées en amont de Nice et de Menton, dans le sud-est des Alpes-Maritimes. A la fin de l'année, grâce aux 149 M€ de la dotation de solidarité, aux 100 M€ de crédits spécifiques « résilience » de l'Etat et aux 60 M€ du fonds de solidarité de l'Union européenne, les trois collectivités concernées (1) auront reconstruit, avec le concours des experts du comité de résilience spécialement mis en place, 80 % des infrastructures capables de résister à de nouveaux événements météorologiques violents. « La reconstruction à l'identique n'était pas une réponse pertinente. La procédure du “porter à connaissance” du risque quatre mois après la catastrophe a été l'outil réglementaire pour formaliser l'aléa nouveau et guider la reconstruction résiliente et durable », pose Xavier Pelletier, préfet chargé de la reconstruction.

 

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Conformément à cette stratégie, les collectivités et l'Etat ont élaboré des schémas d'ensemble au titre de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations (Gemapi) avec comme principe de laisser aux cours d'eau une largeur suffisante, entre 30 et 60 m selon les cas. Enfin, le préfet a voulu permettre aux villages sinistrés de penser le futur.

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A cette fin, la direction départementale des territoires et de la mer des Alpes-Maritimes (DDTM 06) a adapté le dispositif « Mieux reconstruire après inondations » - conçu à l'origine pour des crues à cinétique lente - aux aléas torrentiels pour la traversée de Fontan. Avec l'aide de l'architecte Fabien Gouret, associé à un hydraulicien, l'Etat a travaillé à la conservation et au confortement des maisons endommagées plutôt qu'à leur démolition comme l'impose leur exposition au risque de crues torrentielles. « Leur destruction s'avérait complexe, car elles sont intimement imbriquées aux autres tènements immobiliers qui forment finalement un tout. La création de dents creuses aurait fortement dégradé l'esthétique du village et déstabilisé davantage les bâtiments », explique Xavier Pelletier. A ensuite été imaginé un mode de financement spécifique : le fonds Barnier finance à hauteur de 80 % les travaux de confortement et de reprise des fondations des maisons ; le syndicat mixte pour les inondations, l'aménagement et la gestion de l'eau (Smiage), en charge de la Gemapi, prend à sa charge les travaux de protection des berges consistant à réaliser un mur fondé à 1,5 m en dessous du cours d'eau pour éviter les affouillements.

Prudence de l'Etat et envie des maires. Avec la même intention d'inventer des formes d'aménagement et de construction éco responsables, la DDTM 06 a confié en juillet 2021 au groupement conduit par l'architecte- urbaniste Eric Daniel-Lacombe la mission de définir des principes d'aménagement avec les maires de 10 communes. « La méthode itérative mise en place via une série de trois ateliers dans chaque village visait à marier prudence de l'Etat et envie des maires de retrouver une habitabilité. Dans les vallées de la Roya et de la Vésubie, par exemple, il sera nécessaire de contrôler le retour progressif de la rivière vers son lit d'équilibre en créant des ouvrages limitant les dépôts solides en amont de villages qui pourraient sinon être menacés par de nouvelles inondations », estime Eric Daniel-Lacombe.

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A Saint-Martin-Vésubie, commune durement frappée avec 90 maisons détruites et 70 à démolir, les échanges ont abouti au projet de trois hameaux de 15 maisons chacun aménagés sur le site de La Mério, sur la rive droite du Boréon, en amont du village. Construit dans le respect de la pente, en surplomb de la rivière, l'ensemble dialogue avec la rive opposée du ruisseau, où le tissu urbain est beaucoup moins dense. A Breil-sur-Roya, la proposition a consisté à créer un parc tout au long de la rivière et à construire des parkings silo servant à la fois de stationnement et de transparence hydraulique. Sur la base de ces propositions, l'Etat va transmettre aux communes concernées des documents qui formaliseront les projets en intégrant les points réglementaires à prendre en compte afin de permettre aux maires de les faire entrer dans une phase opérationnelle. Après l'urgence de la réparation, arrive aujourd'hui le temps long de l'urbanisme et de la résilience.

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