Ingénierie : à la recherche du procédé adapté aux fumées

Le captage reste le principal enjeu technique de la chaîne CCS. Les acteurs misent sur l'arrivée à maturité de nouvelles solutions et le développement de la filière pour faire baisser les coûts.

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Le démonstrateur DMX a été testé pendant un an sur le site d’Arcelor-Mittal à Dunkerque.

Plusieurs techniques initialement développées pour le traitement du gaz naturel permettent d'extraire le dioxyde de carbone (CO2) des fumées industrielles produites par la combustion d'énergies fossiles. La plus mature et la plus employée aujourd'hui est le captage postcombustion qui consiste à « laver » les fumées grâce à un solvant généralement à base d'amines, des composés organiques dérivés de l'ammoniac. Ce solvant capte les molécules de CO2 puis les libère après chauffage. Le gaz est ensuite compressé ou liquéfié puis transporté par camion, bateau ou canalisation vers son site de stockage.

Mais tout cela revient cher : « Les coûts estimés varient de 80 à 180 € la tonne, transport et stockage compris », rappelle Florence Delprat-Jannaud, présidente du Club CO2 qui réunit les acteurs de la filière captage et stockage du carbone (CCS). A titre de comparaison, la tonne de carbone valait 65 € début juillet sur le marché européen. Déployer cette filière à grande échelle nécessite donc de réduire son coût, et vite. « Dans une unité aux amines, les dépenses d'exploitation les plus élevées proviennent de la vapeur nécessaire pour que le CO2 se “décroche” du solvant », explique Vania Santos-Moreau, qui dirige le projet DMX à l'Institut français du pétrole et des énergies nouvelles (Ifpen).

DMX est un démonstrateur installé en avril 2023 dans l'usine sidérurgique d'Arcelor-Mittal à Dunkerque (Nord). Un an de fonctionnement a permis de valider un procédé qui, en protégeant le solvant, permet de le réutiliser tout en réduisant fortement la quantité d'énergie nécessaire. « Nous consommons 2 à 3 gigajoules par tonne produite contre 4 GJ/tCO2 pour le solvant de référence qu'emploient la plupart des acteurs », se félicite Vania Santos-Moreau. L'Ifpen et ses partenaires étudient d'autres moyens de réduire leur consommation d'énergie, comme la récupération de la chaleur fatale et la réutilisation du gaz restant après extraction du carbone.

Oxycombustion et cryogénie. « Les performances des solutions par solvants dépendent beaucoup de la nature des fumées industrielles, précise Florence Delprat-Jannaud. Celles-ci contiennent de l'eau, du CO2, de l'azote mais aussi d'autres particules comme de l'oxygène, du dioxyde de soufre ou des oxydes d'azote. Plus une fumée est concentrée en dioxyde de carbone et moins elle contient d'autres particules, plus le captage est facile et les coûts réduits. Chaque industrie doit donc étudier la palette de procédés à sa disposition pour trouver celui qui sera le plus adapté à ses fumées. » Une cimenterie aura ainsi plus intérêt à adopter l'oxycombustion (combustion à l'oxygène et non à l'air), produisant des fumées constituées de vapeur d'eau et de CO2, qui devient facile à extraire. Mais les techniques de production de l'oxygène sont soit gourmandes en énergie, soit peu matures.

En France, la start-up Revcoo utilise la cryogénie, qui consiste à geler une partie du CO2 puis à utiliser ce froid pour liquéfier celui qui reste dans les fumées. La jeune entreprise a installé en 2022 une unité dans une carrière de chaux d'Eiffage. « La filière CCS existe mais elle encore modeste, relève Florence Delprat-Jannaud. Son déploiement permettra de gagner en apprentissage et d'accélérer les mises à l'échelle. La baisse des coûts passe par là, avec les améliorations technologiques. »

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