Les entreprises d’ingénierie s’alarment. « La suspension d’un grand nombre d’appels d’offres pourrait rendre la sortie de crise encore plus chaotique », assure Pierre Verzat, président de la fédération Syntec-Ingénierie.
C’est pourquoi elles appellent les donneurs d’ordres, pouvoirs publics « désorganisés » par le report du second tour des élections municipales comme maîtres d’ouvrages privés « frileux », à poursuivre leurs projets d’investissements.
En effet, « d’un côté les collectivités restent dans une situation incertaine. Les dossiers immobiliers ne sortiront qu’après les élections municipales. Les clients industriels sont prudents quant à l’idée d’avancer des projets. Tandis que la promotion est paralysée par la suspension des instructions de permis de construire », explique le président de Syntec-Ingénierie.
Autant de situations qui ont des impacts collatéraux sur les entreprises d’ingénierie. « Dans les sociétés de service, la charge de travail diminue très rapidement si elle n’est pas alimentée en permanence. En un mois, nos entreprises sont déjà bien endommagées. L’arrêt des appels d’offres pourrait les contraindre à mettre leurs collaborateurs en chômage partiel. Si ça continue comme ça, en mai, elles devront lancer des plans de sauvegarde de l’emploi ou des plans de départ volontaire », craint Pierre Verzat. La fédération demande donc le maintien des appels d’offres en cours et à venir.
Les entreprises d’ingénierie sont prêtes à répondre
Face à la crise due au coronavirus, « il en va de la responsabilité des donneurs d’ordre de maintenir l’économie de la filière et le tissu de PME, prêt à répondre », indique Pierre Verzat.
Massivement réorganisée autour du télétravail, la profession qui emploie 312 000 collaborateurs reste mobilisée pour travailler sur l’étude et la conception de nouveaux projets industriels et de construction. « Ces entreprises sont à l’heure sur la transformation digitale. Leurs réseaux sont en place et elles sont en capacité de travailler sur des outils lourds comme des logiciels de CAO, DAO et même du BIM. Les opérationnels sont parties avec leurs calculateurs pour stocker leurs données de masse », témoigne Pierre Verzat, avant de poursuivre : « Leur capacité d’étude est quasi nominal. Elles ont conservées une grande partie de leur projet et restent en mesure d’accompagner les décideurs sur les phases d’avant-projets ».
Analyses financières, de risques, d’implications environnementales, études visant à la conception technique… sont autant de prestations intellectuelles qui peuvent être assurées par voie dématérialisée. Et qui sont longues. « Ces phases d’études peuvent prendre plusieurs mois, voire une année entière dans le cas de projets d’infrastructures », explique le président de la fédération. « Elles doivent se poursuivre, sans quoi il n’y aura pas d’effets de leviers sur les chantiers et la relance en sera d’autant plus retardée », alerte-t-il.
Pour l’heure, avec la sortie du guide de préconisation de l’OPPBTP, les ingénieurs vont devoir plancher sur une autre urgence : redémarrer les chantiers en sûreté sans risque que les salariés les poursuivre pour mise en danger.