Quelles sont les mesures prises par l’équipe de Syntec-Ingénierie face à la crise ?
Notre syndicat compte une douzaine de permanents, qui travaillent tous de chez eux depuis lundi 16 mars. Nous sommes tous mobilisés sur le sujet de l’épidémie et nous suivons attentivement chaque jour les annonces gouvernementales.
Nous avons organisé deux conseils d’administration extraordinaires ainsi que des réunions en visio-conférence avec les six bureaux du groupe, afin de prendre les dispositions qui s’imposent. Ces réunions nous ont aussi permis de récolter les informations du terrain sur comment nos entreprises font face à l’arrêt des chantiers.
De quelles façons les entreprises d’ingénierie sont-elles impactées ?
Nos métiers ont l’avantage et la chance de pouvoir délivrer des prestations intellectuelles, ce qui nous permet pour partie de mettre à profit le télétravail pour avancer certains dossiers. Mais cette organisation risque de s’étouffer d’ici deux ou trois semaines. Réussirons-nous à travailler dans un univers complètement virtuel "à la Matrix" ? Je n’en suis pas certain. Quant à notre deuxième volet d’activité, qui consiste à intervenir sur les chantiers, il est lui massivement touché.
Alors que tous les chantiers sont à l’arrêt ou presque, que préconisez-vous à vos adhérents ?
Nous sommes tributaires des volontés des maîtres d’ouvrages, qui évoluent et se modifient au gré de la situation. L’absence de notification officielle d’arrêt des chantiers pose aussi des problèmes contractuels. Finalement, seuls certains chantiers indispensables (comme par exemple les travaux de maintenance de trains et métros) sont encore en activité. Sur ceux-là, nous devons définir en urgence un mode opératoire afin d’y appliquer les mesures barrières et éviter tout risque de transmission du virus. Il s’agit par exemple de voir comment deux personnes qui travaillent sur la même machine doivent se passer les matériaux, etc. Le stress des salariés et chefs d’entreprises est palpable, personne ne veut risquer sa santé ni mettre en danger celle de ses collaborateurs.
Dans votre communiqué, vous appelez le gouvernement à amplifier ses mesures de soutien aux entreprises. Pouvez-vous préciser ?
Nous saluons les engagements de la BPI ainsi que les mesures gouvernementales relatives au décalage des paiements et à la possibilité de recours au chômage partiel. Néanmoins, si les entreprises se retrouvent trop longtemps à payer leurs salariés sans activité, elles risquent de ne pas s’en remettre. Elles ne peuvent pas non plus s’en séparer afin de préserver leur force de travail pour la reprise d’activité. Qu’en est-il aussi de nos administrations, qui ne sont pas forcément aussi dématérialisées que nous ? Il reste difficile de procéder à distance aux signatures de visa ou aux paiements par exemple. Dans ce contexte, les plans de relance risquent de s’avérer insuffisants.
Telle est bien la principale angoisse de nos adhérents : ils ont peur de ne pas se remettre de la crise ! Cette crise sanitaire inédite met aussi à mal leur santé économique. Le président de la République l’a annoncé dans son allocution du 16 mars au soir : nous sommes en guerre. Comme en juin 1940, les entreprises ne savent pas si elles survivront au lendemain. Pour elles, perdre un mois de travail, c’est énorme. Perdre deux mois, c’est mortel. Nos trésoreries ne seront pas suffisamment importantes pour absorber le choc. Nous appelons donc le gouvernement à ne pas flancher sur les mesures qu’ils ont prises, à les tenir et à les rendre simples et lisibles.
Comment envisagez-vous la suite ?
Nous devons d’ores et déjà préparer l’après crise. Ce qui est certain, c’est que nous en sortirons transformés. Cette épidémie frappe fort. Une partie de nos adhérents sont en contact avec l’international. Nous découvrons tous les mêmes problèmes. Le monde entier se retrouve confiné. Nous resterons tous marqués par cette épreuve après laquelle nous aurons à nous reconstruire.
Combien de temps durera la crise ? Si nous arrivons à en sortir, comme cela commence à être le cas en Chine où des mesures draconiennes ont été employées, peut-être serons-nous plus tranquilles en juin. Comment l’économie va-t-elle redémarrer ? Lentement, me semble-t-il. Il faudra vraisemblablement continuer d’appliquer des mesures barrières sur les chantiers (et au-delà), car le virus continuera de roder. Nous ne pouvons pas prédire l’avenir, mais il est probable que nous ayons à adapter nos processus de travail sur toute la seconde moitié de l’année, pour reprendre l’activité en sécurité. La récession économique pour 2020 semble inévitable.