Gestion de l'eau : « Pour en finir avec les réseaux fuyards, nous avons pris le taureau par les cornes », Marie-Laure Mugnier, maire de Saint-Paul-de-Tartas

L’eau et l’assainissement ont concentré une part essentielle des investissements communaux de Saint-Paul-de-Tartas (215 habitants, 1200 m d'altitude, Haute-Loire), durant le mandat municipal qui s’achève. Le rendement du réseau potable passe de 40 à 100 %, grâce à deux tranches de travaux qui mobilisent plus de 5 M€ entre 2021 et 2027.

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Marie-Laure Mugnier

L’investissement communal en cours dans l’eau et l’assainissement vise à sécuriser votre territoire pour 60 à 70 ans. Cet effort ne rejaillit-il pas sur les marges de manœuvre municipales, pour les années à venir ?

Notre commune de montagne souffrait d’un important retard. Cette situation la plaçait au pied d’un mur de plus en plus haut, compte tenu du changement climatique. J’ai engagé ce programme avec la conviction qu’il est encore temps d’agir, mais que si on attendait, on n’y arriverait plus.

Avant même la sécheresse de 2022, la chute de la capacité des captages avait contraint la commune à recourir au citernage. Cela m’a décidé à prioriser la quantité et la qualité de la ressource, pour ce mandat. Il fallait cesser de mettre autant d’argent dans le fonctionnement d’un réseau d’eau potable dont la rentabilité atteignait 40 %, et inciter fortement à la maîtrise des usages.

Notre commune compte 60 % de résidences secondaires, et pour une famille de quatre personnes, nous enregistrons une consommation quotidienne de 120 m3 pour ces dernières, au lieu de 80 pour les résidences principales.

J’ai engagé ce programme avec la conviction qu’il est encore temps d’agir, mais que si on attendait, on n’y arriverait plus.

—  Marie-Laure Mugnier, maire de Saint-Paul-de-Tartas

Avez-vous pu compter sur des aides ?

Dès la première phase chiffrée à plus de 900 000 euros entre 2021 et 2023, le cumul des financements extérieurs a atteint près de 50 % apportés par France Relance, par l’Agence de l’eau et par le département. Nous avons choisi de commencer par le plus difficile, c’est-à-dire les villages les moins denses, réputés les plus chers par nombre d’habitants desservis, avec un seul chantier pour quatre objectifs : l’eau potable, l’assainissement, la gestion pluviale et l’éclairage public.

La deuxième phase poursuivra la même démonstration entre 2025 et 2027 dans les villages plus denses, pour un montant de 4,25 M€. Outre les subventions et la part d’autofinancement, nous avons contracté un emprunt sur 30 ans avec le Crédit mutuel. Grâce à la péréquation départementale de solidarité, la commune réduit ses annuités à 26 000 €.

Tout en montant ces dossiers, vous avez forcément réfléchi à la compétence intercommunale qui devait s’imposer à partir du 1er janvier 2026…

A l’idée de voir des entreprises arriver devant leur compteur d’eau, beaucoup de gens avaient peur. Allait-on percer leurs murs ? Les salariés ont pris le temps d’écouter et de rassurer

—  Marie-Laure Mugnier, maire de Saint-Paul-de-Tartas

Cette question s’est croisée avec celle du prix de l’eau, qui a nécessité un important effort pédagogique. Le m3 est passé de 80 centimes à 1,30€, entre 2020 et 2024.

La communauté de communes des pays de Cayres-Pradeles n’a pas la même approche que la nôtre, au sujet des besoins d’investissement et du devoir de vigilance demandé aux habitants. Elle privilégie une politique de gros volumes et de prix bas. En cas de transfert, nos collègues nous auraient demandé de baisser les tarifs. Cela m’aurait gênée. Nous savons gérer en régie, grâce à la compétence de notre agent.

L’agence de l’eau Loire-Bretagne n’a-t-elle pas exercé une pression en faveur d’une maîtrise d’ouvrage intercommunale ?

Après les pénuries de l’été 2022, un dogme est tombé : l’Auvergne n’est pas une fontaine inépuisable. Le plan eau, à l’échelle nationale, et le plan résilience de l’Agence de l’eau ont favorisé une logique de transfert, dans une démarche constructive de dialogue et de main tendue que nous avons appréciée. Cela s’est traduit dans une convention tripartite entre la commune, la communauté de communes et l’agence de l’eau. J’y ai vu un encouragement à la prise de conscience des élus ruraux sur la nécessité d’agir, face au changement climatique. On est bien accompagné, quand on a envie de faire !

Outre les sécheresses récurrentes, votre territoire fait face à des précipitations de plus en plus violentes, comme l’a montré l’épisode du 17 juin dernier. Vos investissements en tiennent-ils compte ?

Les deux lagunes qui contribuent à l’assainissement communal fonctionnent d’une manière non optimale, pendant de tels épisodes. Des refoulements entraînent des inondations dans certaines habitations. Le ralentissement des écoulements fait partie du programme de modernisation de notre réseau en fin de vie. D’autres sites appellent des interventions pour éviter les stagnations. L’approche globale de l’eau, de l’assainissement et des réseaux électriques facilite la mise en œuvre des bonnes solutions.

Y compris pour les captages ?

Nous reprenons chacun des quatre, un par un. Sur deux d’entre eux, d’anciennes déclarations d’utilité publique sont tombées en désuétude, faute d’expropriations en temps utile. Cela nous a conduits à engager une nouvelle procédure, qui vient de s’achever, pour assurer la maîtrise foncière des périmètres de protection. Nous enregistrons une augmentation sensible du volume de nitrates, en raison de pratique culturales non maîtrisées.

Comment les habitants ont-ils vécu la première phase de travaux ?

A l’idée de voir des entreprises arriver devant leur compteur d’eau, beaucoup de gens avaient peur. Allait-on percer leurs murs ?

Les salariés ont pris le temps d’écouter et de rassurer. Ils ont parfois décidé de finir les chantiers à la pioche, pour éviter d’effrayer papi et mamie. Les problèmes se sont toujours résolus de façon positive, dans le sens d’un allégement des soucis, à l’inverse de ce qui se passe souvent dans les relations entre les citoyens et les administrations. J’ai vu beaucoup de jeunes employés désireux de montrer leur envie que tout se passe bien. Du coup, je n’ai pas d’inquiétude pour la phase suivante.

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