Financement du rail : les Régions de France lancent la bataille

La remise à plat du financement du réseau ferré a commencé le 18 décembre au Sénat. Comme elles l’avaient annoncé fin septembre lors de leur congrès de Saint-Malo, les Régions de France ont lancé dans ce but « les assises de la mobilité ferroviaire et de l’intermodalité ». Elles espèrent un aboutissement du processus au printemps 2024.

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Carole Delga
Carole Delga, présidente de Régions de France et de la région Occitanie, avec Franck Leroy (Grand Est) à sa droite, le 18 décembre aux assises de la mobilité ferroviaire et de l'intermodalité.

« L’urgence démontrée appelle une mixité de solutions ». Présidente de Régions de France, Carole Delga a clôturé en ces termes la première partie d’une journée placée sous le signe de l’enthousiasme, le 18 décembre au Sénat : l’association d’élus fête ses 25 ans. Acquise à l’issue de la Loi d’orientation des mobilités de 2019, la pleine compétence en matière de transport public – y compris les dessertes routières interurbaines et scolaires –donne aux régions la légitimité pour appeler à repenser un cadre de financement inadapté aux ambitions de décarbonation qui reposent au premier chef sur le mode le moins polluant : le rail.

Réformer les péages

« Actuellement, nous finançons l’infrastructure à la place de l’Etat. Certes, ce dernier a porté son apport annuel de 2,8 à 3,5 Mds€. Mais le besoin se situe à 10 Mds€ par an pendant 10 ans, car aujourd’hui, nous prenons en pleine figure 40 ans de tout TGV », diagnostique Franck Dhersin, vice-président des Hauts-de-France en charge des Transports.

La mixité des solutions financières passe en premier lieu par la refonte des péages facturés aux régions par la SNCF, en proportion de l’utilisation des lignes. « Quand les citoyens découvrent que sans même avoir la propriété de l’infrastructure, plus on fait circuler des trains, plus on plombe nos comptes, ils en concluent que les politiques sont dingues », grince la présidente de Régions de France.

Lisser les impacts

A propos du partage des investissements, « l’Etat doit donner plus », confirme Carole Delga, à l’unisson de l’ensemble des acteurs réunis pour le lancement des « Assises de la mobilité ferroviaire et de l’intermodalité ». Mais au-delà de l’équilibre des charges, son espoir porte sur « les nouvelles modalités de portage qui permettent d’étaler les impacts dans le temps ».

Ce commentaire vaut approbation de l’extension géographique des compétences de la société du Grand Paris, rebaptisée Société des grands Projets, comme prévu par la loi sur les Services express régionaux métropolitains (Serm) que le Sénat examine ce même 18 décembre, dans la foulée de la commission mixte paritaire conclusive, puis du vote de l’Assemblée nationale, le 15 novembre dernier. En complément, le lissage des impacts reposera aussi sur les prêts de la Banque des territoires.

Passe d’armes sur le versement mobilité

Si la présidente de Régions de France s’est gardée d’insister sur l’inévitable débat à venir concernant le Versement mobilité (VM), le sujet a néanmoins pris toute sa place lors de la matinée de préfiguration des assises. Vice-président de la Nouvelle-Aquitaine et président de Nouvelle-Aquitaine Mobilités, Renaud Lagrave a lancé la charge : « Pour répondre à la demande toujours croissante des usagers, nous ne pouvons jouer que sur un budget général non extensif, car nous n’avons pas de VM ».

Vice-président du Mouvement des entreprises de France (Medef), Bruno Arcadipane rode son argumentation pour résister à « un impôt de production où il faut payer avant même d’avoir gagné le moindre euro ». Mais malgré le record d’Europe que détiendrait la France en matière de financement des mobilités par les entreprises, il ne ferme pas la porte au dialogue : « Nous prendrons notre place dans la gouvernance des autorités organisatrices », promet le vice-président. Une mission flash que lui a confié Patrick Martin, président du Medef, rendra ses conclusions fin février.

Du rail à la route

La force du plaidoyer de Régions de France repose sur la capacité fédératrice démontrée par plusieurs de ses membres, à commencer par la Nouvelle-Aquitaine : « 36 autorités organisatrices de la mobilité adhèrent au syndicat mixte dans lequel se gèrent les Serm des aires bordelaise et basquo-landaise », souligne Renaud Lagrave. Même son de cloche dans les pays-de-Loire, signataires d’un récent « contrat opérationnel de mobilités » avec 11 intercommunalités autour de Nantes.

L’élargissement du débat aux Serm prélude-t-il à une remise à plat globale du financement des infrastructures de transport dans les mois à venir, route comprise ?  « Une fenêtre d’opportunité s’ouvre en ce sens », estime François Durovray, responsable de la commission Mobilités des Départements de France. Cette association s’est récemment engagée aux côtés des maires de France dans un projet d’assises de la mobilité routière.

Test décentralisateur

Deux facteurs convergent : les baisses de recettes fiscales qui résulteront de l’électrification du parc automobile et l’échéance proche des concessions autoroutières. Alors que l’Etat renouvelle ses réflexions sur l’avenir de la décentralisation, « une démarche conjointe offrirait l’occasion de resserrer les liens entre départements et régions », estime François Duvovray.

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