Fiche pratique : l’urgence dans les marchés publics

Au vu des récentes tempêtes survenues, comment est-il possible, en tant qu'acheteur public, de gérer les dégâts matériels occasionnés, et ce tout en respectant les règles de la commande publique ?

Image d'illustration de l'article
Catastrophe naturelle © DR

Le motif de l'urgence impérieuse peut être utilisé sous certaines conditions bien précises.

1. Qu'est-ce que l'urgence impérieuse ?

A la différence de l'urgence qui justifie que les délais de publicité des appels d'offres soient écourtés, dite parfois "urgence courante" ou "urgence simple", l'urgence impérieuse permet de passer un marché négocié sans publicité ni mise en concurrence.

L'urgence impérieuse doit résulter de circonstances imprévisibles pour le pouvoir adjudicateur et être incompatible avec les délais exigés par les procédures d'appels d'offres ou de marchés négociés précédés de mesures de publicité et de mise en concurrence.

2. Quels aménagements possibles dans ce cas ?

Trois types d'aménagements des procédures de passation des marchés en cas d'urgence impérieuse :

- Article 35-II-1° du Code des marchés publics : l'acheteur public peut recourir à une procédure négociée sans publicité ni mise en concurrence, sous condition. Par dérogation à l'article 13, et lorsque l'urgence impérieuse est incompatible avec la préparation des documents d'un marché, la passation du marché est confirmée par un échange de lettres.

- L'article 25 prévoit par ailleurs que le pouvoir adjudicateur peut se dispenser de réunir la commission d'appel d'offres.

- L'article 80 prévoit que le délai de standstill (délai entre la notification de la décision de rejet aux candidats non retenus et la signature du marché) n'a pas à être appliqué dans les situations d'urgence impérieuse justifiant la négociation sans publicité préalable avec un seul soumissionnaire.

3. Dans quels cas peut-on utiliser la procédure négociée sans publicité ni mise en concurrence (article 35 - II-1) ?

Le recours à l'article 35-II-1° suppose la réunion de deux conditions traditionnelles qui sont essentielles :

A. d'une part, les circonstances imprévisibles : on entend par là des "événements qui dépassent largement le cadre normal de la vie économique et sociale". L'imprévisibilité s'entend non seulement sur la nature de l'événement mais également son ampleur :

. Exemples d'imprévisibilité :

Par exemple, sont très certainement imprévisibles de graves intempéries tout autant qu'une catastrophe naturelle : certains marchés, passés dans les heures, voire les jours qui ont immédiatement suivi la tempête de décembre 1999, pouvaient relever de la procédure négociée (Réponse ministérielle Intérieur, JO Ass. Nat. 27 mars 2000).

. Exemples de non-imprévisibilité :

Ne sont pas imprévisibles la nécessité de construire une école pour la rentrée scolaire, la nécessité de conclure un marché plusieurs mois après des intempéries (CE sect. 26 juillet 1991, Commune de Sainte-Marie (Réunion), req. N°117717), le fait qu'une entité qui doit donner son accord à un projet soulève des objections. De la même façon, la carence de l'administration ne peut être analysée comme une circonstance imprévisible.

A noter : il est difficile de parler d'imprévisibilité pour le pouvoir adjudicateur au sujet d'une infructuosité (, Lebon).

B. d'autre part, une urgence impérieuse : l'urgence impérieuse permet de passer un marché négocié sans publicité ni mise en concurrence.

. Exemples d'urgence impérieuse :

Commande de travaux de sécurité de première nécessité,

Loger les personnes les plus démunies.

. Absence d'urgence impérieuse :

Lorsqu'il s'agit d'organiser l'apposition d'affiches pour une élection présidentielle

Lorsque la décision de rénover des lycées était prise depuis deux ans

Lorsqu'il ne s'agit que de minimiser la gêne causée à des riverains sur un chantier,

A souligner : Lien de causalité entre les deux conditions :

Si l'urgence impérieuse est nécessaire, elle n'est pas suffisante : elle doit résulter directement des circonstances imprévisibles pour le pouvoir adjudicateur. D'où le lien étroit entre ces deux conditions pour justifier le recours au marché négocié.

Ce lien est mis en évidence par la jurisprudence communautaire (CJCE 2 août 1993, aff. C-107/92, Commission c/ Rép. Italienne) : "la dispense de toute obligation de publier un avis d'adjudication est subordonnée à la réunion de trois conditions cumulatives : existence d'un événement imprévisible, d'une urgence incompatible avec les délais exigés par d'autres procédures, et enfin un lien de causalité entre l'événement imprévisible et l'urgence impérieuse qui en résulte".

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