Face aux inondations, les collectivités ralentissent les écoulements

A une semaine du  colloque « Eaux pluviales et ruissellement : le temps de l’action », programmé le 3 décembre à Paris, les 130 inscrits confortent l’organisatrice, la fédération nationale des collectivités concédantes et des régies (FNCCR). L’association y voit une illustration du regain d’attractivité des compétences des collectivités dans la gestion de l’eau.

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Inondations Landes
Inondations Landes

Régis Taisne se tient prêt à soutenir le pari : « En 2026 dans les listes municipales, on observera une croissance du nombre de candidats à l’exercice des compétences liées à l’eau », pressent le chef du département Cycle de l’eau à la Fédération nationale des collectivités concédantes et des régies (FNCCR). Malgré des débats qui se sont focalisés sur l’ajournement de la compétence intercommunale obligatoire en eau potable et assainissement, les coulisses du congrès des maires l'ont renforcé dans cette conviction, du 19 au 21 novembre à Paris.

La fédération ressent la profondeur du mouvement dans sa propre structure : « En douze ans, le nombre d'adhésions liées à l'eau a plus que doublé, pour atteindre 660. Ces collectivités représentent 60 millions de Français, sur 68 millions », décompte Régis Taisne.

Le curage, « maladaptation caricaturale »

Qu’elle se manifeste par la sécheresse ou par les inondations, l’accélération du dérèglement climatique renforce le regain d’attractivité des compétences liées à l'eau. Dans les deux cas, les réponses s’organisent autour du ralentissement du grand cycle, comme le détaille le cahier Gestion des écoulements pluviaux et du ruissellement, publié par la FNCCR. L’association annonce pour le 14 décembre la sortie du 7ème et dernier livret, consacré au financement.

En affirmant la priorité au ralentissement, l’association d’élus n’hésite pas à s’inscrire en faux contre les illusions du curage, en voie de simplification dans un projet de décret : « Une maladaptation caricaturale », cingle Régis Taisne, rappelant qu’un récent rapport de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD) a déconstruit l’idée selon laquelle les débordements proviendraient d’un défaut de curage. « La logique, c’est de ralentir, et pas d’accélérer, sinon l’aval prend tout », tranche le chef de département.

Réappropriation politique

En amont des solutions techniques et de la rédaction des documents de planification, Régis Taisne observe une volonté de remettre la politique au centre du débat sur l’eau, y compris dans les communes rurales qui se mobilisent pour protéger leurs captages et accélérer leur transition agro-écologique. Il voit là une rupture : dans l’histoire des infrastructures de l’eau, les collectivités rurales se sont souvent placées dans les roues des locomotives urbaines, comme l’a montré, de l’après-guerre aux années 2000, le fonds national pour le développement des adductions d’eau.

La réappropriation politique découle en partie de l’engouement des élus et du public pour les solutions fondées sur la nature (SFN). « Les Français adhèrent massivement au verdissement de leur ville ou de leur village », constate Sandrine Potier, conseillère technique chargée des eaux pluviales et de l’assainissement non collectif à la FNCCR. Pour un coût compétitif, les SFN ajoutent la beauté et le confort climatique à la bonne gestion de l’eau.

100 000 km à déconnecter

« Il n’y a jamais de réponse unique », tempère Régis Taisne. Malgré leur avantage financier, les SFN pèseront lourd dans les finances locales, compte tenu des 100 000 km de réseaux unitaires totalisés par le système français d’assainissement, soit un quart du linéaire. La FNCCR cite l’exemple du Grand Lyon, qui a chiffré à 1 Md€ le coût de la déconnexion de ses réseaux pluviaux.

Pour progresser dans cette direction, la nouvelle directive Eaux résiduaires urbaines fixe un objectif ambitieux : réduire à moins de 2 % les volumes d’eau polluée rejetée sans traitement dans le milieu naturel, alors que depuis un arrêté de 2015, la France se donne un seuil de 5 %.

Exigence croissante

L’exigence se renforce alors que les risques de débordement des réseaux vont croître avec le réchauffement climatique, comme le laissent penser « Les chiffres clés des risques naturels », publiés en janvier par l’Etat. Non répertoriés au XXème siècle, les retraits et gonflements d’argile ont pris en 2017 le relais des inondations, comme premier poste d’indemnisations dédiées aux catastrophes naturelles.

Risques naturels
Risques naturels Risques naturels

La facture totale atteint 50 Mds€ au cours des 40 dernières années. Sa croissance met en péril l’assurabilité des territoires : un dossier pour lequel beaucoup d’espoirs reposent sur la proposition de loi de la sénatrice Christine Lavarde, qui participera au colloque de la FNCCR sur les eaux pluviales, le 3 décembre à Paris.

Retour aux sources

Autre point dur des débats sur les inondations : comment mieux organiser la solidarité de l’aval urbain et puissant vers l’amont rural et démuni ? Pour la FNCCR, cette question résonne comme un retour aux sources : l’association est née voici 90 ans pour organiser le financement de l’électrification rurale, avec une taxe prélevée en ville.

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