L’Insa Strasbourg entame sa mue. Coupée dans son élan par la crise de la Covid-19, l’école d’ingénieurs et d’architectes a repris les travaux de son extension-restructuration qui avaient débuté peu avant le confinement. La tranche ferme du projet de 24,87 millions d’euros (financés par l’Etat via l’Opération campus, la région Grand Est et l’Eurométropole de Strasbourg) prévoit son achèvement en 2021, avant celui de la tranche optionnelle deux ans plus tard.
La partie neuve, qui représente 3 900 m2 sur un total de projet de 9 300 m2, offre l’opportunité de rationaliser les circulations rendues erratiques par le fait qu’une précédente extension, au début des années 2000, n’était pas allée au bout de sa logique. Pour des questions de règles de sécurité, le hall d’accueil n’avait pas pu s’ouvrir sur l’extérieur et ainsi créer une seconde entrée. L’unique accès actuel génère une situation de cul-de-sac.
Telle se conçoit en tout cas l’approche du duo d’agences Cosa - RHB, lauréat du concours. Il installe le nouveau bâtiment du département Architecture à côté de cette extension du début des années 2000. De ce fait, il crée un second signal architectural à l’Insa, le long de l’allée Gaspard-Monge perpendiculaire au boulevard de la Victoire sur lequel débouche, côté Nord, la façade principale de la construction d’origine. De plus, « nous aménageons une seconde rue intérieure qui formera la boucle qui manquait. Reliant toutes les extensions au bâtiment d’origine, elle dégagera des espaces extérieurs végétalisés. Parallèle à la rue intérieure actuelle, elle renforcera l’atout de cet axe qui faisait la force de la conception d’origine, dans les années 1950, et qui s’est étiolée avec le temps », décrit Benjamin Colboc, architecte cogérant de Cosa avec Arnaud Sachet.
La restructuration aménage un atelier pour des expérimentations et des projets à l’échelle 1/1. © Cosa-RHB
Concrètement, les étudiants, enseignants et visiteurs de l’Insa Strasbourg désireux de se rendre vers les ailes Est ne seront plus contraints de traverser la grande salle d’examens — à supposer que celle-ci soit vide —, ni à pister le discret escalier qui leur évitera de se perdre. Le nouveau hall d’accueil s’installera à l’emplacement actuel de cette salle. Quant aux nouveaux espaces extérieurs, ils abriteront notamment la « forêt des prototypes » où les projets d’étudiants germeront et pousseront.
La réorganisation des espaces des différents départements d’enseignement facilitera les échanges entre eux. Elle mettra en valeur les ateliers d’expérimentations à taille réelle, à l’échelle 1/1.
Ouverture vers le multimatériaux
L’extension fait la part belle au bois, en écho à la volonté de l’école de gagner un profil plus "multimatériaux" dans ses enseignements. Le matériau habille la nouvelle rue. Il forme aussi la structure principale et les planchers (le béton constituant le noyau central) du nouveau département architecture. Cosa et RHB y reproduisent le principe du jeu Kapla : des poutres en bois massif de grandes dimensions (18 ou 36 m de portée et 2,72 m de haut) se croisent pour former un empilement. « Les ouvertures que procure un tel assemblage laissent passer la lumière zénithale », ajoute Benjamin Colboc. Le matériau pierre s’invite également, au premier des trois étages.
Le nouveau bâtiment (au fond à gauche) est orienté vers l’allée Gaspard-Monge perpendiculaire au boulevard de la Victoire qui longe la façade principale d’origine (au premier plan). © Cosa-RHB
« Ainsi c’est un message d’ouverture de l’école que le projet entend véhiculer : ouverture sur la ville, ouverture de ses champs d’enseignement. Il justifie aussi le choix d’une certaine verticalité pour les surfaces neuves, qui présente aussi l’intérêt de ménager des capacités foncières pour de potentielles expansions futures », complète Julien Rouby, architecte associé de RHB (Rouby-Hemmerlé-Brigand).
La restructuration, quant à elle, intervient de manière conséquente sur la construction originelle des années 1950, dans son respect. « Cette architecture a subi quelque peu les affres du temps, mais elle propose une lecture intéressante, à ne pas gommer », estime Benjamin Colboc. Ainsi, le remplacement des menuiseries de la façade et l’adjonction de protections solaires sont pensés pour ne pas altérer celle-ci. Dans le même souci, c’est une option d’isolation thermique par l’intérieur qui a été retenue.
