« Quel est le rôle de l’architecte, si ce n’est construire la ville, c’est-à-dire cet endroit assez curieux où nous pouvons être ensemble tout en restant anonymes ? La ville, c’est le contraire du village, où les rideaux se soulèvent dès qu’un inconnu passe dans la rue. Seulement, voilà… Aujourd’hui, je vois les villes devenir des ensembles de petits villages accolés, dotés de barrières et d’esprits de territoire. Les architectes ne sont évidemment pas comptables de tout mais ils accompagnent ce mouvement. De même, je ne les considère pas comme les responsables de l’absence de concertation dans le développement des grands projets. Tout un système conduit à ce qu’on ne donne jamais la parole aux gens qui verront leur environnement et leur vie transformés.
« Avoir une connaissance intime des lieux »
Néanmoins j’aimerais que les architectes, spontanément, s’intéressent davantage aux lieux où ils vont intervenir, qu’ils aient une connaissance intime de leur histoire et de leurs habitants. Mais il est des territoires avec lesquels on ne prend pas de gants quand il s’agit de démolir. Ainsi, on en est toujours à considérer la banlieue comme dénuée d’histoire et de mémoire. J’y vis et je le constate au quotidien, en me promenant dans ces endroits où l’on construit beaucoup, comme Plaine Commune et le site du futur campus Condorcet, à Aubervilliers. Le passé industriel ou maraîcher de ces lieux a pourtant une légitimité. Alors il y a des gestes importants comme, à Saint-Denis, lorsque Luc Besson installe sa Cité du cinéma dans une ancienne usine électrique, ou que l’on envisage d’établir l’école d’architecture de Paris-La Villette dans les « cathédrales du rail » de la SNCF. »