Délégation de service public Améliorer les cahiers des charges

-Ils ont trop tendance à privilégier l'exploitation, au détriment de la conception de l'offre de service.

Les usagers des services publics se montrent de plus en plus exigeants, n'hésitant pas à intervenir dans les débats entre délégants et délégataires et à attaquer un contrat en justice. Les élus locaux sont réceptifs à ces nouvelles attentes, selon un récent sondage réalisé par le cabinet Arthur Andersen (voir encadré). Comment les opérateurs, gérant leurs entreprises « à leurs risques et périls », parviennent-ils à concilier ces besoins toujours plus pointus avec leurs contraintes de gestion privée ?

Renforcer l'attractivité

« Il faut d'abord renforcer l'attractivité du service, ce qui est une manière de travailler à l'amélioration des recettes », a souligné Daniel Caille, président du Syndicat professionnel des entreprises de service d'eau et d'assainissement (SPEDE), lors d'un récent colloque organisé à Paris en partenariat avec « Le Courrier des maires » et le Syndicat national des secrétaires généraux et directeurs généraux des collectivités territoriales. Pour les services de base (eau, énergie), cela peut porter sur une meilleure gestion des abonnements mais pour les transports, les paramètres à améliorer seront plus complexes (horaires, desserte, confort). La prise en compte de ces critères qualitatifs rejaillit sur le contenu de la négociation, la collectivité locale étant mal armée pour négocier sur ce point avec les divers candidats. Plusieurs pistes de réflexion ont été lancées pour améliorer les cahiers des charges qui ont, de l'avis unanime des opérateurs, trop tendance à privilégier l'exploitation, au détriment de la conception de l'offre de service. « La collectivité locale pourrait faire oeuvre d'imagination, s'ouvrir davantage aux variantes, afin d'axer son cahier des charges vers des objectifs de service public », déclare Jean-Michel Ratron, de la Sceta-Voyageurs. Autre piste : dissocier la conception (en passant un marché avec un prestataire spécialisé) de l'exploitation pure.

Dans la perception des usagers, la qualité du service est indissociable de son prix. Ceux-ci ont de plus en plus de mal à supporter la disparité des tarifs et les opérateurs doivent pratiquer la « vérité des coûts ». Or, plusieurs éléments entrent en jeu, particulièrement complexes dans le secteur de l'eau qui exprime le mieux « l'obligation de résultat ». D'abord, le débat n'est pas tranché entre les parties fixes (abonnements) et les parties variables du coût. Les distributeurs estiment que les coûts fixes sont trois ou quatre fois inférieurs à ceux de l'électricité ou des télécommunications. Il s'agit là d'un vrai débat qui sera peut-être repris dans un cadre européen.

Autre difficulté : la péréquation. Les distributeurs d'eau plaident pour une vérité des prix au cas par cas, pour une explication des écarts, plutôt que pour un nivellement de ces écarts, estimant que la bonne péréquation est accrochée sur une réalité physique et géographique et non sur une réalité administrative (d'ailleurs interdite par Bruxelles). Enfin, la transparence n'est pas une notion facile à mettre en oeuvre, s'agissant d'une mécanique où se mélangent : les charges directes imputées au contrat ; les gains de productivité assis sur une certaine forme de mutualisation des dépenses ; la confidentialité du savoir-faire des professionnels... « Nous disons oui à la transparence mais non au voyeurisme, souligne Daniel Caille. Attention à ne pas donner des informations concernant d'autres contrats ! » L'obligation de transparence est due à la Chambre régionale des comptes et aux experts habilités par la collectivité locale : or, ceux-ci peuvent fouiller loin dans l'intimité du savoir-faire de l'entreprise.

Notion de client final

Autre difficulté : la notion de client final. Ainsi, pour le chauffage urbain, s'il est facile de faire la part du coût entre le délégant et le délégataire, il n'en va plus de même au niveau du client (rarement un individu dans son appartement mais le plus souvent un syndic de copropriété ou un office d'HLM). Celui-ci n'aura pas la même logique de tarif que le consommateur final. Et dans le secteur des transports, plus politique, les opérateurs sont confrontés à des prix de service irréalisables dans des conditions normales d'exploitation.

Sur tous ces points, la notion de délégation de service public devra évoluer car elle souffre de deux faiblesses par rapport à la pratique anglo-saxonne : la transparence encore insuffisante de la gestion ; et la difficulté à porter des appréciations sur les résultats, la qualité, l'exécution ou la performance du service.

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