Déchets recyclés : un cocktail garanti sans matière vierge

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L’usine Holcim d’Altkirch (Haut-Rhin) stocke différents déchets pour commencer la production de clinker à partir de ces matériaux.

Lafarge-Holcim frappe fort. Dans son usine d'Altkirch (Haut-Rhin), le cimentier produit depuis cet automne un clinker recyclé. Une véritable innovation puisqu'aucun gramme de ce « cru » de ciment n'est issu de matière vierge. Mise au point par le centre de recherche de l'Isle-d'Abeau (Isère), la recette mêle bétons concassés, morceaux de tuiles, laitiers d'aciéries et quelques autres éléments comme de la laine de roche isolante usagée. « Ce qui est transformé ici, ce sont des déchets qui ne peuvent être valorisés autrement, selon un principe de complémentarité des recyclages », explique Mouloud Behloul, directeur innovation et construction durable de Lafarge France.

Par exemple, les bétons de démolition que récupère le site d'Altkirch sont ceux dont la qualité est insuffisante pour leur valorisation classique en sous-couche routière. De même, des laitiers de hauts-fourneaux de basse qualité sont injectés directement dans le clinker. En revanche, d'autres laitiers présentant une qualité supérieure assurent la fonction habituelle d'additifs à Altkirch. « Nous avons voulu que ceux-ci soient eux-mêmes issus du recyclage, en cohérence avec le projet », poursuit Mouloud Behloul.

Dans le mix de produits entrant dans la composition de ce clinker inédit - « première mondiale », assure le groupe -, Lafarge-Holcim recourt en priorité aux bétons usagés, en cherchant à en maximiser la part. « Il s'agit de la catégorie de déchets la plus minérale. Nous réduisons a contrario autant que possible la teneur en terre cuite, qui contient trop de silice », souligne l'ingénieur.

A ce clinker et donc ce ciment d'une nouvelle ère, le groupe a trouvé un premier chantier d'application : un programme de logements à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) pour une filiale d'Action Logement, au début de l'année prochaine. La démarche 100 % recyclé y sera élargie au béton dans son ensemble, dans la mesure où le sable et les granulats seront également de seconde vie.

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Qui peut le plus peut le moins. De là à généraliser la révolution du clinker recyclé, il y a un énorme pas que le cimentier n'est pas encore prêt à franchir. Son projet d'Altkirch obéit plutôt au principe du « qui peut le plus peut le moins ». « Il vise à démontrer que le 100 % recyclé relève du techniquement possible et présente des performances égales aux solutions classiques. A partir de là, l'objectif à une échelle plus massive consiste à incorporer une part de recyclé dans le clinker : 10 %, voire 20 % à plus ou moins long terme. Et à systématiser alors sur nos chantiers un tel mix », précise Mouloud Behloul.

Cette expérience alsacienne s'inscrit dans le large mouvement que Lafarge-Holcim a enclenché pour atteindre son objectif : la neutralité carbone en 2050. Cette trajectoire ambitieuse passe, en France, par l'arrêt progressif du recours aux énergies fossiles entre 2025 et 2050, la part des combustibles alternatifs (biomasse et déchets transformés en combustibles solides de récupération, ou CSR) devant passer dans cette période de 70 % à 100 % (50 % aujourd'hui). S'agissant du clinker, il mobilise bien sûr la matière grise du cimentier qui ne perd pas de vue l'objectif prioritaire d'en diminuer la teneur dans le ciment, au profit de composants moins énergivores. « L'argile calcaire s'obtient à une température deux fois moindre que les 1 430 °C que demande le clinker », rappelle Mouloud Behloul.

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