Copenhague : les patrons européens contre un objectif unilatéral de -30%

Pour la Fédération patronale européenne, l'objectif européen d'une baisse de 30% des émissions de CO2 d'ici à 2020 est conditionnel et ne doit être envisagé que si les autres pays prennent aussi des engagements forts. BusinessEurope réaffirme cependant sa volonté d'agir et son acceptation totale des 3 x 20. De son côté, l'UE espère la prochaine mise en place d'un marché carbone transatlantique et dans l'ensemble de l'OCDE.

Une baisse des émissions de CO2 des pays développés de 20% d'ici à 2020 n'est pas suffisante aux yeux des scientifiques, qui préconisent une diminution comprise entre 25 et 40%, a rappelé lundi soir le député européen Jo Leinen au cours d'une conférence de presse. Sans compter que la crise économique rendrait un objectif plus ambitieux d'autant plus facilement atteignable. Autant de raisons qui expliquent que l'UE propose dans les négociations climatiques d'aller jusqu'à s'engager éventuellement à une baisse de 30% de ses émissions.

Un objectif insensé si unilatéral

La perspective d'un objectif de -30%, on le sait, alimente de nombreuses discussions dans le monde des affaires européen (cf. BIP d'hier). " Nous ne sommes pas contre un engagement de -30% mais il s'agit d'un objectif conditionnel : nous voulons que les autres pays prennent aussi des engagements forts ", a souligné lundi soir Philippe de Buck, directeur général de BusinessEurope, lors d'une conférence organisée au Bella Center de Copenhague en marge des négociations officielles sur le climat. " Il serait insensé " de prendre unilatéralement pour cible une réduction des émissions de 30% d'ici à 2020, sans respecter cette condition, a souligné le patron de la fédération patronale européenne dont est membre, pour la France, le MEDEF.

Philippe de Buck a cependant " réitéré l'acceptation " par les entreprises européennes de l'objectif des 3 x 20 adopté par l'UE. Et notamment de l'objectif de baisse de 21% des émissions fixé aux entreprises incluses dans l'ETS (Emission Trading Scheme) entre 2005 et 2020. Cet objectif sera d'ailleurs déjà " très difficile " à respecter dans certains secteurs, a-t-il été affirmé au cours de la conférence.

Préserver la compétitivité de l'industrie européenne

" Nous voulons un accord fort et ambitieux " à Copenhague, a assuré Philippe de Buck. Mais les entreprises ont besoin d'évolutions " prédictibles " et d'objectifs " atteignables ", a-t-il ajouté. Pour M. de Buck, un objectif de -30% poserait deux problèmes majeurs : les délocalisations en-dehors de l'UE et, au niveau interne, les déséquilibres entre l'Est et l'Ouest de la zone. La position de BusinessEurope est claire : un accord dans la capitale danoise " doit fournir un cadre d'action au niveau international et éviter de mettre en danger la compétitivité future de l'industrie européenne ".

Pour la fédération, tous les pays développés doivent adopter des objectifs de réduction comparables. Et les pays émergents doivent prendre des engagements contraignants à l'horizon 2020. BusinessEurope appelle en outre à mettre en place un dispositif mondial de contrôle des émissions (notamment pour les secteurs aérien et maritime). Elle souhaite également le développement d'approches sectorielles au niveau mondial et le renforcement des Mécanismes de Développement Propre (MDP).

Les entreprises, en tout cas, ont déjà su démontrer leur capacité à agir. Est venu en témoigner Hans Straberg, le p-dg d'Electrolux. Le groupe suédois d'électroménager a réduit ses consommations énergétiques de 15% depuis 2007 et vise une baisse supplémentaire de 15% d'ici à 2012. De quoi réduire ses factures énergétiques de 20 millions d'euros par an. Quant à l'amélioration de l'efficacité énergétique des produits d'Electrolux, elle apparaît d'autant plus indispensable que 1 milliard de Chinois supplémentaires devraient rejoindre les classes moyennes d'ici à 2020 !

Un prix plancher du carbone ne serait pas souhaitable

De son côté, le négociateur climatique européen Artur Runge-Metzger a estimé que la création d'un marché carbone transatlantique était envisageable si les Etats-Unis adoptaient leur loi énergie-climat. On ne serait plus alors très loin de la mise en place d'un marché carbone au niveau de l'ensemble de l'OCDE, a-t-il ajouté, puisque d'autres pays membres réfléchissent à la création d'un tel marché. Il ne serait pas nécessaire que tous ces systèmes soient identiques, a assuré Artur Runge-Metzger : il suffirait qu'ils soient " compatibles ".

L'instauration d'un prix plancher du carbone serait-elle souhaitable pour éviter que ce prix ne retrouve à nouveau à l'avenir un niveau proche de zéro ? Interrogé sur la question, le négociateur européen a souligné que l'UE n'y était pas favorable. Ne serait-ce que parce que déterminer le niveau que devrait avoir ce prix plancher relèverait du casse-tête.

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