Au vu de la présentation des résultats trimestriels de la Fédération française du bâtiment (FFB) mardi 4 juillet, il semblerait que cette dernière ait définitivement intégré la crise du logement neuf.
En effet, alors qu’Olivier Salleron débutait sa présentation d'avril 2023 par les résultats de la construction neuve, le président de la FFB s’est cette fois-ci concentré en premier lieu sur l’entretien-rénovation.
Avec d’abord des bonnes nouvelles sur l’activité en général : il y avait au 1er trimestre 2023 1,730 M d’actifs temps plein dans le BTP, « un niveau historique puisque cela fait plusieurs années que nous étions scotchés à 1,5 M », précise Olivier Salleron.
Même chose pour l’activité : en 2022, 166 Mds € de travaux ont été réalisés, notamment dus à l’inflation et une hausse des prix du bâtiment de 8,7 % sur l’année. Hors effet prix, la croissance du secteur se situe à +3,2 % en 2022 par rapport à 2021. Dans le détail, l’entretien amélioration représente 90 Mds €, dont 53 Mds € pour le logement, et le neuf 76 Mds €.
La rénovation énergétique dynamise le marché
« S’il n’y a pas que la rénovation énergétique qui constitue l’entretien-amélioration, précise Olivier Salleron, c’est bien cette activité qui porte le secteur. » Une croissance qui reste cependant timide et qui ralenti de surcroit, puisque l’entretien-amélioration a cru en volume au T1 2023 en glissement annuel de 1 %, et la rénovation énergétique plus spécifiquement de 1,1 %.
Des chiffres loin des deux premiers trimestres de 2021, qui se situaient pour la rénovation énergétique des logements entre 12 % et 15 %. « Malgré la crise de l’énergie, malgré l’interdiction à la location des passoires ainsi que le prêt avance rénovation, le coup de boost qui était brandi lors du CNR Logement le 5 juin n’arrive pas », constate le président de la FFB.
Plus que la stagnation des subventions dédiées à Ma Prime Rénov depuis 3 ans, la fédération pointe avant tout l’instabilité des dispositifs d'aide à la rénovation énergétique, qui donnent peu de visibilité aux entreprises du bâtiment. « Par conséquent, cela bride les investissements des entreprises, dont le recrutement et la formation de salariés, explique Olivier Salleron. Or, le gouvernement dit que nous manquons de main d’œuvre, c’est faux. C’est le marché qui dictera l’évolution de nos effectifs. »
L’emploi, le nerf de la guerre
C’est en effet l’une des constatations du dernier rapport de France Stratégie sur la rénovation énergétique des bâtiments publié le lundi 3 juillet, qui déplore le manque de professionnels RGE et la nécessité d’organiser la migration des entreprises spécialisées dans la construction neuve sur le marché de la rénovation.
Sur ce point, le président de la FFB affirme que c’est une dynamique qu’ils observent chez leurs entreprises, notamment pour les TPE et ETI, avec plus de difficulté pour les PME, moins flexibles. Selon France Stratégie, entre 166 000 et 250 000 emplois devraient être créés grâce à la rénovation énergétique entre 2019 et 2030, « mais ce devrait être même beaucoup plus au vu des besoins ! », s’exclame Olivier Salleron.
Pour l’heure, au T1 2023 par rapport à la même période en 2022, seulement 4 400 postes ont été créé au global. Et la chute du logement neuf ne va pas aider, puisque la FFB estime à 135 000 le nombre de destructions de postes, et même 270 000 à fin 2024 si le gouvernement "n’intervient pas d’ici la rentrée".
Le neuf dans le rouge
Bien sûr, les performances du logement neuf ne passent pas à la trappe, même si une forme de d’acceptation se fait sentir à la FFB. Olivier Salleron parle tout de même « d’une violence des chiffres » : le recul du secteur est de 11 % dans les logements commencé et 18 % concernant les logements autorisés en glissement annuel à mai 2023. La baisse atteint même 35 % pour la vente individuelle diffus.
De fait, ces résultats fragilisent les entreprises, et en premier lieu les TPE, avec une accélération des défaillances : alors qu’en 2022 il y avait au global -24 % de défaillances d’entreprises par rapport à 2019, en seulement 5 mois en 2023, ce chiffre est passé à -6,5 %.

L’intérêt économique du PTZ
Assouplissement des obligations du HCSF, simplification et visibilité des aides à la rénovation, mise en place d’un statut de bailleur privé, la FFB continue de porter ses préconisations auprès du gouvernement. Mais c’est bien le prêt à taux zéro (PTZ), dont sa suppression a été annoncé par Elisabeth Borne lors du CNR Logement le 5 juin, qui mobilise le plus la fédération. Le FFB souhaite notamment que le PTZ soit rétabli dans les zones B2 et C avec une quotité de 40 %. Pour appuyer cette proposition, la fédération a présenté une étude sur les retours sur investissement du PTZ pour l’Etat. Si ce dernier débourse en moyenne 12 502 € pour chaque PTZ, ils rapportent aussi en moyenne, grâce aux 20 % de TVA, 34 659 €. Ainsi, la FFB estime que l’Etat perdrait chaque année avec la suppression du PTZ 1,7 Md €.