Gérard Collomb président de la communauté urbaine de Lyon et maire de Lyon
La ville durable est une ville de l'innovation et de la créativité, notamment autour des moteurs de croissance à venir que sont les cleantech (technologies propres) et les technologies de l'information et de la santé, mais aussi autour de la création artistique et de savoirs. C'est également une ville qui facilite les échanges et le partage en offrant une accessibilité à tous, et une ville verte. Bien sûr, une ville durable réduit son empreinte écologique, surtout en matière énergétique. Dans cette perspective, le défi de l'agglomération lyonnaise est de densifier, de reconstruire la ville sur la ville, tout en assurant un équilibre social. Il s'agit également de construire la ville autour des transports collectifs à l'échelle métropolitaine, tel le futur RER lyonnais que nous appelons Real (réseau express de l'aire urbaine lyonnaise). Un autre défi est de réinventer les rapports ville-nature. Nous nous y employons, de la reconquête des berges du Rhône à celle des rives de la Saône en offrant une coulée verte qui traverse toute l'agglomération, sans oublier le développement de l'agriculture périurbaine. L'objectif énergie-climat du Grand Lyon est de réduire les émissions de 20 % d'ici à 2020. La prochaine conférence locale du climat visera à généraliser la rénovation énergétique des logements, à déployer le chauffage urbain à base de biomasse ou de chaleur fatale, et la production d'électricité photovoltaïque. Il faut aussi travailler sur le changement des habitudes individuelles. Les pouvoirs publics doivent y contribuer en proposant des solutions durables qui ont pour effet d'augmenter les possibilités de choix des citoyens. Velo'v, notre service de location de vélos, propose un outil de reconquête de la ville, tout comme les services d'auto-partage et Autolib, à Lyon, seront les outils d'une nouvelle relation à l'automobile.
Jacques Bigot président de la communauté urbaine de Strasbourg et maire d'Illkirch-Graffenstaden
Lagglomération de Strasbourg est située entre deux massifs montagneux : les Vosges et la Forêt-Noire. Les possibilités d'extension sont donc limitées, et les citoyens et les élus n'ont pas encore suffisamment pris conscience de la rareté de la ressource foncière. Cette rareté ne permet pas de répondre systématiquement à toutes les demandes, notamment au rêve de chacun d'habiter une maison individuelle, ou même d'ouvrir des terres nouvelles à l'activité économique. Le développement ne se focalise pas assez sur les bourgs-centres, et, faute de débat sur les grands enjeux lors de l'élaboration du schéma de cohérence territoriale, l'idée d'un projet partagé ne s'est pas assez imposée : beaucoup d'élus restent encore sur la logique des anciens schémas directeurs. En 2008, j'ai lancé l'idée d'une politique agricole à l'échelle de l'agglomération, menée avec les agriculteurs et en partenariat avec la chambre d'agriculture. Le PLH (programme local de l'habitat) de l'agglomération de Strasbourg, approuvé fin 2009, identifie des espaces de parcs naturels urbains. A l'échelle du Scot, nous aimerions amener progressivement chaque intercommunalité à se doter d'un PLH. Quant à notre schéma de développement économique « Strasbourg Eco 2020 », il privilégie la reconversion de sites existants. Enfin, autour des objectifs de réduction de 30 % des émissions de gaz à effet de serre, de 30 % d'énergies renouvelables et de 30 % d'économies d'énergie, le plan climat territorial complétera notre vision prospective, qui s'enrichira aussi bientôt d'un schéma des transports à l'horizon de l'année 2025.
Martine Aubry présidente de la communauté urbaine de Lille et maire de Lille
Lille Métropole doit répondre à un double défi, social et écologique. Aujourd'hui, les villes isolent et créent de la ségrégation. Elles se sont peu à peu étalées en créant des conditions de vie et de transports difficiles pour leurs habitants, et en gâchant un foncier restreint. Même si, à Lille, nous avons su résister à ces dérives mieux qu'ailleurs, il est impératif de construire un nouveau modèle pour les générations futures. Notre agglomération se singularise par son héritage industriel, visible dans ses friches. Nous avons choisi d'en faire une chance. La plupart de nos projets d'aménagement et de développement économique prennent racine dans ces espaces délaissés : le site de l'Union, à Roubaix-Tourcoing, les Rives de la Haute Deûle, à Lille-Lomme, illustrent cet esprit de reconquête. Depuis 2008, nous avons organisé plusieurs grands débats consacrés à l'habitat, à la mobilité, à l'aménagement et au développement durable. Nous avons fixé un cap qui s'applique à toutes nos politiques : réduire de 30 % les émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2020, grâce à un plan énergie-climat-territorial. A l'horizon d'une génération, la place de la voiture ne représentera plus que 30 % des déplacements, et la part modale des transports en commun aura doublé. La ville s'organisera désormais autour du maillage des transports publics, des gares, et non l'inverse. Autour de ces nœuds, nous avons défini des périmètres de 500 m où nous créerons la « ville intense » : un urbanisme compact qui préserve l'intimité et qui offre des espaces de respiration, ainsi qu'un vrai confort pour les piétons et les modes doux. La performance énergétique des constructions et des rénovations est également recherchée. Depuis le 1er janvier 2010, toutes nos aides au logement sont écoconditionnées, pour atteindre les performances dites « basse consommation ».
Enfin, notre projet urbain vise à offrir aux habitants la qualité à laquelle ils ont droit. Il faut pour cela créer des espaces agréables, tisser un réseau de pôles d'excellences culturels ou sportifs, tel notre projet de la gare Saint-Sauveur. Il faut aussi dessiner des promenades vertes et remettre l'eau en scène. La ville durable, c'est des émotions partagées, un art de vivre ensemble tourné vers l'avenir.
Vincent Feltesse président de la communauté urbaine de Bordeaux et maire de Blanquefort
Bordeaux est aussi peu durable qu'elle est agréable. La métropole s'est beaucoup étalée, avec quasiment la même superficie que Lyon, mais deux fois moins d'habitants. La densité a été divisée par deux en 30 ans : on est passé de 48 habitants à l'hectare en 1973 à 22 en 2004. Ce qui conduit à une forte part de déplacements en voiture individuelle, renforcée par une offre commerciale périphérique supérieure de 20 % à celle de Nantes ou Toulouse. Malgré la mise en service du tramway, la part de l'automobile n'a reculé que de 1 % sur l'agglomération, et de 3 % sur le centre-ville. Bref, nous sommes une métropole douce, mais pas totalement vertueuse. Quant au modèle social, il est moins cassé qu'ailleurs : nous n'avons pas connu de choc majeur, de désindustrialisation brutale. Nous formons, avec le maire, un attelage politique : nous sommes élus à plein temps, sans autre mandat, et nous sommes passionnés par le fait urbain. Compte tenu de la faible densité et de son poids industriel modeste, la transformation de la ville doit s'appuyer sur une mise en cohérence de l'emploi, de l'habitat, des déplacements et de la nature. Nous voulons développer les espaces naturels, nous réapproprier les espaces agricoles, parcs et forêts. Côté déplacements, notre ambition est de doubler le nombre de voyageurs en transports publics d'ici à 2020 et de faire passer le vélo à 15 % d'ici à 2030. Nous allons ajouter 30 km au réseau tramway, réutiliser les voies ferroviaires de ceinture, sans oublier la mise en place par la région d'un TER cadencé. Dans l'habitat, nous allons multiplier par deux les objectifs du PLH et augmenter la production de logements de 5 000 à 9 000 par an. L'emploi reste un sujet difficile dans cette agglomération où le secteur public est important. Nous misons sur l'impact de la LGV (tertiaire supérieur, centres de décision rapprochés), l'innovation (route des lasers, plan campus.) et sur nos marges de progrès dans le tourisme.



