Depuis 2014, les tiers peuvent saisir le juge du plein contentieux pour contester la validité d’un contrat administratif (1). A contrario, l’accès au juge de l’excès de pouvoir leur est beaucoup plus limité. Le Conseil d’Etat vient d’en apporter une nouvelle illustration dans une décision du 4 avril 2018.
Dans cette affaire, le ministre chargé des Transports a publié un avis d’appel public à la concurrence (AAPC) au Bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP), en vue de la passation d’une délégation de service public (DSP). Cette dernière avait pour objet la réalisation, le développement, le renouvellement, l'entretien, l'exploitation et la promotion des terrains, ouvrages, bâtiments, installations, matériels réseaux et services d’un aérodrome.
Une association désireuse de faire annuler cet avis de publicité a formé un recours pour excès de pouvoir devant le tribunal administratif (TA) de Paris. Ce dernier a estimé la demande manifestement irrecevable. Mais, saisie à son tour, la cour administrative d’appel (CAA) de Paris a annulé l’ordonnance du TA, estimant que l’AAPC devait être regardé comme révélant la décision de l’Etat de recourir à une DSP, en l’absence de toute autre décision formalisée. Les deux parties se retrouvent ainsi devant le Conseil d’Etat.
Le Conseil d’Etat commence par relever qu’aucune disposition n’impose à l’Etat « d’adopter, avant d’engager la procédure de passation d’une délégation de service public, une décision sur le principe du recours à une telle délégation ». Ce qui n’est pas le cas pour les collectivités territoriales ainsi que leurs groupements et leurs établissements publics, rappelle-t-il. L’article L. 1411-1 du Code général des collectivités territoriales indique, en effet, que ces derniers « doivent se prononcer sur le principe de toute délégation de service public local après avoir recueilli l'avis de la commission consultative des services publics locaux ».
La Haute juridiction constate, qu'en l’espèce, l’avis publié par le ministère, « se borne à lancer la procédure de passation de cette délégation ». Ainsi, s'il manifeste la volonté de l'Etat de recourir à ce mode de gestion, « il ne saurait en soi constituer une décision sur le principe du recours à une telle délégation ». Cet avis doit donc être considéré comme « une simple mesure préparatoire à la conclusion de la convention ». Or, ce type de mesure ne peut pas être déférée au juge de l’excès de pouvoir car elle ne fait pas grief. Les juges suprêmes annulent pour erreur de droit l’arrêt de la CAA.
Pour autant, au cours de son analyse, le Conseil d’Etat n’a pas manqué d’évoquer la solution restante pour contester la validité du recours à une DSP. Il s’agit du recours « Tarn-et-Garonne » (1). Pour rappel, ce dernier a ouvert aux tiers la possibilité de contester la validité d’un contrat administratif - telle qu’une DSP- ou certaines de ses clauses devant le juge de plein contentieux.
CE, 4 avril 2018, n°414263, mentionné aux tables du recueil Lebon