Ce que la réforme des marchés publics change pour les entités adjudicatrices

La réforme des marchés publics rebat les cartes pour les entités adjudicatrices. SNCF Réseau fait le point sur quelques nouvelles règles applicables qui impactent notamment les travaux d’infrastructures et ceux ne présentant aucune technicité particulière.

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Pas facile d'allotir les marchés publics de travaux portant sur des infrastructures...

Du fait de leur appartenance à des secteurs stratégiques pour l’État (transport, énergie, eau, etc.), les entités adjudicatrices ont traditionnellement bénéficié de règles de mise en concurrence assouplies pour leurs achats. Mais la transposition française des directives européennes par l’ordonnance du 23 juillet 2015 et du décret du 25 mars 2016 a rapproché leur régime de celui des pouvoirs adjudicateurs. Ces entités sont, de ce fait, soumises à de nouvelles règles vectrices de changements, notamment en matière de marchés de travaux avec l’obligation d’allotir et l’interdiction de recourir au critère unique du prix pour attribuer les contrats. Boyan Ionkov, chef du département marchés et maitrise d’ouvrage chez SNCF Réseau a commenté ces dispositions lors d’un colloque de l’Association pour l’achat dans les services publics (Apasp).

Désormais, le principe d’allotissement s’impose aux entités adjudicatrices. En effet, celles qui n’allotissent pas les marchés dont le montant est supérieur aux seuils des procédures formalisées, doivent justifier leur choix (art. 12 du décret marchés publics). Or, « dans le domaine de l’infrastructure, quand on sort du champ d’un bâtiment, il est difficile de se projeter dans l’allotissement », indique Boyan Ionkov. Cela s’explique notamment par la taille, la complexité et la nature des projets en matière d’infrastructures.

Par ailleurs, l’interdiction de recourir au seul critère prix dans les marchés de travaux interroge, notamment pour les travaux qui ne présentent aucune technicité particulière. « Il est frustrant de ne plus pouvoir attribuer au moins-disant les marchés portant sur des bâtiments d’infrastructures très simples avec des cahiers des charges déjà bien ficelés dès lors qu’il n’y a pas de valeur ajoutée ou d’innovation possible de la part des soumissionnaires sur ces opérations », explique le chef du département marchés de SNCF Réseau. C’est le cas notamment des boîtes à béton ou des abris de postes d'aiguillage où le prix était jusqu’à présent souvent le seul critère d’attribution. Or, selon l’article 62 du décret, le critère unique ne peut désormais être fondé que sur le coût déterminé selon une approche globale. Boyan Ionkov en vient à se demander « si le coût global n’est finalement pas le prix pour ces bâtiments élémentaires présentant un simple investissement ».

La réforme des marchés publics est aussi porteuse d’autres nouveautés. Le seuil de dispense de procédure pour les entités adjudicatrices passe de 20 000 à 25 000 HT euros. Le champ des petits achats pouvant faire l’objet de marchés négociés sans publicité ni mise en concurrence préalable s’élargit donc. Autre changement : la durée maximale des accords-cadres est désormais limitée dans la durée, à huit ans (contre quatre ans pour les pouvoirs adjudicateurs). Enfin, l’arrivée d’un nouvel outil pour favoriser la R&D avec le partenariat d’innovation est appréciée. « SNCF Mobilités se réjouit de cette procédure lancée sur du matériel roulant pour avoir un rail moins cher et transportant plus de personnes », rapporte Boyan Ionkov. Celui-ci s’interroge toutefois sur la marge de manœuvre laissée par les textes pour utiliser ce mécanisme sur des travaux nouveaux ou sensiblement améliorés.

La nouvelle réglementation stabilise certaines questions. Les entités adjudicatrices conservent la liberté de recourir à la procédure négociée (art. 74 du décret). Contrairement aux pouvoirs adjudicateurs, il n’y a pas de conditions de recours à respecter. Elles peuvent, de plus, se réserver la possibilité de ne pas négocier, à condition de l’avoir indiqué, si les offres reçues sont satisfaisantes.

Enfin, il est désormais clair que les marchés des entités adjudicatrices constituent des contrats administratifs et relèvent à ce titre de la compétence du juge administratif. Les entités ne peuvent plus choisir la juridiction compétente selon le contenu du contrat (présence de clauses exorbitantes de droit commun) ou selon son objet (travaux, services ou fournitures).

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