Interview

Bordeaux : « Végétaliser est toujours moins cher que bétonner », Bernard Blanc, adjoint à l'urbanisme résilient de la Ville de Bordeaux

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Bernard Blanc, adjoint à l’urbanisme résilient de la Ville de Bordeaux.

L'urbanisme résilient et le bâtiment frugal sont deux nouveaux concepts que vous voulez mettre en œuvre. Comment allez-vous procéder ?

Nous allons élaborer pour les promoteurs et les bailleurs sociaux un référentiel du bâtiment frugal. Cette conception part de l'intérieur du logement pour aller vers l'extérieur, qui sera nettement végétalisé. A travers l'urbanisme résilient, nous devons prouver que l'on peut construire autrement la ville, en coconception avec les habitants, en y incluant une mixité générationnelle, et non uniquement par les « sachants ». La façade importe moins que la qualité de vie des logements. Parmi les critères qu'il faudra respecter : pas plus de 40 logements par opération, privilégier les systèmes constructifs mixtes (bois-béton, brique cuite ou crue, terre), utiliser des matériaux biosourcés, prévoir des espaces à vivre plus généreux, un maximum de logements à double orientation pour garantir une ventilation naturelle. Nous demanderons en outre 30 % de surface végétalisée a minima. En faisant participer les habitants, notre objectif à trois ans est qu'il n'y ait plus de recours systématiques sur les permis de construire.

Comment concilier votre objectif de construire 50 % de logements sociaux sans artificialiser les sols ?

Nous allons reprendre 10 projets en cours et définir des critères à respecter. Avec ces premiers programmes démonstrateurs, nous allons ouvrir la voie et améliorer les projets, même au dernier moment : créer des espaces publics végétalisés et non bétonnés, construire sur un parking existant, ce qui n'artificialise pas de sol. Changer la structure béton par du bois ou de la terre coulée est également possible. Certains promoteurs et bailleurs ont vite compris l'intérêt de concevoir autrement. En utilisant ces procédés constructifs, les économies réalisées au niveau du chauffage et de la qualité du logement intérieur peuvent être fléchées sur le couvert végétal. Car végétaliser est toujours moins cher que bétonner.

Allez-vous réorienter la ZAC Bastide Niel ?

Le projet actuel de Winy Maas ne tient pas le choc du changement climatique. Il n'a pas été pensé pour ça car il est trop minéral. Nous allons revoir les choses avec ce qui nous importe maintenant, c'est-à-dire le confort d'été dans les bâtiments. Nous gardons les 4 500 logements et les équipements prévus, mais sans bétonner les espaces publics, et en repartant de l'intérieur du logement et non de la façade. Les logements mono-orientés, c'est fini.

Enormément de permis n'ont pas encore été validés. J'ai gelé toutes les dernières mises en concurrence, de façon à ce qu'il n'y ait plus d'attributions de marchés à des promoteurs. J'ai prévenu l'ensemble de ces derniers qu'ils allaient être retardés de plusieurs mois dans les projets.

Quelles sont vos attentes sur ce projet ?

Sur cette ZAC, nous voulons le fractionnement d'un très gros projet en cinq îlots plus petits, abordables pour des petits promoteurs. Il faudra également revoir les matériaux mis en œuvre : la façade minérale, on n'en veut plus ! Nous allons regarder ce que l'architecte peut proposer avec du bois, de la brique, cuite ou crue, de la terre coulée entre les banches.

Nous avons montré avec Aquitanis [qu'a dirigé Bernard Blanc de 2008 à 2019, NDLR] et l'architecte Paul Rolland qu'on pouvait utiliser cette technique à Biganos avec de l'argile provenant du Barp, l'un des principaux gisements de terre crue à bâtir en France. Ce qui donne des murs porteurs de très bonne qualité biothermique sur le confort d'été.

Outre la végétalisation de tous les espaces publics, nous allons également remettre des fontaines, un fil d'eau traversant et constituer une trame bleue sur l'ensemble de la ZAC.

Et pour Brazza ?

Nous discutons avec l'architecte Youssef Tohmé et le paysagiste Michel Desvigne, dont le projet reste toujours extrêmement intéressant. Il faut absolument démarrer le paysagement, alors que les premiers immeubles occupent déjà le front de Garonne. Au débouché du pont, nous pouvons créer d'intéressantes perspectives vertes vers les coteaux.

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