Commun aux deux fédérations luxembourgeoises d’entrepreneurs (1), l’Institut de formation sectoriel du bâtiment (IFSB) a conçu son siège comme un outil d’entraînement de la profession à la construction durable. « Par rapport au standard des bâtiments tertiaires ou semi-industriels, nous avons presque divisé par quatre les consommations d’énergie et les émissions de gaz carbonique », se réjouit Bruno Renders, directeur de l’Institut. Les performances calculées atteignent 54 kWh/m2/an pour la consommation d’énergie primaire, pour une émission annuelle de 11,70 kg CO2/m2/an.
Créé ex-nihilo en 2002, l’IFSB a organisé un concours d’architecture réservé aux jeunes praticiens luxembourgeois. Carol Rodesch, la lauréate, a cherché ici à « éviter les déperditions thermiques par une structure simple et compacte, disposée selon une orientation solaire optimale ». Seul le cube du hall d’accueil, de biais pour mieux mettre en scène sa fonction, rompt avec la structure parallélépipédique de l’ensemble. L’architecte a traduit la volonté environnementale et pédagogique du maître d’ouvrage en privilégiant les matériaux bruts : bois, métal, mais surtout béton noir et gris, préfabriqué ou coulé en place. En s’appuyant sur cette conception, l’IFSB a pris en charge directement la question énergétique. La méthode a consisté à évaluer chaque option en termes de coût, de performance et de temps de retour sur investissement. « Les premiers calculs de notre BET aboutissaient à une consommation totale d’énergie de 84 kWh/m2/an. Nettement mieux que les 207 kWh/m2/an atteints par la moyenne des bâtiments tertiaires au Luxembourg, mais insuffisant au regard de notre souhait de laisser une trace durable », fait valoir Bruno Renders.
Choix multicritères
Conseillé par un BET spécialisé dans la thermique, le siège de l’ISFB est alors divisé en cinq zones obéissant à des logiques distinctes : bureaux et classes, ateliers, auditorium, circulations, locaux techniques. La réflexion sur chacune a conduit à innover : « Dans les salles de cours qui nécessitent un confort thermique immédiat, les radiateurs sur chaudière à biomasse se révèlent mieux adaptés que le chauffage au sol. Ce dernier se justifie en revanche dans les bureaux », explique Julien Bertucci, formateur en construction durable et responsable du suivi des performances énergétiques du bâtiment.
Dans les ateliers où l’utilisation d’engins mécaniques exclut tout chauffage au sol, l’analyse énergétique a convergé avec la préservation de la santé des stagiaires : les aérothermes, habituels en de tels lieux, brassent la poussière et diffusent moins bien la chaleur que des panneaux radiants en plafond connectés aux capteurs solaires thermiques. Cette dernière option s’impose d’autant mieux qu’une faible différence de coût sépare les deux solutions. « Le temps investi dans cette démarche a engendré un gain de 500 000 euros sur les études thermiques d’exécution », affirme Julien Bertucci. Au final, le surcoût environnemental n’atteint que 8,07 % du budget des travaux, au lieu des 10 % provisionnés. Pendant la première saison d’exploitation, l’envol du prix du fuel a démontré la pertinence économique de la chaudière à pellets.
Soucieux d’éviter les dérives financières, l’ISFB n’a pourtant pas hésité à assumer certains choix : malgré un temps de retour sur investissement estimé à cent ans, les 28 000 euros engagés pour le puits canadien se justifient par le gain de confort et par la dimension pédagogique de l’équipement. Bientôt consultables sur Internet, les consommations de l’IFSB servent de supports d’enseignement. Le souci de cohérence se retrouve dans le fonctionnement du bâtiment : les stagiaires gâchent leur mortier à l’eau de pluie, utilisée également pour les toilettes, tandis que la terre déplacée pour la construction sert de terrain d’apprentissage pour la conduite d’engins.







