La période de crise sanitaire et les mesures de confinement prises par le gouvernement ont paralysé l'activité économique, ne permettant pas aux usagers de se rendre dans un office notarial afin de signer leur acte de vente. Si les procurations sous seing privé constituent des substituts efficaces, elles ne peuvent pas être utilisées pour régulariser certains actes, comme la vente d'un immeuble à construire dans le secteur protégé où la forme authentique est imposée à peine de nullité. Les professionnels du droit et de l'immobilier ont dû faire preuve d'une grande adaptabilité afin de ne pas ralentir les transactions immobilières.
Le autorise l'acte notarié à distance ou la comparution à distance. Ce décret est la preuve d'une grande avancée technologique dans le notariat. Il permet la signature d'un acte authentique « lorsqu'une ou toutes les parties ou toute autre personne concourant à l'acte ne sont ni présentes ni représentées ». Il importe peu que les parties soient localisées en France ou à l'étranger.
Entré en vigueur le 5 avril 2020, ce texte constitue une dérogation aux dispositions de l', permettant que le consentement des parties soit recueilli devant deux notaires différents. Si ce dispositif constitue une progression majeure vers une digitalisation quasi-systématique, il doit néanmoins s'exercer dans des conditions strictes.
Tout d'abord, la comparution à distance fait peser sur le notaire le même devoir de conseil et les mêmes obligations que l'acte reçu en présence des parties. Il doit donc procéder à la lecture de l'acte à laquelle les parties assistent par visioconférence « au moyen d'un système de communication et de transmission de l'information garantissant l'identification des parties, l'intégrité et la confidentialité du contenu et agréé par le Conseil supérieur du notariat ». À ce jour, les notaires ne peuvent utiliser que le système LifeSize, seul logiciel agréé par le Conseil supérieur du notariat. Le notaire envoie aux parties un bordereau de confirmation de recueil de consentement.
À l'issue de cette lecture, le notaire doit recueillir le consentement des parties « au moyen d'un procédé de signature électronique qualifié répondant aux exigences du décret du 28 septembre 2017 ». À cet effet, le notaire adresse à chacune des parties une attestation de confirmation du consentement qui doit être signée électroniquement. Ce procédé requiert l'intervention d'un prestataire extérieur (Docusign), qui va identifier de manière fiable les parties. Cette attestation doit être annexée à l'acte. Enfin, de manière classique, le notaire appose sa signature sur l'acte à l'aide de sa clé REAL. Le dispositif est ouvert aux notaires qui n'en sont pas équipés, par une mise à disposition par leurs confrères de leur système de visioconférence. Les notaires ont donc trouvé des solutions permettant de faire face à cette crise et d'éviter une paralysie complète du secteur de l'immobilier.
Quel avenir pour cette pratique ? Le décret prévoit la mise en place de ce régime dérogatoire de comparution à distance « jusqu'à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la date de cessation de l'état d'urgence sanitaire ». Il convient néanmoins de s'interroger : s'agit-il réellement d'un dispositif temporaire, qui pourrait être déployé en cas de survenance d'une nouvelle crise, ou la pratique va-t-elle pérenniser ce procédé ? S'il pourrait s'avérer utile pour la régularisation des actes de vente lorsque les parties sont à l'étranger ou ne peuvent aisément se déplacer, sa destinée reste incertaine.