La compagnie La Machine n’est pas une troupe de spectacle de rue comme les autres. Depuis son expérience avec l’urbaniste Alexandre Chemetoff sur l’île de Nantes, son directeur artistique François Delarozière intervient désormais dans la transformation des villes en apportant une part de rêve dans les aménagements urbains.
Au-delà des spectacles de rue comme Long Ma Jing Shen créé pour le cinquantième anniversaire des relations France-Chine, L’Expédition végétale ou Les Mécaniques savantes avec son araignée géantes… qui ont fait la réputation de La Machine dans le monde entier, la compagnie possède désormais quelques belles références en aménagement urbain.
Ces architectures en mouvement ont pour vocation d’accompagner les projets d’urbanisme en créant des perturbations dans la continuité urbaine. Ces équipements pérennes et touristiques s’offrent aussi comme spectacle au quotidien et contribuent ainsi à renforcer l’attractivité d’un territoire.
Ainsi, outre les Machines de l’Ile de Nantes, cœur névralgique du projet urbain, La Machine est également intervenue dans le réaménagement de la place Napoléon de La Roche-sur-Yon (Vendée), dans la création du quartier de Montaudran à Toulouse (Haute-Garonne) avec La Piste des Géants et Le Minotaure ou encore à Calais (Pas-de-Calais) où un dragon géant anime le nouveau front de mer.
Changer de regard sur la ville
Le projet du Hellfest à Clisson s’inscrit dans cette logique où les architectures vivantes de La Machine transforment le regard que nous portons sur les villes. A Clisson, il s’agit aussi de valoriser l’entrée d’une ville qui a été « médiévale, italienne et désormais rock city » comme aime le rappeler Xavier Bonnet, maire de cette ville de Loire-Atlantique de 7 500 habitants.
« Depuis 2012 et son déménagement sur le site actuel, le terrain accueillant le Hellfest est devenu au fil des années un lieu de promenade et de tourisme avec parfois un millier de visiteurs par jour. Partant de là, nous devions réfléchir à donner un sens à ce parc, au-delà de la simple organisation du festival » explique Ben Barbaud, directeur de Hellfest Productions.
C’est ainsi qu’est née l’idée de créer une place piétonne végétalisée avec pour protectrice des lieux, la femme-scorpion qui contrôlera le passage entre notre monde et celui de l’enfer. Cette sculpture en mouvement de 10 m de haut et pouvant accueillir 25 personnes est la pièce maîtresse du projet. Faite de bois et d’acier, elle se déplace sur huit pattes, adoptant une démarque entre le crabe et l’araignée. « Sa bouche et son dard crachent de l’eau, du feu et de la fumée » précise son créateur, François Delarozière.

Croquis de la Gardienne des Ténèbres par François Delarozière @ Compagnie La Machine
Une architecture d’enfer
Pour l’accueillir, l’agence nantaise Forma6, en charge de l’aménagement urbain, a imaginé un bâtiment de 450 m2, baptisé La Porte des Ténèbres. A la fois atelier de maintenance et lieu d’accueil du public, il servira de lieu de réception évènementiel et accueillera l’Extrême Market lors du festival. Sa charpente métallique sera très ornementée avec notamment deux portes araignées s’ouvrant à 90° dont les griffes produiront des flammes, de la fumée et de la brume en été.

Modélisation 3D de la Porte des Ténèbres qui servira à la fois de lieu de maintenance et de réception. © Compagnie La Machine
Le site accueillera également une aire de jeux pour enfant reprenant les codes esthétiques du Hellfest. Enfin, la mythique discothèque, le Looksor immortalisé en chanson par Philippe Katerine, originaire de la région, sera transformé en brasserie nommée Hellcity de 1 500 m2 avec une capacité de 600 couverts. « Ce site doit garder sa capacité évènementielle mais c’était l’ancien parking de la discothèque et nous allons pouvoir retrouver de la perméabilité et planter davantage afin de lutter contre le phénomène d’îlot de chaleur » explique Xavier Glemarec, paysagiste chez Forma6.
Porté par l’association Hellfest Production, ce projet est estimé à 12 millions d’euros, soit l’équivalent de l’investissement des équipements et décors installés sur le site. Les collectivités (ville, agglomération, département et région) participeront au financement mais la répartition est encore à définir.
Le permis de construire de la brasserie est déjà déposé, les autres devraient l’être pour la fin de l’année et La Machine vient de démarrer la construction de la Gardienne des Ténèbres dans les ateliers de l’île de Nantes.
Les travaux de la Portes de Ténèbres démarreront en mars 2023 et suivront, en septembre, ceux du parvis de la brasserie. L’objectif est d’ouvrir le nouveau parc pour l’édition 2024 du Hellfest.